Auparfum

Chapitre 3 - Une histoire de tubéreuses indociles

par Olivier R.P. David, le 16 octobre 2020

Auparfum vous propose un dossier qui présente la genèse, le développement et les rouages d’une création olfactive hors normes, Nuit de bakélite d’Isabelle Doyen pour Naomi Goodsir. Cette série est née de la même envie de décortiquer un parfum unique comme nous l’avions fait pour L’Heure perdue de Mathilde Laurent pour Cartier.
Nuit de bakélite est une composition unique, au parti-pris radical et en même temps extrêmement sophistiquée. Nous allons maintenant examiner quelle place elle occupe dans l’histoire des grandes tubéreuses de la parfumerie.

Dans le long entretien qui lui est consacré dans le sixième numéro de la revue Nez, Isabelle Doyen parlait ainsi de sa création : « J’ai mis presque quatre ans à travailler cette tubéreuse. Je voulais à tout prix éviter de jouer la fleur sage et doucereuse, et partir sur une fleur aiguisée, enragée. Le croquis de base fut donc une tubéreuse insomniaque, habillée d’un cuir verdoyant (avec de l’isobutyl quinoléine ou IBQ) comme un clin d’œil à l’univers de Naomi, une fleur de nuit blanche débarrassée de ses atours solaires. J’avais en tête l’image d’une tubéreuse à vif, blessée, qui suinte son parfum comme une sève. Je suis très fière que cette composition se soit vu décerner le prix des experts aux Fifi Awards et le prix Art and Olfaction 2018 dans la catégorie Indépendants. Entrer dans la tubéreuse par ses accents verts (le galbanum et des notes “surgalbanisées”) est inhabituel. J’imagine que c’est cela qui a été distingué par les jurys. »

Isabelle a accepté de nous dévoiler les arcanes de ce parfum somnambulique en nous révélant les matières importantes qui entrent dans sa composition. Nous allons ainsi pouvoir mettre notre nez dans la formule de cette potion magique. Mais avant cela, nous allons décortiquer un peu les secrets des grands parfums à la tubéreuse de l’histoire, aînés indociles de Nuit de bakélite.

La tubéreuse n’est pas une fleur sage, son parfum narcotique l’a longtemps rejetée dans l’ombre de la parfumerie. Les codes olfactifs bourgeois la jugeant trop tapageuse, on lui préféra longtemps la violette, l’iris, la rose, ou à l’extrême limite on se laissait envouter par le jasmin ou le gardénia à la sensualité contenue. Mais avec l’après guerre, les temps changent et la tubéreuse va conquérir le devant de la scène avec un parfum fracassant.

Pour commencer, écoutons Colette nous parler de la puissante Circée-tubéreuse :

« Le gardénia. ...sûr que je suis de n’avoir pas de rivaux, hormis, je l’avoue, une rivale... devant qui je fais parfois pis que d’avouer, j’abdique. Certaines nuits méridionales sont prometteuses de pluie, certains après-midi grondants de foudre nonchalante, alors ma rivale ineffable n’a qu’à paraître, et tout gardénia que je suis je faiblis, je me prosterne devant la tubéreuse. Elle ne m’en a pas de gratitude. Sa fraîcheur, qui est celle d’un jeune bout de sein, dure plus que la mienne. Elle en abuse pour insinuer que je vieillis mal, et que dès le troisième jour de mon épanouissement, j’ai l’air d’un gant de bal tombé dans le ruisseau. »
Le Monologue du gardénia – Pour un herbier, 1947

Son amour passionné de la tubéreuse lui a d’ailleurs fait regarder d’un œil circonspect le rôle de la chimie dans la parfumerie moderne :

« Chimiste, chimiste… Je tiens à mes illusions, monsieur. Quand je respire un parfum vanillé, je crois bonnement que vous y mettez de la vanille ; j’espère que la violette sent la violette ; il me semble que l’odeur de la tubéreuse coule des calices étroits, intarissables, et non d’un sale petit résidu minéral… Chimiste ? On le sait, allez, on ne le sait que trop, que vos parterres ont le goudron pour rosée sur des bourgeons d’anthracite… »
Parfums Gabilla – Paysages et portraits

