La vie en roses : le banc d’essai de la rédaction
par Jeanne Doré - Jessica Mignot - Anne-Sophie Hojlo, le 11 février 2022
Serait-ce l’approche de la Saint-Valentin qui provoque une telle effusion de roses en ce début 2022 ? Ou serait-ce toujours cette insatiable envie de nature, de respirer pétales frais et feuillages verdoyants ? Quoiqu’il en soit, on n’a jamais assisté à un tel engouement pour la reine des fleurs. Mais tous ces nouveaux parfums à la rose se valent-ils ? Pour en avoir le cœur net, nous avons senti en aveugle (presque) tous les derniers lancements qui la mettent en avant, et vous proposons un retour olfactif - et objectif.
Eau Rose, Diptyque
Fabrice Pellegrin
Diptyque offre une déclinaison eau de parfum à son Eau rose déjà signée par Fabrice Pellegrin en 2012. Pour cet « hommage fantasque à la rose », le parfumeur a habillé les roses damascena et centifolia de camomille, litchi et artichaut, des facettes déjà présentes dans la fleur. La marque propose par ailleurs quatre bougies inspirées de la fleur dans la même collection : Roses, Artichaut, Litchi, Camomille.
Une rose ancienne dont les pétales délicats et veloutés se mêlent joliment aux intonations vertes, végétales, poivrées, feuille de violette des tiges et des épines. Une des plus réussies de notre sélection. Parmi les bougies, nous n’avons pu sentir que Litchi, assez fruitée et juteuse.
Eau de parfum, 140 euros/75 ml, Bougies 67 euros/190 g
Rose Ardoise, Atelier Materi
Céline Perdriel
Atelier Materi continue d’explorer les matières premières naturelles emblématiques de la parfumerie, offrant cette fois à la rose une interprétation « urbaine et minérale ». Céline Perdriel marie rose Damascena de Turquie, rose Centifolia de Grasse, schinus molle (baie rose), noix de muscade et ambroxan pour combiner « féminité et masculinité, transparence et texture, minéralité et sensualité ».
La rose est si bien réinterprétée… qu’elle ne saute pas vraiment au nez dans la composition, qui est plutôt boisée, résineuse, épicée, avec des nuances de poivre et de baie rose. Le fond boisé fumé, agréable mais discret, laisse enfin distinguer quelques pétales.
Eau de parfum, 220 euros/100 ml
Spicy Rose, Naf Naf
Alexandra Carlin
Naf Naf a récemment lancé une collection de parfums nommée « My five, my emotions » et nous offre une Spicy Rose conçue comme « une déclaration d’amour à la fois fraîche, piquante et généreuse ». Le bouquet de roses bulgares, signé Alexandra Carlin, marié à la framboise et au patchouli, est complété par un « fond très élégant et un brin mystérieux ».
Si la collection comporte notamment une bonne surprise, il ne s’agit pas de Spicy Rose. L’ouverture fruitée, où l’on distingue peut-être la pêche et la fraise, est immédiatement recouverte d’une overdose de sucre vanillé. L’ensemble évoque, non pas la fleur, mais un yaourt à boire un peu écœurant, qui a cependant le mérite de n’être pas vendu, comme d’autres, à prix d’or.
Eau de parfum, 39,90 euros/50 ml
Accrodisiaque, Versatile
Amélie Bourgeois, Camille Chemardin et Elia Chiche
Pour la création récente de Versatile, sa fondatrice Coralie Frébourg a lancé cinq parfums en extraits roll-on huileux, avec la particularité notable d’en détailler la composition. L’un d’eux, Accrodisiaque est décrit comme une « néo rose addictive », avec pour storytelling « nuit de sexe ». La marque annonce des notes végétales anisées, des facettes de thé matcha, et un fond cuiré et animal.
L’une des particularités de cet extrait est de ne pas réellement présenter de notes de tête, ce qui est une conséquence de son support huileux. Mais la rose est en effet bien centrale, avec ses facettes vertes et aromatiques. Elle s’étire longtemps sur un fond boisé et épicé, jolie tout en restant plutôt classique dans son registre « oriental » (mais peut-on encore le formuler ainsi ?).
Extrait, 49 euros/15 ml
Eglantine, Fragonard
Karine Dubreuil
Chez Fragonard, la fleur de l’année n’est pas la rose, mais l’églantine, également nommée rose sauvage et « ancêtre du rosier de nos jardins civilisés ». Karine Dubreuil recrée son parfum « tout en grâce et en subtilité » en associant mandarine, cassis, litchi, églantine, absolu de rose, framboise, « ambre blanc », muscs et cèdre de Virginie.
