Azurée
Estée Lauder
Coup de cœur
- Marque : Estée Lauder
- Année : 1969
- Créé par : Bernard Chant
- Genre : Féminin
- Famille : Chypre
- Style : Classique - Élégant
Soleil d’automne
par Aurélien Caillault (PoisonFlower), le 23 août 2015
A une certaine époque, les gammes parfumées pour le bain et le corps étaient en vogue aux Etats-Unis.
Témoin de cette tendance, on pense à Youth-Dew, qui remporta le succès que l’on sait au début des années 50 grâce à son huile pour le bain. Mais toujours chez Lauder, on pourrait aussi évoquer le moins connu Azurée, qui fut lancé en 1969 comme une "fragrance pour le bain" déclinée en huile et sels de bain, savon, lotion, etc., ainsi qu’en une version alcool nommée à l’époque "Cologne", que l’on trouve aujourd’hui sous l’appellation "Eau de Parfum" et qui reste le seul produit disponible de la ligne.
Cela a bien sûr donné des idées à certaines marques européennes soucieuses de conquérir le marché américain. Ainsi, Dior sortit également en 1969 une gamme complète bain et corps baptisée Dioressence. Enfin, précisons pour l’anecdote qu’il s’agissait de la première version de Dioressence : le parfum allait en effet être retravaillé en 1979 à l’occasion d’un lancement plus traditionnel et global censé rivaliser avec le raz-de-marée Opium !
Voilà pour le préambule. Faisons à présent plus ample connaissance avec Azurée, inspiré, nous dit-on chez Lauder, par le bleu de la mer et l’ambiance méditerranéenne de la maison de vacances d’Estée Lauder, située idéalement au cap d’Antibes.
La première impression est une note très réussie d’agrumes légèrement amers et pétillants ; certains parlent d’un effet Schweppes, c’est tout à fait ça !
Puis, la bergamote prend le dessus et se pare d’accents cuivrés, voire caramélisés, qui l’emmènent vers une note de fruit ensoleillé presque confit, type pêche ou prune, et d’épices comme la cardamome ou le cumin. Le cœur se révèle plus floral et classique avec un côté jasminé et savonneux, que vient relever une pointe fruitée me rappelant le melon et des parfums comme Knowing ou Le Parfum de Thérèse.
On plonge enfin dans le solide fond chypré, qui se fait très sec avec une note évoquant le cuir des sièges d’une voiture restée au soleil.
Quelques jours après l’avoir porté, Azurée laisse sur les vêtements un effluve caressant et épicé, presque salé, que je serais tenté de rapprocher du curry...
La marque a beau vouloir associer Azurée à une atmosphère estivale (cf. notamment la publicité ci-dessus), j’avoue avoir du mal à la percevoir en respirant le parfum. Car s’il possède une belle aura ensoleillée, c’est davantage un paysage d’automne doux et radieux, aux tons or, marron et ocre, qu’il recrée selon moi. Comme un rappel de ces jours où le soleil jette ses derniers feux avant l’hiver et donne des airs d’été indien à la saison.
Je retrouve un peu de cette lumière, et donc un peu aussi de l’esprit d’Azurée, dans le Technicolor flamboyant et suranné des mélodrames hollywoodiens de Douglas Sirk. Je pense par exemple au générique de début de Tout ce que le Ciel Permet (All that Heaven Allows, 1955), dont est extraite la photo ci-dessous.
D’un point de vue chronologique, Azurée s’inscrit dans la vague de chypres cuirés féminins qui a déferlé dans les années 50-60 : Jolie Madame (1952), Cabochard (1959), Diorling (1963), Miss Balmain (1967)... Une sous-famille olfactive que Bernard Chant connaissait bien, puisqu’il avait déjà signé deux archétypes du genre, le féminin Cabochard et le masculin Aramis (1964).