Un Fracas de tubéreuse

Colette semble avoir pourtant applaudi à la création de Fracas en 1948, composé par Germaine Cellier pour leur ami commun Robert Piguet. On trouve fort peu de tubéreuse naturelle dans Fracas mais on y perçoit pourtant la puissance narcotique de la fleur grâce à une overdose de matières synthétiques. Pour l’anecdote, la légende dit que les chiens adorés de Robert Piguet, les premiers lévriers afghans élevés en France, auraient prêté leurs noms à Fracas, et au futur Bandit. On sait par ailleurs avec certitude par ses disciples Christian Dior et Hubert de Givenchy que son premier lévrier s’appelait Narcisse, ce qui ne laisse pas de faire fantasmer sur ce qu’aurait pu être un parfum Narcisse par Germaine Cellier.

Germaine Cellier (26 mars 1909 – 12 juin 1976) à droite, avec ses deux « cocottes » dans le laboratoire Roure-Exarôme de Neuilly.
(Source Vanity Fair)

Pour ce qui est de Fracas, la « Grande Mademoiselle », surnom de l’indomptable Germaine Cellier, parfumeure chez Roure, va utiliser pas moins de 3,5 % de gamma-undécalactone et de gamma-nonalactone pour lui donner sa suavité charnue. Construit autour d’un cœur floral constitué de fleur d’oranger et de jasmin, comme toute tubéreuse, elle est enrichie de notes de gardénia, de muguet et d’œillet. Mais attardons-nous sur ces deux lactones, parfois appelées improprement aldéhydes C-14 et C-18 par les parfumeurs, qui donnent à Fracas son caractère de tubéreuse outrageusement pulpeuse. La gamma-undécalactone ou lactone pêche, est effectivement présente dans la pêche, on la trouve aussi dans l’abricot, la prune, l’osmanthus ou le fruit de la passion. Sa synthèse est réalisée en parallèle au début des années 1900 par deux équipes de chimistes, l’une française avec Emile Edmond Blaise et L. Houillon, l’autre russe, avec A. A. Schukow et P. I. Schestakow. Mais le duo français publie ses résultats le premier dans un article du Bulletin de la Société Chimique de Paris de 1905 alors que les russes attendent 1908. Et c’est justement en 1908 que Firmenich propose ce produit aux parfumeurs, incorporé dans la base Persicol qui exploite ses délicieuses notes de pêche. C’est cette lactone qui donnera son duvet fruité de pêche à Mitsouko de Jacques Guerlain en 1919 et à Iris gris de Vincent Roubert pour Jacques Fath en 1947. Elle peut être traitée du côté de la prune, comme le fit Edmond Roudnitska pour Femme de Marcel Rochas ou Diorella de Christian Dior, ou encore dans Féminité du bois de Christopher Sheldrake avec Pierre Bourdon pour Serge Lutens.

La gamma-nonalactone ou lactone coco est elle naturellement présente dans l’abricot, la noix de coco et l’osmanthus, et est préparée artificiellement pour la première fois par Emile Edmond Blaise et A. Koehler en 1909. C’est elle qui apporte un coté très crémeux à Fracas.

