Serge Lutens inaugure ses Eaux de Politesse avec l’Eau d’armoise
par Jeanne Doré - Anne-Sophie Hojlo, le 12 février 2019
La marque du groupe Shiseido lance une nouvelle référence qui rejoint cinq créations existantes au sein d’une nouvelle gamme, avec un nouveau flacon.
Mise à jour du 16 mai 2019 - Voir la critique d’Eau d’armoise.
« Surgir ou s’éclipser, chaque chose en son heure » : c’est par ces mots que Serge Lutens introduit sa gamme des « Eaux de politesse ». Si le premier verbe s’applique à la plupart de ses parfums, saturés d’épices et de baumes (Ambre sultan, Arabie), ou déployant une matière jusqu’à la saturation (Iris silver mist, Tubéreuse criminelle), c’est le second qui sert de fil conducteur à cette nouvelle ligne, destinée à remplacer la collection des Eaux. On y trouvera désormais les créations les plus transparentes et discrètes de la maison : Santal blanc, Gris clair, Fleurs de citronnier, l’Eau froide, l’Eau de paille (mais pas l’Eau, qui conserve son packaging d’origine – il faut suivre), ainsi qu’une nouveauté, l’Eau d’armoise.
Sans dévoiler de notes ou de matières, la marque la présente selon son habitude avec une phrase sibylline : « Avant que distraitement ma main ne détacha d’un buisson une feuille qu’entre l’index et le pouce je froissais, qui aurait pu prévoir qu’à ce jour en flacon, l’armoise me parlerait ? » Précisons que l’armoise, de la même famille que l’estragon et l’absinthe, a des facettes camphrées, herbacées et amères.
Les « Eaux de politesse » sont présentées dans un nouveau flacon, carré, facetté, transparent, dont la forme évoque un peu celui du N°5 de Chanel, à l’exception du bouchon, qui reprend celui de sa collection Gratte-Ciel, mais translucide.
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Les Eaux de politesse 120 euros/100ml
Disponibles dans les boutiques Palais Royal et Saint Honoré à Paris, et sur le site internet de la marque
A partir de mars dans les parfumeries sélectives
Premières impressions
Si ce nouveau contenant carré, tout en transparence froissée, ne fera sans doute pas grand bruit dans l’histoire du flacon de parfum, L’Eau d’armoise ne déchainera sûrement pas plus les passions.
Un départ bonbon Ricola au sureau, entre les notes menthées et camphrées de l’armoise et d’autres, légèrement fruitées vertes. C’est montant, médicinal, certes un peu original, mais cette ouverture retombe vite et l’évolution peine à maintenir cette singularité, pour glisser dans un accord boisé propre, discret et pas très mémorable.
La marque Lutens semble se chercher une identité (ou un nouveau public ?), entre créations de haute volée (mais au prix très haut en altitude, lui aussi) et ces errances en territoire frais et épuré, dans une sobriété olfactive puritaine et austère.
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par Duolog, le 12 février 2019 à 19:46
Quelle idée ce bouchon... Autant il a son charme sur les flacons noirs, autant ici on dirait que le flacon s’est emmanché sur un flexibles de douche. Quand j’ai vu ça, je me suis dit "bon, pas de jugements hâtifs", et puis quand la vendeuse de Lutens a annoncé les fragrances, j’ai pris un peu peur : Gris clair, Santal Blanc, des eaux ? "Oui ils ont été légèrement reformulés pour rejoindre la collection". S’en est suivi sueurs froides et déglutition difficile au moment d’attraper en tremblotant la magnifique touche-origami du nouveau Santal Blanc, et malheureusement mes craintes n’étaient pas infondées : le jus a été remanié et dilué pour être plus "léger", moins floral, plus "boisé"... La tenue est évidemment sans commune mesure, et le santal lacté que je prenais plaisir à sentir s’installer par le passé s’est tout bonnement... "éclipsé", comme dirait le communiqué de presse. En fait ce nouveau Santal Blanc ressemble pour moi plus à une version light de Upper Ten de Lubin (nouvelle version).
Ces eaux portent bien leur nom, j’ai eu une réaction "polie". Par contre, une aberration déconcertante subsiste : on trouve encore (et heureusement) chez Lutens Santal Blanc, Gris Clair et Fleur de citronnier en flacon cloche à 190 € les 75 ml et donc désormais trois parfums ayant le même nom mais pas la même qualité à 120 € les 100 ml. Je ne sais pas si Lutens se cherche une nouvelle clientèle, mais ce qui est sûr c’est que l’ancienne a de quoi être confuse...
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par Duolog, le 12 février 2019 à 20:49
Correction : sur le site, on ne trouve plus que le flacon cloche de Fleur de citronnier...
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par Iridescente, le 13 février 2019 à 21:43
Bon, voilà que commentant dans mon coin j’ai survolé le texte des autres qui, semble-t-il, ont dit la même chose que moi. Navrée.
Le parfum de ce soir chez moi est justement Fleurs de citronnier, ancienne version, discret certes mais une réelle présence, d’une douceur poétique qui pour moi se teinte d’un peu de mélancolie.
