C’est du propre ! La revue de sorties décapantes qui annoncent le printemps
par Gabrielle Fourcade, le 13 mars 2025
À peine sommes-nous sortis de l’hiver que les bureaux de Nez et d’Auparfum sentent à plein nez le linge propre et le coton immaculé. Si les produits ménagers s’inspirent souvent de la parfumerie fine pour odoriser nos intérieurs (lire l’article paru sur Nez à ce sujet), il semblerait que les dernières sorties empruntent à nos lessives leurs notes blanches et ozoniques. 2025, le grand nettoyage de printemps ?
À la rédaction, nous y voyons plutôt une tentative (pas toujours réussie) des marques de tirer leur épingle du jeu parmi les quelque trois mille lancements de parfums qui envahissent le marché chaque année, usant tour à tour du champ lexical de la clarté et de la transparence.
Face à une pollution olfactive toujours plus menaçante, le parfum se veut (et se vend !) déconstruit et ultra purifié.
Quelles que soient les raisons à l’origine de cet exercice de style décapant, voici notre nouvelle revue… tout droit sortie du pressing.
Petit Grain, Kerzon
La marque bretonne spécialisée dans les parfums d’intérieur décline sa gamme de bougies et lessives en parfums, suggérant diverses esthétiques de la propreté. Pour Petit Grain, le nez s’ouvre sur un accord pétillant de citrus, diffusant les notes zestées de la bergamote, du petit-grain et du néroli. L’ensemble s’enrichit de muscs douillets et moelleux, livrant une eau fraîche moderne. Certes, Petit Grain ne réinvente pas la parfumerie, mais il séduit à travers son évocation lessivielle juste bien dosée et la modestie de son prix.
Eau de parfum, 64 euros/50 ml
Bo-Bo, Carner Barcelona
Pour la maison espagnole Carner Barcelona, le propre se veut plus réconfortant. À l’ouverture, les notes pointues et légèrement soufrées de la mandarine offrent une superbe sensation d’amertume. Un accord floral discret de muguet et de jasmin apporte fraîcheur et luminosité à la composition, avant que n’entre en scène un ballet de muscs scintillants. Bo-bo, qui tire son nom d’une danse folklorique méditerranéenne, fait valser ses effluves cotonneux et solaires, pour un effet doudou sur peau. On devine une filiation lointaine avec la Cologne de Mugler, grande première du genre.
Eau de parfum , 170 euros/100 ml
Dawn Whispers, L’Entropiste
Pour Bertrand Duchaufour, la pureté semble tirer son essence du chaos. Le créateur de Timbuktu et de Corpus Equus lançait en ce début d’année sa propre marque à travers six parfums aux univers olfactifs très signés. Pour composer, le parfumeur s’inspire du concept d’entropie, qu’il définit lui-même comme « une recherche délibérée d’un déséquilibre pour atteindre l’harmonie ». Dawn Whispers est une avalanche d’aldéhydes aveuglants, formant un halo de notes froides et métalliques. Comme un portrait olfactif du Carré blanc sur fond blanc de Malevitch, le parfum hurle en silence ses effluves ozoniques. Petit à petit, le monochrome immaculé charge l’air de notes poivrées et vaporeuses, rappelant Avignon, une précédente création pour la marque Comme des Garçons, ou encore le récent New Look, de Francis Kurkdjian pour Dior. Un parfum abstrait et physiquement percutant.
Eau de parfum, 210 euros/50 ml, 295 euros/100 ml
Odeur 10, Comme des Garçons
Pour Comme des Garçons, l’exercice du propre est, sans surprise, poussé à son paroxysme. Complètant la collection des anti-parfums après le nitescent Odeur 53, ou encore l’Odeur 71 aux inflexions de photocopieuse en surchauffe, Odeur 10 est un accord clinique d’eau oxygénée, une ode suprême au fer (à repasser). Une déferlante d’aldéhydes transfigure le portrait olfactif d’une chemise blanche sortant du pressing, largement imbibée d’Ambrofix et de muscs. Une brillance chirurgicale et anticonformiste, bien loin des codes habituels de la parfumerie. Plus décapé que propre, le parfum assume ainsi sans ambages, et même avec une certaine violence, sa radicalité olfactive.
Eau de toilette, 180 euros/200 ml
Perce-Vent, Serge Lutens
Ce dernier lancement s’éloigne de l’écriture habituelle de la maison et emprunte au perce-neige un symbole de renouveau. Le parfum décrit avec poésie un décor de montagne enneigée. Un bouquet aromatique de menthe et de sauge sclarée prend racine à travers un manteau de muscs givrés, soufflant par grandes bourrasques leurs inflexions de lavande et de coumarine. Un petit côté aseptisant sur peau, malgré une envolée aromatique vivifiante.
Eau de parfum, 154 euros/50 ml, 228 euros/100 ml
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