Lactones

Toxine tubérique

Ce sont encore ces lactones qui entrent dans la composition de Poison, la tubéreuse exubérante et thermonucléaire du milieu des années 1980, véritable fille cocaïnée de Fracas, composée par Edouard Fléchier pour Christian Dior. Nous avons une idée des matières à l’œuvre dans ce parfum-monument grâce au livre de Robert Calkin et Stephan Jellinek, Perfumery practice and principles. Ainsi, on y apprend que cette tubéreuse à épaulettes, démarre avec le cri de l’essence de cyprès qui perce à travers la mandarine et le géranium, dans un souffle de rose électrique avec l’oxyde de rose. Arrive ensuite le cœur de fleur d’oranger, donné par les bases de Schiff comme l’Aurantiol, composé d’hydroxycitronellal et d’anthranilate de méthyle. Ce cœur épicé d’eugénol, à odeur d’œillet, est gonflé des notes douces de l’héliotropine, de la coumarine et de la vanilline. Contrairement aux bouquets floraux classiques, basés sur les notes de violette des méthylionones, Poison tire son opulence florale des notes de muguet du Lyral et du Lilial, piqués des notes vertes et anisées du Canthoxal. Le caractère tubéreuse est lui apporté par les lactones que nous venons de voir, C-14 et C-18, encore renforcées par la gamma-décalactone et les notes tonitruantes de wintergreen apportées par le salicylate de méthyle. L’exubérance est portée à son comble avec les notes de fruits trop mûrs des damascones. Le tout repose sur un socle de muscs, Galaxolide, Celestolide et musc cétone, profond comme un divan de lupanar. Poison a probablement été pensé comme une version internationale de Giorgio par Francis Camail et Harry Cuttler pour Beverly Hills, turbulente blonde solaire à l’américaine, née en 1981.

Le Cri du calice

Giorgio et Poison vont enfanter une ribambelle de parfums floraux où la tubéreuse est plus ou moins en vedette : citons Byzance (Nicolas Mamounas et Alberto Morillas, pour Rochas, 1987) ou Amarige (Dominique Ropion, pour Givenchy, 1991.) Mais parmi ces dames à la présence généreuse, une diva va pousser une note plus aiguë lorsqu’en 1998 Serge Lutens sort Tubéreuse criminelle composé par Christopher Sheldrake. De façon intéressante, elle présente la fleur dans une sorte de ralenti temporel qui permet d’en comprendre le parfum complexe et changeant. Selon l’heure de la journée et son stade de floraison, la tubéreuse offre des odeurs très contrastées qui sont déroulées en séquences bien distinctes dans ce parfum. Un départ médicinal strident, fait du souffle acéré du camphre porté par les aldéhydes métalliques. Ce contre-ut percutant résonne quelques moments pour laisser place à une jacinthe verte et craquante puis progressivement s’alanguir dans la douceur crémeuse que présente la fleur lorsqu’elle emprunte ses effluves au jasmin et à la fleur d’oranger, tout en conservant un accent un peu rauque avec l’œillet et le styrax. Cette cantatrice garde un caractère unique, personne ne pouvant imiter son timbre sans tomber dans le plagiat. Il faudra donc attendre qu’un parfumeur obsédé par les fleurs s’attaque à la tubéreuse sous un angle radicalement différent pour construire un parfum à la stature digne d’entrer dans le cercle des divas assoluta.

Grande odalisque

Dominique Ropion, fin connaisseur du monde olfactif floral, analyse que dans l’absolue de tubéreuse, se « superposent fraîcheur verte et douceur lactonique à la tonalité animale » dans son livre Aphorismes d’un parfumeur (2018). Pour Frédéric Malle il va recomposer une tubéreuse naturaliste mais en la décalant d’une impression purement figurative ; ce sera Carnal Flower, sorti en 2005. En réalité, c’est un parfum bien plus complexe qu’un soliflore, Dominique Ropion capitalise sur ses recherches des grands bouquets orchestraux, Amarige et Ysatis en tête, sauf que contrairement à ses ainées, Carnal Flower est élancée et musculeuse. La vivacité initiale de l’eucalyptus reprend comme nous le verrons dans le chapitre suivant les notes du cinéol, présent dans la fleur fraîche. Cette voix vibrante est portée par les trépidations des aldéhydes lui donnant une radiance incomparable. Le corps ferme de la tubéreuse garde ce frissonnement à fleur de peau, gainant la chair fuselée du jasmin, de l’ylang et de la fleur d’oranger, rendue pulpeuse par des notes de melon et l’épiderme velouté par les notes de coco des lactones. Bien ancrée sur de solides cuisses musquées cette grande odalisque meut prestement sa longue silhouette intranquille et porte le visage altier d’une tubéreuse hissée sur la tige, un large sourire aux lèvres.

