Avignon
Comme des garçons
- Marque : Comme des garçons
- Année : 2002
- Créé par : Bertrand Duchaufour
- Genre : Féminin - Masculin
- Famille : Boisée
- Style : Élégant - Pointu
Encens de chœur
par Thomas Dominguès (Opium), le 4 juin 2014
Lorsque la marque Comme des Garçons, plus connue pour ses parfums modernes urbains à odeurs de gasoil, de goudron, de bois sombres et d’encre d’imprimerie, a lancé sa série sur les encens, matières ancestrales en parfumerie, on aurait pu craindre le pire. En effet, c’est un peu comme si la Fondation Cartier ou le musée du Centre Pompidou à Beaubourg, spécialisés dans l’art contemporain, nous annonçaient vouloir mettre en scène une exposition sur le clair-obscur des XVI et XVIIème siècles ou une rétrospective sur un peintre primitif flamand.
Pourtant, les cinq encens proposés en 2002 dans la série Incense dévolus à quelques-uns des grands cultes religieux de la planète sont plutôt réussis, voire carrément transportants.
Alors que Zagorsk nous emmène au sein du culte orthodoxe, Jailsamer en Orient en rendant hommage à l’hindouisme, Ouarzazate au Maroc avec l’islam, Kyoto nous invite à une méditation entre shintoïsme et bouddhisme au Japon et constitue l’autre proposition captivante dans cette série réussie, aux côtés de l’encens qui nous intéresse.
Avignon est une invitation à nous poser au sein d’un édifice religieux catholique alors qu’un prêtre joue des mouvements de balancier avec son encensoir.
L’encens, soutenu sous toutes ses formes - fumée verdoyante de l’oliban, verdeur de l’élémi, minéralité grasse et ronde de la myrrhe - par la douceur de la vanille et de l’ambre, se fait chaleureux et pas trop acéré.
Le cèdre très fumé, le patchouli et la mousse de chêne rappellent cette impression mêlée à la fois de la sécheresse des bancs, des sièges en bois et de l’humidité lancinante qui apporte son lot de moisissures de cave infiltrées à peu près partout, des poutres jusque dans les armoires, la chaire et l’autel. Une impression délicatement poivrée évoque avec le patchouli la poussière qui se glisse dans les rainures de la pierre et du bois.
Là où on aurait pu craindre un encens minéral et métallique dangereux et aigu comme la roche des blocs de pierre qui s’effritent sur les murs d’une cathédrale, se développe un accord d’encens boisé qui ne dénote ni chez Comme des Garçons avec ses créations boisées ni pour Bertrand Duchaufour dont c’était la signature principale au milieu des années 2000, époque où il mêlera souvent avec succès l’invitation spirituelle à la beauté matérielle dans des créations comme Sienne L’Hiver, Bois d’Ombrie, Timbuktu ou Dzongkha.
Le sacré rencontre le profane pour nous habiller d’une aura à la fois mystique et tout simplement réconfortante comme le sont les souvenirs passés qu’on croyait oubliés.
Avignon n’est probablement pas le parfum à odeur d’encens d’église le plus subtil qui existe. La Lithurgie des Heures de Jovoy et Cardinal de James Heeley, surtout, peaufinent le trait avec davantage de finesse dans le traitement, des notes boisées entre autres. Mais, c’est que la marque Comme des Garçons, pour évoquer les senteurs plus ou moins concrètes de notre environnement, force souvent sur le trait principal afin d’améliorer notre perception du sujet.
Avec Avignon, aucune chance de vous trouver ailleurs qu’entre les pierres froides et grises d’une église ou une cathédrale, qu’on soit un dimanche à onze heures ou non. Et, c’est que - plaisir païen suprême -, cet encens-ci dure bien plus que le seul temps d’une messe.
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par ERIC, le 5 juin 2014 à 09:53
Bonjour à tous,
Je découvre cette critique d’Avignon que j’avais acheté il y a deux ans au cours de ma recherche d’encens. D’abord merci Opium, à nouveau de cette critique car j’étais bien curieux de savoir ce que vous pensiez de lui. Toutefois, après presque 3 ans d’apprentissage de mon nez, je sais pourquoi je ne l’aime pas et pourquoi mon flacon peine à se finir : je répétais alors à qui voulait l’entendre que je cherchais UN encens. Mais en réalité ma demande était mal formulée : je recherchais un parfum d’église. Or, tous les encens que je respirais ne me convenait pas, je n’arrivais pas à me projeter dans le monument. Forcement car pour moi, une odeur d’église, c’est plus de la cire chaude, des lys fané, du produit d’entretien pour bois, de l’humidité un peu, et pas nécessairement de l’oliban brûlé. Mon odeur d’église, je l’ai trouvé avec Reliques d’amour. C’est celle exacte de la cathédrale de Saragossa en hiver, l’intérieur délicatement chauffé par les premiers soleils que j’y ai retrouvé et que je retrouve toujours lorsque je porte Reliques d’amour. Au moins, je suis maintenant au clair avec ma quête. Pour en revenir à Avignon, vous l’avez compris, il ne m’évoque pas un intérieur d’église. J’en ai aimé le côté doucereux, un peu miel ou camomille, la ténacité, le sillage en hiver froid et sec. C’est une réussite
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par ERIC, le 5 juin 2014 à 10:12
Tout est parti trop vite, zut et zut :
*convenaient, *fanés, *trouvée, *retrouvée...
ERIC
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