Shalimar

Ce parfum, encore plus dans sa version extrait, m’évoque l’odeur d’un foulard de soie sur lequel aurait été renversé par inadvertance un flacon d’essence de vanille. Et même si Shalimar n’a pas une facette gourmande à proprement parler, j’ai envie de dire qu’il y a bien aussi quelques relents de crème anglaise, très vanillée et que l’on aurait corsée avec un jus de citron.

En dehors de l’extrait, superbement puissant et raffiné, j’aime beaucoup l’eau de toilette, dans laquelle bergamote et citron sont les vedettes et se font successivement frais, acidulés et doux, comme pour mieux annoncer le contraste avec la vanille, chaleureuse et sensuelle. Les parfums Guerlain ont beau être réputés pour leurs effluves poudrés et vanillés, on a tendance à oublier un peu vite qu’ils utilisent de façon aussi prodigieuse les notes hespéridées !

Dans la lignée de l’eau de toilette, l’eau légère parfumée est une reformulation de la composition de 1925 (sans la trahir, car le thème principal originel est bien présent), jouant habilement sur le côté fruité des agrumes (citron, bergamote, orange), qui cette fois se font sentir jusqu’en fin de composition, au lieu de s’évanouir progressivement pour laisser place aux notes orientales. Ce qui donne au final une senteur à la saveur de crème Chantilly parfumée au citron et au sucre vanillé, assez délectable, même si un peu écoeurante à la longue, car très tenace, malgré l’appellation d’eau légère ! Eau de Shalimar conviendrait mieux, même si cette eau a bien plus de personnalité qu’une simple eau fraîche. Ca tombe bien, me direz-vous, puisque c’est apparemment le nom qu’elle adoptera cette année (pour une durée de vie limitée, si j’ai bien compris), si tant est qu’il s’agisse bien de la même formule et pas d’un nouvel avatar de Shalimar...

Shalimar Shalimar ... quel nom magnifique, enchanteur, pour une fragrance tout aussi magique et envoûtante.

J’en aurai mis du temps à le découvrir ce Shalimar ! Ayant tendance à me tourner vers des parfums moins célèbres, par peur de le sentir à chaque coin de rue, j’ai néanmoins, il y a quelques années, daigné sentir ce Shalimar aussi connu, aussi vendu que son rival le fameux n°5...

Et oh quel bonheur ! Je comprends pourquoi ce parfum avait tout pour me plaire. Il a en effet ce côté animal que j’aime tant chez Jicky (que je portais déjà) avec ces notes de vanille, ce côté poudré, puissant, ravageur. Une déferlante !

Là où Jicky se fait canaille, Shalimar se la joue ensorceleur, on ne peut qu’être irrésistiblement attiré par ces notes à la fois citronnées et vanillées.

Il est gourmand tout en restant féminin, on est loin des Angel et autres parfums qui ont su pourtant nous séduire avec leurs notes caramélisées chocolatées et j’en passe. Je peux me lasser d’Angel, d’A*Men, je les porte par périodes. Mais je ne me suis jamais encore lassée de Shalimar.

Au contraire. A chaque automne et chaque hiver, je le redécouvre. Je le porte de jour, pour aller travailler, il n’est pas réservé aux grands soirs où on veut se la jouer vamp. Ô non. Voilà le Shalimar que j’aime, et qui, tout compte fait, est loin de se sentir à chaque coin de rue justement !

Il est sans âge. Mais je trouve qu’il correspond bien à la femme de 30 ans, si je devais le cataloguer dans une décennie.

Ce n’est pas un parfum de dadame, ou de personne âgée, même si un jour ça m’a amusée d’entendre une septuagénaire qui dans une parfumerie parlait de "son" Shalimar ! Elle se l’était approprié, jimagine que ça avait dû être le parfum de sa vie.

Je porte la version eau de parfum, mais l’eau de toilette est tout à fait satisfaisante pour une soirée d’été, quand j’ai envie de porter autre chose que des hespéridés et autres parfums verts.

Les flacons sont superbes, surtout les rééditions pour ses 80 ans, l’édition années folles, avec un verre semi opaque. Le même flacon est sorti un ou 2 ans plus tard avec un fond bleuté superbe (pour moi le plus beau flacon) et plus récemment, à Noël 2007, toujours la même forme mais un flacon tout noir, sauf quand on le regarde dans la lumière, où l’on retrouve ses teintes bleutées magnifiques.

Un nom féérique, une fragrance exceptionnelle, un flaconnage splendide, pour une maison mythique...

Si Shalimar n’existait pas ...