Renouveler un genre ne se fait pas si souvent, ce qui n’empêche pas les explorations poétiques, comme la tubéreuse - fleur d’oranger de Do Son (Fabrice Pellegrin, Diptyque, 2005) ou le gracile Gucci Bloom (Alberto Morillas, Gucci, 2017) qui marque le retour de la tubéreuse dans la parfumerie grand public. Mais en mars 2017, un météore olfactif tombe sur la communauté des passionnés de parfum au salon Esxence de Milan et est accessible au public dès le mois de juillet ; c’est le dévoilement de Nuit de bakélite. Cette irruption renversante faisait suite à quatre ans d’attente, puisqu’une page du site de la marque Naomi Goodsir indiquait depuis 2013 qu’un parfum élaboré en collaboration avec Isabelle Doyen était en préparation avec une indication laconique : « Naomi Goodsir Parfums | NUIT de BAKÉLITE – Eau de Parfum by Isabelle DOYEN - Coming soon ... » et la photo d’une tubéreuse sur fond noir.

Le lendemain de mon anniversaire, le 23 juillet 2017, je reçois la commande du flacon de Nuit de bakélite, je suis ébahi et rédige un commentaire sur le site :

« Une giclée vive de néroli et le strident du petit grain. Une montée de fleur d’oranger, amère, jaillissante, irradiante. Puis elle s’efface et les accents fumés arrivent déjà, en même temps que la verdeur de sève de racines terreuses. L’huile de cade, chaude, goudronneuse et le galbanum crissant tournoient l’un autour de l’autre. Des note irisées, de carottes fraîchement coupées, un iris terreux plus que poudré viennent rendre tout ça humain et harmonieux. Et dans cette lumière irréelle vert pâle et grise, la tubéreuse s’avance lentement. Ni camphrée (comme dans Tubéreuse criminelle), ni fruitée (comme le mythique Fracas et ses overdoses de lactones coco/pêche), ni métallique (comme Carnal Flower et ses aldéhydes hurlants) la tubéreuse est ici une reine qui marche à pas lents, sûre de sa beauté, sans accoutrement ostentatoire, ni pose de vamp. Elle sait que ce qui fascine le plus chez elle c’est la façon dont elle perce la nuit, sans tapage, incidemment, le minuscule calice posé au haut de la grêle tige diffusant à des distances étonnantes son odeur narcotique qui s’insinue dans le sommeil des belles endormies et provoque des rêves étranges et troublants, comme l’exprimait Colette : "…un orage pesait sur le début de la nuit et retardait mon sommeil, je l’attendais, elle, la tubéreuse. J’étais sûre qu’elle viendrait. Elle s’embarquait sur le sirocco, traversait la route, forçait ma porte de toute sa puissance de fleur, et mollement montait l’escalier […] je dors sous sa garde ; d’une seule hampe fleurie naît et se dilate une nuée de songes…"
Le parfum chemine alors interminablement avec une constance tranquille dans cette verdeur fumée, qui s’arrondit de notes un peu céleri qui évoquent une vieille échoppe d’herboriste. En le portant, le plus surprenant c’est l’extrême puissance du parfum, qui va pourtant de paire avec une extrême délicatesse de l’harmonie des notes. À y bien penser, petit grain, iris, fumée, tubéreuse, terre, tout cela devrait partir dans tous les sens, et pourtant tout se tient de façon si aisée. Comme une assemblée de personnalités aux caractères très affirmés qui cohabitent en bonne entente, la créatrice ayant orchestré tout cela avec une intelligence du cœur et de la main qui est bouleversante. »

