Nightclubbing
Celine
Cigarette en chocolat
par Clément Paradis, le 6 septembre 2021
Hedi Slimane rend hommage aux nuits parisiennes, avec une nostalgie fantomatique particulièrement vivace dans le monde du parfum ces derniers temps.
Les jours d’hiver réservent parfois de délicieuses surprises. De passage dans les locaux d’Auparfum il y a près de deux ans, je trouve en évidence sur un bureau neuf miniatures fraîchement livrées, et Yohan Cervi, les yeux gourmands, alignant les touches pour découvrir la collection : « le retour de Celine dans la parfumerie… ça nous ramène aux grands débuts avec Vent fou en 1964 ! Tu connais Vent fou ? » Hélas non. Mais à mesure que l’on s’immisce dans cette nouvelle collection « haute parfumerie », mouillette après mouillette, il devient clair que l’on a affaire à un propos esthétique finement orchestré de la part d’Hedi Slimane et de ses parfumeurs (dont les noms sont hélas jalousement gardés). À l’issue de la séance d’olfaction, chacun a ses préférés : ici La Peau nue, là Reptile, ou Saint-Germain-des-Prés. De mon côté, je suis saisi par Nightclubbing, tout en restant méfiant : en matière de parfum, les premiers émois ne présagent pas toujours le meilleur pour l’avenir. Les mois qui suivirent se chargèrent pourtant de transformer cette toquade en une idylle plus suivie.
Nightclubbing est donc un hommage aux nuits parisiennes et à ses lieux disparus comme le Palace ou les Bains douches… Une nostalgie fantomatique qui semble particulièrement vivace dans le monde du parfum ces derniers temps, comme en témoignent les sorties récentes de Diptyque (Orphéon) ou des Bains Guerbois et leurs clins d’œil appuyés à la même fin de siècle insouciante convoquée par le directeur artistique de Celine.
De cette époque, le parfum ne tire pas seulement un imaginaire, mais aussi quelques codes olfactifs, notamment un départ vert, strict et BCBG, une bouffée de galbanum seventies comme on n’en avait pas senti depuis longtemps. Oui, pendant quelques secondes Nightclubbing se la joue froid et hautain, mais son rendu contemporain, avec sa facette « feuille de tomate », a tôt fait de voir la note verte se réchauffer, se consumer en volutes vanillées, se poudrer d’iris, pour finir en un vétiver suave et fumé, fondant comme du chocolat. Reviennent alors au perfumista averti les bons souvenirs de Dior Homme (l’original, pensé par Hedi Slimane), d’Iris ganache, et même quelque chose de Coromandel dans ces nervures de patchouli qui donnent leurs touches tabacées à l’appétissant appareil. La paresse pourrait pousser à le ranger dans la petite famille des vétivers gourmands, aux côtés de Vétiver Tonka, Fat Electrician et même Aimez-moi comme je suis, mais son ouverture ligneuse puis son fond de chypre vert, à la fois crémeux et poudré, le placent dans un autre univers.
« Rainy nights, on Hausmann Boulevard, Parisian youths, drifting from the bars »… C’est le nightclubbing chaud et froid de Grace Jones et son Libertango qui s’invite ici ; on se prend à imaginer les banquettes de clubs oubliés, les cigarettes blondes, et dans les muscs moelleux une lointaine animalité androgyne, une nuque échauffée glissant sous un perfecto avant d’aller apprivoiser la piste de danse. « Like a hawk stealing for the prey, Like the night waiting for the day »… Comme beaucoup d’oiseaux de nuit, ce Nightclubbing a un look de grande prédatrice mais un cœur d’enfant. Dans son sac effet croco, son miroir est envahi de confettis et ses cigarettes sont en chocolat. Espérons le croiser plus souvent à l’orée des dancefloors contemporains, promis à une nouvelle vie !
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par héspéridés, le 7 septembre 2021 à 14:49
Que cette nouvelle gamme Céline est intéressante, elle nous révèle au passage, s’il en était besoin, tout le talent d’Hedi Slimane qui fait désormais cruellement défaut chez Dior.
Je cherchais depuis longtemps un remplaçant au Dior Homme, depuis que ce dernier a été massacré. La gamme Céline offre de très belles créations, toutes guidées par un même esprit, français et élégant, complexe mais sans arrogance. L’atmosphère humide et chaude, presque animale, des bains nocturnes est très bien retranscrite dans Nightclubbing.
Je trouve qu’il a une évolution sur peau remarquable.
Coup de coeur également pour eau de californie et black Tie.
héspéridés
a porté Nightclubbing le 7 septembre 2021
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Ah, les cigarettes en chocolat ! Aujourd’hui interdites à la fabrication, sauf peut-être en Russie ? Toute mon enfance ressurgit à la seule évocation de cette étrange gourmandise à laquelle mes cousines et moi cédions facilement tout en jouant au patron et à ses secrétaires...
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par Duolog, le 9 septembre 2021 à 19:01
Oui, les cigarettes en chocolat d’antan ont été reformulées en "crayons au chocolat" apparemment ! Ce n’est même pas plus absurde quand on y pense...
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