Perle de Mousse

Un parterre de verdure, un ruisseau coule derrière des arbustes et buissons.
Des étoiles nacrées basses semblent scintiller parmi les herbes folles. Tombées du ciel, elles illuminent les parterres verdoyants.
On croirait des perles.
Je m’approche.
Près des herbes hautes, la végétation se fait parfois plus rare. Moussue. Humide. Quelques minuscules champignons poussent également.
Le soleil, à son zénith, transperce les branchages assombris par les feuillages épais.
Le bruit du cours d’eau devient plus imposant.
Les perles se font laiteuses. Fragiles. On croirait les entendre tinter.
Leur nacre se fait mate et immaculée. Presque poudrée, vaguement terreuse.
Le ciel s’obscurcit. Une averse tiède brutalise leurs clochettes. Elles remuent, gigotent, mais résistent.

Perle de Mousse possède l’attrait nacré de clochettes de muguet semblables à des bulles iridescentes dans un bain moussant. Elles en ont le charme fragile et délicat.
La senteur verte, vive et brillante par des aldéhydes pimpants, mais aussi fuyante que la fragile fleur de mai émerge dans un bois moussu à la végétation humide qui se désagrège peu à peu, comme en octobre. Un fil de lentisque au vert moelleux permet d’enfiler les perles délicates. C’est là le paradoxe et la magie de la parfumerie que d’être capable, dans une fiole, de faire fi des saisons et de nous transporter d’un moment à un autre l’espace d’une inspiration. L’évocation de ce muguet, déjà paradoxale car plutôt automnale que printanière, est d’autant plus surprenante que la fragile et délicate clochette devient plus solide, plus concrète, et résiste longtemps après cet unique 1er mai, refusant de céder aux mois qui défilent, soutenue par des notes animales et douces de vanille et de musc. Un muguet qui semble célébrer, non le retour à la vie printanier du début de la saison chaude, mais le refus de se soumettre aux malheurs du temps qui passe entre octobre et novembre. Il s’agit là d’une sorte d’illusion poétique.

Perle de Mousse est une œuvre de joaillerie parfumée si ciselée qu’on peut, de prime abord, ne pas remarquer sa beauté tant elle est subtile et discrète. Moins "voyant" que Cuir de Nacre de la même marque et pas aussi lumineux, incisif et vif que Cristalle ou Mito, avec ses jeux d’ombre et de lumière, cet enfilement de perles superbes mérite qu’on en découvre le sautoir et la magie, quelle que soit la saison.