Il est temps maintenant d’entrer dans le cœur du parfum et de découvrir les arcanes olfactifs de Nuit de bakélite. Ecoutons la parfumeure : « La sève de la tubéreuse, une tubéreuse écorchée, une tubéreuse dans une cage en cuir couverte de verdure, un focus sur le petit pédoncule qui relie la fleur à la tige, le bruit du latex lorsque plusieurs tiges de tubéreuses s’enchevêtrent, la majesté sauvage des tubéreuses perses ». La tubéreuse qu’Isabelle avait en tête est celle qui pousse en Iran, tubéreuse perse qui ne possède pas un unique calice comme celle de Grasse, mais qui a une floraison double, voire triple.

Tubéreuse iranienne (Photo de Michel Roudnitska)

Ses longues tiges sont aussi plus larges et produisent un son de caoutchouc, de latex, lorsqu’elles glissent les unes contres les autres, sensation sonore importante qui induit l’idée de la bakélite. On peut imaginer ces crissements avec la photographie de Nicolas Wilmouth Le Lièvre et la Tubéreuse de la série « Fables » en 2016.

Le Lièvre et la Tubéreuse, « Fables », Nicolas Wilmouth, 2016

L’idée olfactive initiale est celle d’une fleur de tubéreuse blessée, sectionnée de sa tige et qui pleure des larmes de sève. Ces pleurs de tubéreuse sont déjà présents dans le poème Nudité de Renée Vivien, où elle est associée comme pour Colette à la beauté galbée d’un sein nubile :

Nudité

L’ombre jetait vers toi des effluves d’angoisse :
Le silence devint amoureux et troublant.
J’entendis un soupir de pétales qu’on froisse,
Puis, lys entre les lys, m’apparut ton corps blanc.

J’eu soudain le mépris de ma lèvre grossière…
Mon âme fit ce rêve attendri de poser
Sur ta grâce où longtemps s’attardait la lumière
Le souffle frissonnant d’un mystique baiser.

Dédaignant l’univers que le désir enchaîne,
Tu gardas froidement ton sourire immortel,
Car la Beauté demeure étrange et surhumaine
Et veut l’éloignement splendide de l’autel.

Éparse autour de toi pleurait la tubéreuse,
Tes seins se dressaient fiers de leur virginité…
Dans mes regards brûlait l’extase douloureuse
Qui nous étreint au seuil de la divinité.

Renée Vivien, Études et Préludes, 1901

Tubéreuse, le nom lui-même porte l’idée d’une forme attirante et désirable. Sa désignation botanique est Polianthes tuberosa, tirée du latin tuberosus « qui a des protubérances ». Comment Isabelle Doyen a-t-elle rendu en parfum cette fleur mélancolique qui laisse couler ses larmes de sève tout en nous séduisant de sa grâce lunaire ?

D’une façon toute terminologique, Nuit de bakélite pourrait être classée dans les chypres cuirés verts, marquant ainsi une filiation avec l’autre monument édifié par Germaine Cellier, Bandit pour Robert Piguet. Cependant, si leur structure est similaire, les matériaux eux sont tout autres, à l’exception notable d’une solide charpente d’IBQ qu’ils partagent. Selon sa créatrice, Nuit de bakélite peut ainsi être décrit comme campé sur une massive tige verte, qui traverse toute la structure et reste présente de la prime tête à l’ultime phase de son évaporation. S’accroche à ce squelette végétal une chair florale fibreuse de tubéreuse, de fleur d’oranger, d’ylang et de karo karoundé, fleur atypique aux accents de jasmin enrichi de notes narcotiques. Ce cœur est innervé des notes d’un iris grenu, rêche, dont les aspects de carotte dialoguent avec la verdeur de la tige. Le tout est habillé d’un cuir à la texture sophistiquée, infusé d’IBQ, à la fois terreux et verdoyant. Dans les trois chapitres suivants nous allons ainsi examiner une à une les matières importantes de chaque membre, tige, cœur et caparaçon de cuir, qui sont détaillés dans l’infographie récapitulative ci-dessous :

