Portrait of a Lady

Dans le petit fascicule qui accompagne mon échantillon de Portrait of a Lady (et oui, c’est assez rare, mais l’attachée de presse Frédéric Malle a la gentillesse de m’envoyer les nouveautés !) un petit texte nous raconte que cette nouvelle création de Dominique Ropion était venue du constat que « certains éléments du fond de Géranium pour Monsieur avaient le potentiel de devenir le coeur d’un parfum oriental moderne ». Le résultat serait donc une sorte d’hybride disproportionné de notes de fond, faisant basculer dans la balance le poids des muscs et du patchouli au détriment du santal, et l’arrosant généreusement d’une dose inhabituelle d’essence de rose. Pourtant, si l’on n’a pas lu le dossier de presse, il y a peu de chance que ce Portrait vous évoque le Geranium, si ce n’est la patte du parfumeur, et la qualité certaine de ses compositions.

Il est amusant de lire comment une marque qui s’est positionnée depuis ses début comme sans marketing, utilise un discours autour de la création, en divulgant des éléments qui sont rarement relayés, mais qui constituerait presque malgré lui une forme de marketing !

Bref, je ne leur jette pas la pierre, au contraire, si ce genre de discours marketing pouvait inspirer les "chefs de produits" chez L’Oréal, LVMH ou Procter & Gamble, on leur en saurait gré.

Pour en revenir au parfum, si vous vous demandez quels sont les points communs avec l’autre rose majestueuse de la marque, Une Rose, je dirais que si cette dernière se trouvait, avec ses notes de vin et de terre, dans une dimension très organique, la nouvelle est complètement minérale. Les épices chaudes, l’encens et le patchouli la placent par ailleurs dans un univers oriental très typique des pays du Moyen Orient, où la rose est la reine des parfums, toujours flanquée de sa dose de oud à l’odeur de biquette plus ou moins acceptable pour nous, occidentaux. Portrait of a Lady serait donc une version soft et raffinée de ces parfums des mille et une nuits, qui pourrait d’ailleurs bien avoir été créée dans le but d’atteindre ces nouveaux marchés fructueux... Ici, point de oud à proprement parler, mais de puissants bois fumés et musqués qui entraînent le parfum vers un univers sombre, charnel et même presque plus masculin dans ses notes de fond.

A la fois composition au discours volontairement (ou faussement ?) transparent et intimiste, et probablement une nouvelle opportunité de marché, Portrait of a Lady est avant tout une création de qualité et de luxe, tenue et sillage d’exception y compris. Certes, cela a un coût, mais les Shéhérazades en puissance qui savent faire les calculs auront vite compris que pour le même prix, il vaut mieux s’offrir le Malle que deux flacons de Belle d’Opium.