Avec ce Lauder, il propose une note cuirée tout aussi racée, mais moins radicale et sombre, plus ronde et enjouée, grâce à l’ajout d’une tonalité fruitée/épicée, qui semble rendre hommage aux grands classiques chyprés fruités : l’ombre de Mitsouko ou de Femme plane ainsi fortement par instants !
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par A meza machja, le 10 février 2016 à 23:41
Me voici un peu émue et hésitante... car c’est ma première intervention sur Auparfum. La culture de la plupart des participants en matière de parfums me "bloquait" un peu. Je lis avec délectation vos savantes analyses et j’essaie désormais de mettre des mots précis sur mes sensations. Pas évident ! Je fais mes gammes. J’apprends... J’ai depuis peu un dessus de commode réservé aux flacons et aux nombreux échantillons que je "teste", comparant mon ressenti à celui décrit si judicieusement par certains d’entre vous.
Je voulais néanmoins intervenir sur ce sujet. J’ai en effet retrouvé il y a peu, dans un tiroir chez ma Maman, un adorable coquillage en métal doré, superbement guilloché. Il gisait là, abandonné dans des replis soyeux. Une concrète d’Azurée. Mon père la lui avait offerte il y a bien une quarantaine d’années et Maman en avait trouvé, je pense, le parfum trop capiteux.
’Trop" est un adverbe que, il faut l’avouer, j’ai du mal à employer dans ce domaine. De Shalimar à Opium en passant par L’Heure bleue, j’ai toujours eu un faible pour les fragrances un peu puissantes. Et, comme beaucoup parmi vous, je me désespère de ne pas retrouver, dans les senteurs édulcorées qu’on nous propose désormais, ce qui faisait le charme prenant de ces parfums mythiques. Vous lire m’a du reste rassurée : je croyais que j’étais seule à déplorer cette sinistre évolution et mettais donc cela sur le compte d’une regrettable perte de mon odorat.
A la lecture de vos commentaires sur Azurée, j’ai voulu comparer vos ressentis et le mien. Comme vous, je ne trouve pas que ce soit un parfum estival, un parfum de bord de mer. Et j’ai, moi aussi, un peu de mal au début : des notes un peu trop capiteuses sans doute. Mais elles s’arrondissent voluptueusement très vite et comme elles persistent ! Quel sillage ! Je n’ai pas eu l’occasion de sentir Azurée autrement que par cette concrète, je ne sais s’il y a eu reformulation depuis. Cela serait dommage, grand dommage car malgré les années qui ont passé, ma petite concrète dégage toujours un parfum envoûtant. Et puis, il avait été choisi par mon Papa... qui n’est plus. Je ne peux qu’être infiniment subjective.
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par LizaDiParma, le 17 juin 2016 à 15:17
Bonjour A meza machja,
Je ne connais pas Azurée, mais je trouve votre commentaire sublime et très émouvant.
J’espère avoir un jour l’occasion de sentir ce parfum
Au plaisir de vous relire,
Liza
par Thierry, le 24 août 2015 à 17:25
En tête, je parlerais davantage d’un effet "Coca" dû à l’accord limette-cannelle, mais pour moi aussi l’ambiance est clairement automnale (ou sur un mode été indien).
Quelle bonne nouvelle s’il est désormais largement disponible en France, j’avais acheté mon flacon à Berlin où on trouve aussi assez facilement Alliage.
Très beau chypre cuiré, loin des caricatures proposées par toutes ces marques de niche à la c—.
Comme Gé, j’espère qu’il n’a pas été atrocement reformulé...