Cette formule, dont l’équilibrage méticuleux a demandé pas moins de 850 essais, a été construite pas à pas, par ajustements progressifs réalisés selon une stratégie d’exploration systématique, en variant un à un les ingrédients. Pour avancer facilement, une base faite d’ingrédients déjà équilibrés est préparée en grande quantité, à laquelle sont ajoutés les ingrédients à tester pour voir leur effet sur la composition comme il apparaît sur une feuille de formulation qu’Isabelle Doyen a bien voulu nous dévoiler.

Feuille de formulation pour « BKBL » nom de développement pour Nuit de bakélite (Source : Isabelle Doyen)
L’orgue à matières premières d’Isabelle Doyen dans son laboratoire Aromatique majeur où les essais de Nuit de bakélite ont été pesés. (Source : Mon Blog de fille https://www.monblogdefille.com/blog/dans-le-labo-dannick-goutal/ )

Photo d’illustration principale de l’article : une tubéreuse ©Michel Roudnitska

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par Kouros, le 17 octobre 2020 à 08:51

Quel argument publicitaire ce dossier sur la création de ce parfum. J’ai eu un échantillon, c’est pas mon style de parfum et je n’ai osé le porter que sur le poignet avant d’aller au travail. Un seul spray en portant un autre parfum donc je ne l’ai pas vraiment porté.
Ce qui m’a frappé c’est l’odeur que l’échantillon rangé dans un tiroir à diffusé dans toute la pièce principale.
En lisant ça j’ai vraiment envie d’acheter un flacon entier, même si c’est pas mon style, au moins pour l’oeuvre que c’est et le porter pour moi de temps en temps.
Pourquoi dit on que la tubéreuse a une odeur narcotique ? Elle est utilisée dans des remèdes pour ceux qui ont du mal à trouver le sommeil ?

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par Passacaille, le 17 octobre 2020 à 11:25

Bonjour Kouros,

Heureux que le dossier ait éveillé votre curiosité, mais il ne faut pas que cela devienne une injonction à le porter, les parfums, même les chefs-d’œuvre, ne plaisent et ne conviennent pas à tout le monde, en dernier ressort, c’est votre gout propre qui doit vous dire si le parfum est fait pour vous ou si c’est juste une oeuvre à sentir de temps en temps, comme ça simplement sur une touche ou dans un tiroir à secrets :)

Bonne question sur la tubéreuse narcotique, la définition est "Qui assoupit, engourdit la sensibilité" la fleur se met à sentir surtout à la fin de la journée, au début de la nuit, à ce moment elle diffuse son odeur qui fait tourner la tête et d’après Colette pousse à des rêves étranges !

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Duolog

par Duolog, le 16 octobre 2020 à 17:56

Il y a quelque chose de vertigineux à penser que l’on peut polir sur un temps aussi long quelque chose d’aussi abstrait. Et c’est assez beau de passer en revue toutes ces interprétations de la tubéreuse, qui peut occuper des places si différentes selon les compositions... Ce dossier me remplit de joie !

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par Passacaille, le 16 octobre 2020 à 19:03

Il faut aussi prendre en compte le fait que c’est un projet qu’elle a travaillé pendant 3-4 ans en fil rouge entre les développements qu’elle poursuivait pour Goutal et quelques autres marques.
Je réalise maintenant que ce devait probablement être des moments de pauses pour elle, à délaisser les commandes pressantes, se mettre tranquillement à la balance pour ce bébé BKBL, le voir grandir doucement, l’avoir en tête, le laisser murir seul un temps et y revenir plus tard... le projet fétiche, auquel on va quand le quotidien vous oppresse, vous sort par les yeux... une île.

Oh quelle joie, de lire ce mot, rien ne me fait plus plaisir que de lire que la joie émane de la lecture du dossier :)

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