Une rose fraîche et verte, tout juste cueillie au jardin, qui dévoile d’abord des facettes de citronnelle et de géranium presque métalliques, avant de s’arrondir dans des notes de framboise acidulée et de muscs confortables. Sans être révolutionnaire, cette promenade au milieu des églantiers s’avère plutôt charmante, surtout à un prix si doux.
Eau de toilette, 20 euros/50 ml, existe également en diffuseur et savon
Coach Wild Rose, Coach
Pour ce nouveau flanker de son pilier féminin, le maroquinier américain s’inspire « de la beauté d’un champ de fleurs sauvages ». Le parfum, présenté comme « délicat et audacieux », s’ouvre sur des notes de groseille « juteuse et pétillante » et de bergamote « solaire et épicée », avant de laisser s’épanouir « roses délicates » et jasmin sambac, sur un fond « chaleureux et boisé de mousse cristal et d’ambroxan intense ».
Nulle rose à l’horizon dans ce champ de fleurs sauvages donnant surtout la part belle à une fleur d’oranger baignée dans un sirop de fruits rouges et de bois ambrés. Un cocktail à la mode qui n’est pas sans évoquer le nouvel Interdit de Givenchy…
Eau de parfum 21,50 euros/10ml, 51,90 euros/30ml, 74 euros/50ml, 104 euros/90ml
Mémoire de roses, L’Artisan parfumeur
Christophe Raynaud
L’Artisan parfumeur lance une édition limitée, décrite comme « un hybride de rose et d’agrumes ». Christophe Raynaud a souhaité « immortaliser la fraîcheur d’une beauté fugace » en liant la reine des fleurs aux agrumes. La marque y voit un « hymne joyeux à la créativité, à l’inventivité, à l’art du jeu et du contre-pied ».
La rose est d’abord fraîche et hespéridée, avec des notes fruitées légèrement aqueuses, rappelant le litchi. Les agrumes se font rapidement très incisifs, s’imposant avec force. Ils sont finalement soutenus par un fond piquant de bois ambrés que l’on aurait préféré ne pas rencontrer. Une rose qui ne restera pas dans les rayons, ni dans les mémoires.
Eau de Parfum, 150 euros/100 ml
Rose tonnerre, Éditions de parfums Frédéric Malle
Édouard Fléchier
Ceci n’est pas vraiment une nouvelle rose, mais simplement un nouveau nom pour celle qu’Édouard Fléchier avait initialement composée pour Frédéric Malle en 2000. La raison semble être liée à son exportation en Chine, où le nom d’origine ne pouvait pas être déposé.
Comparée à un flacon d’Une rose datant d’il y a quelques années, pas de différences suspectes : on retrouve la fleur en majesté, d’abord fraîche puis plus veloutée, miellée, terreuse, rétro et opulente à souhait. Si son sillage surpasse de loin la plupart des roses de la sélection, son prix aussi, malheureusement.
Eau de parfum, 59 euros/10 ml, 155 euros/30 ml, 205 euros/50 ml, 290 euros/100 ml
Lovers in Pink, Cherigan
Conçue en hommage à l’œuvre de Marc Chagall et de sa muse Bella, cette création de Cherigan, maison parisienne des Années Folles tout juste relancée en 2021, propose « un bouquet de roses, de pivoines et de jasmin » sur fond boisé, qui « pétille sous un effet cassis - citron - gingembre », telle « une déclaration d’amour à l’art sous toutes ses formes ».
Ce qui ressort surtout au premier coup de nez, c’est un effet caramélisé-boisé-ambré avec des intonations de confitures de pétales de roses, de fruits rouges, et surtout une réminiscence de l’accord bien connu de Baccarat rouge 540 de Maison Francis Kurkdjian, qui se révèle en fond. Un bouquet confituré, en somme.
Extrait de parfum, 128 euros/100 ml
La Petite Robe noire rose rose rose, Guerlain
Delphine Jelk
Si la version originale du best-seller de Guerlain mettait déjà à l’honneur la rose - considérée comme « l’âme de La Petite Robe noire » par Delphine Jelk - sous deux formes (absolue turque et essence bulgare), cette variation pensée comme un hommage à la reine des fleurs « invite une troisième rose à rejoindre la danse : la variété Centifolia de Grasse, aux accents délicieusement miellés. »
On retrouve l’accord amandé, cerise, réglisse, légèrement poudré de l’original, et même si la rose n’y est pas centrale, elle semble apporter sa rondeur florale et une douceur veloutée. Le parfum évolue vers un fond plus classique, boisé, crémeux, fève tonka, légèrement chypré, qui reflète l’esprit de la maison Guerlain sans s’encombrer de sucre inutile.