Avant-hier j’ai re-senti Fleurs d’oranger en rayon, et je n’en ai pas cru mon nez : une lavasse ! Alors, oui, je reconnais qu’il est encore joli, mais dans mes souvenirs c’était justement une version plus charnue de la fleur d’agrumes, moins délicate. Là, il est clairement diminué.
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par Duolog, le 13 février 2019 à 23:32
Je n’ai pas eu l’occasion de comparer les deux versions de Fleurs de citronnier mais en vous lisant je me suis souvenu que j’avais un flacon de Fleurs d’oranger période Palais Royal et aussi un décant du même parfum datant d’un an ou deux au plus. Je n’avais jamais pris la peine de les comparer. C’est chose faite, sur touche au moins : dès l’ouverture, les deux parfums présentent des différences, la nouvelle version a tout de suite un côté plus "musc blanc", et un peu moins de profondeur. La version Palais Royal a un côté plus oriental, on y sent une note boisée/épicée qui ne m’est pas perceptible dans la nouvelle version, un côté camphré-cumin, coriandre peut-être, qui lui donne un aspect plus sombre et moins mat. La différence entre les deux jus s’accentue avec le temps, la nouvelle version devenant plus "propre" et fraîche et l’ancienne plus tourbillonnante, moins purement floral avec ses différentes notes, son côté médicinal et "mordant".
La nouvelle version ne me semble pas honteuse, loin de là, mais la touche épicée me manque, et le jasmin plus présent ne me captive pas. C’est un passage vers l’innocence, le voyage est moins exotique, l’ensemble est moins narratif, plus proche de ce qu’on peut sentir ailleurs en terme de fleurs d’oranger.
Finalement, cette comparaison me fait un petit pincement au cœur. J’avais beaucoup de plaisir à sentir cette fleur d’oranger sensuelle et intrigante sur certaines personnes. Bientôt ce sera une autre époque. Pourquoi pas, mais bon...
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par Iridescente, le 16 février 2019 à 22:46
Je raffole du jasmin, mais seul, il me perturbe toujours quand il affleure sous d’autres notes. Le jasmin Lutens, c’est À la nuit, et pas de discussion !
En principe, Fleurs d’oranger a (avait ?) un petit fond de cumin, et se partage une pointe de coriandre avec Citronnier. Dans mes souvenirs, le premier acoquinait son néroli a une tubéreuse dissimulée dans son ombre, quand la fleur de citronnier se fait faire la révérence par un iris... Je préfère l’élégance pensive du Citronnier mais je ne crois pas qu’il y ait assez de fleurs d’oranger canailles en parfumerie pour que l’on puisse se passer de l’ancienne version de celle de Lutens sans se plaindre ! Pour l’aspect aromatique, il y a cette assez étrange Amourette d’E.L.O., mais pour le reste...
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par Garance, le 17 février 2019 à 08:36
Une fleur d’oranger somptueuse et sensuelle, quoique très "dame" : 24, Faubourg en eau de parfum. Mais il s’agit bien sûr plus que d’une simple fleur d’oranger...
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par Farnesiano, le 12 février 2019 à 21:26
« Avant que distraitement ma main ne détacha d’un buisson... » Une fois de plus, Maître Lutens se targue de poésie. À deux sous, oui car si ma mémoire est bonne, " avant que " doit être impérativement suivi du mode subjonctif. Puis, ces deux " que " qui se suivent sont d’une infinie lourdeur. En outre, ce n’est pas le jour qui est ici mis en flacon mais bien l’armoise. La virgule eut trouvé meilleure place avant les mots " en flacon ", non ? On cherche en vain la politesse du parfumeur-poète vis à vis de la langue française. Pénible et ridicule. Sans compter ce transfert superfétatoire d’une partie de ses créations vers une nouvelle collection au nom abscons mais au design sympathiquement rétro. Chut ! On va rester poli...
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par Farnesiano, le 12 février 2019 à 21:29
Oups, le donneur de leçon que je suis à omis les traits d’union de vis-a-vis ;-)
Shame on me !
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par Iridescente, le 13 février 2019 à 21:34
Lundi soir, ayant été mise à la porte des Beaux-arts lyonnais comme d’habitude (les musées ferment bien trop tôt), je me suis comme souvent arrêtée au Printemps, à une heure tardive où les clientes rentrent chez elles et les vendeuses papotent entre elles en bâillant, pour me glisser entre les rayons en sniffant à peu près tout ce qui me tombe sous la main. Une des Guerlinettes m’a encore haranguée, cependant. La prochaine fois, je mets une fausse moustache !
Tout bien considéré, le rayon Lutens est assez indigent, relégué dans un coin au fond du magasin (ça me fait toujours un peu rire), mais je n’ai pas pu résister à un ou deux sniffs à la volée. Et bien, je crois que j’aime son Participe Passé, finalement.
L’armoise (synthétique, ou je serais sortie de là avec un méchant rhume des foins) y est parfaite : sèche, poivrée, camphrée, franchement médicinale, tiens, ça m’a rappelé Arabie que je n’arrive pas à porter parce que j’ai l’impression de m’être rentrée tête la première dans un bain de curry, mais sans le côté culinaire.
C’est moi ou l’oncle Serge ressuce des parfums depuis quelque temps, ou tout au moins des idées, histoire d’accoucher d’une nouvelle collection censément adaptée à un nouveau public... ? (Non, je n’y connais rien en marketing.)
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