Eau de parfum, 76 euros/30 ml, 105 euros/50 ml
Rose métamorphose, Virevolte
Jeune marque basée en Provence, Virevolte propose une gamme de quatre « parfums naturels et sensoriels », constitués d’extraits naturels et d’alcool de blé bio. Cette Rose métamorphose, destinée à une « femme Nymphe, douce, innocente », à porter « pour rayonner », habille la rose de fleur de coton, citron, note verte, freesia, élémi, note aquatique, styrax et benjoin.
Cet accord composé en 100% naturel souffre sans doute de la comparaison avec ses acolytes « traditionnels ». La rose y apparaît très métallique, presque stridente, entourée de notes hespéridées et aldehydées de citron et d’orange, très verte et même aqueuse, voire ozonique, ce qui peut surprendre pour du naturel. Le fond, plus résineux, baumé, patchouli, s’arrondit légèrement, mais s’évanouit assez rapidement. L’avantage : on peut tester le parfum commandé grâce à un échantillon et renvoyer son flacon s’il ne convient pas.
Eau de parfum, 75 euros/50 ml
Rose de Chine, Rose de Russie, Rose d’Amalfi, Tom Ford
Ce n’est pas une mais trois roses que lance Tom Ford, dans sa collection Private Blend, liées à trois jardins invitant au voyage. Rose de Russie est décrite comme une rose « opulente, sombrement dramatique » mêlée au poivre blanc, aux bois et au cuir. Rose de Chine est qualifiée d’« étonnamment décadente et indomptable », avec son contraste entre le pivoine et les notes fumées de ciste et de myrrhe. Rose d’Amalfi dresserait quant à elle un portrait « intime et discrètement sensuel » de la fleur, mariée à la bergamote, aux baies roses et à « l’héliotrope ensoleillé ».
Nous n’avons pas eu l’occasion de les sentir.
Eaux de parfum 215 euros/50 ml
Countess Olenska, Rosé, Halfeti Rose, DSH Perfumes
Un autre triptyque est proposé par DSH Perfumes, la marque de Dawn Spencer Hurwitz, parfumeuse américaine artisanale, peintre et aromathérapeuthe. Countess Olenska est une « un soliflore mystique de rose jaune », dont l’ouverture hespéridée et verte joue avec des facettes plus pulpeuses, chaudes et épicées. Rosé évoque l’odeur et la couleur de ce vin d’été à travers des notes fruitées et aqueuses – mais non océaniques, précise la marque. Halfeti Rose, lancée en édition limitée, habille un accord rose-oud de résines, d’encens, de fruits et de galbanum.
Nous n’avons pas eu l’occasion de les sentir.
Eaux de parfum, Coffret 75 dollars/3 x 5 ml (roll-on remplissables), également disponibles à l’unité, en différents formats et à différents prix.
Visuel principal : Les Roses d’Héliogabale, Lawrence Alma-Tadema, 1888, collection Pérez Simón, Mexico.
Un article de Constance de Roubaix et Carole Couturier est consacré à ce tableau dans le neuvième numéro de la revue Nez
Thèmes
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par jovi, le 12 février 2022 à 16:11
Je suis un homme bien que j’adore le parfum de la rose j’ai dû mal à le porter le bon vieux préjugé la rose c’est pour les filles me poursuit (lol), je fais une exception le jour de la St Valentin, je n’offre pas de roses ces fleurs rouges qu’on vend pour cette occasion n’ont pas de parfum ! Mais je sens la rose à plein nez (lol) donc je m’offres à l’être aimé (lol)
Merci en tout cas chers rédacteurs pour cette petite sélection.
Mes roses favorites : Lustre Hiram green, Rose de mai Perris Monte Carlo (JC Ellena) et Rose de Taif (extrait) finaliste aux Art and Olfaction awards 2016, en bonus la Rose Millésimée de Jovoy.
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Bonjour,
Merci pour ce récap de Roses super interessant !
Ma rose préférée à ce jour reste la Rose Millésimée de Jovoy ainsi que Une Rose de Frederic Malle. J’ai des échantillons de ce dernier qui datent d’il y a 8 ans encore chez moi, ils étaient très généreux à l’époque ;-). Je l’utilise par parcimonie.
J’ai testé le Lovers in Pink qui est plutôt jolie mais j’ai senti trop de l’amertume de cassis sur ma peau.
La Rose de Artisan Parfumer, Mémoire de roses, ne m’a pas plu du tout, je l’ai trouvé presque agressive.
Celle de Diptyque me donne envie d’aller la découvrir, je le ferai prochainement ;-)
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