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par Géraldine, le 25 août 2015 à 14:15
La réponse de Poison Flower laisse à penser qu’il faudra encore lui faire traverser l’Atlantique pour se le procurer. Et le mystère reste entier sur une potentielle reformulation. Grrr. Entièrement d’accord avec toi sur l’effet coca, c’est d’ailleurs un moment un peu difficile à passer pour moi mais heureusement je connais les délices qui m’attendent donc je serre les dents ;-)
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par dau, le 25 août 2015 à 14:26
La distribution Lauder est largement meilleure en Allemagne donc il suffira probablement de passer le Rhin.
par Géraldine, le 24 août 2015 à 16:20
J’aime beaucoup cet Azurée qui est en effet très ensoleillé, comme l’est Dolce Vita dans un style différent. Je le porte plutôt en dehors de l’été -le cuir et la chaleur font rarement bon ménage. Donc team "pas côte d’Azur" aussi !
Quand j’ai acheté mon flacon il y a quelques années, je me l’étais fait rapporter des Etats-Unis car il n’était pas commercialisé en France, et le flacon que j’ai n’a rien à voir avec le visuel de l’articel : est-il désormais disponible en France, avec ce nouveau packaging ? Bien que cela fasse craindre une reformulation (on avait été à l’abri jusqu’à présent chez Lauder, mais quand je sens la dernière version de Private Collection j’ai envie de pleurer), cela serait une bonne nouvelle !
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par PoisonFlower, le 25 août 2015 à 02:29
Le flacon que j’ai mis en photo pour l’article correspond à celui utilisé pour la collection The House of Estée Lauder, qui rassemble huit classiques de la marque : Estée, Azurée, Aliage, Cinnanar, Spellbound, Tuscany per Donna, Intuition et Beyond Paradise sont ainsi tous dotés du même flacon depuis cette année.
Je possède moi aussi l’ancien flacon (qui est d’ailleurs bien plus intéressant avec son côté vintage très 70s), que j’ai eu la bonne idée de commander sur douglas.fr l’an dernier pendant qu’il en était encore temps, puisque peu après le site a fermé pour cause de fusion de Douglas avec Nocibé et de disparition en France de la première enseigne au profit de la seconde...
Dommage, car le site proposait quelques trucs intéressants que l’on ne trouve pas ou peu en France : Aramis, les Jil Sander, les Lauder introuvables en France (Azurée, mais aussi Alliage et Spellbound ; malheureusement pour moi, ils ne proposaient pas l’huile de bain Youth-Dew, snif)...
Avec cette collection The House of Estée Lauder, je me disais que les choses changeraient peut-être, mais non, sur les huit références qu’elle compte, seuls Estée, Cinnabar, Intuition et Beyond Paradise sont commercialisés en France (cf. site de Nocibé), grrrr !
N’ayant pas eu l’occasion de sentir Azurée depuis qu’il a changé de flacon, je ne saurais dire si ce changement a été l’occasion d’une reformulation et donc d’un amoindrissement de la formule...
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par PoisonFlower, le 25 août 2015 à 02:37
Il faut bien sûr lire Cinnabar et non Cinnanar... Que Cinnabar me pardonne cette infamie bien involontaire ! ^^
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par Jicky, le 25 août 2015 à 02:43
J’ai eu Cinnabar au téléphone. Non, il ne veut pas. Pour la peine tu dois me donner toute ta collection Lauder.
Affectueusement,
Jicky.
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par PoisonFlower, le 25 août 2015 à 02:52
Encore un parfum qui joue les divas, pfff...
Tu vas donc te retrouver avec quatre malheureux flacons... Et là, je sens poindre ta déception !
Déception qui sera d’autant plus grande, quand tu découvriras que je possède en fait Pleasures for Men, Modern Muse, Modern Muse Chic et Modern Muse le Rouge (the new flanker, STP !) ! :-P
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par Lady of Shalott, le 26 août 2015 à 18:12
Etrange ! Je croyais que Modern Muse avait déplu. Pourquoi avoir investi dans toute la collection ?
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par PoisonFlower, le 26 août 2015 à 20:27
Mon message était bien sûr ironique ! ;-) Comme j’essaie d’être sage et de ne posséder que ce qui me plaît vraiment, je me contente pour le moment de Youth-Dew, Azurée, White Linen et Cinnabar.
Modern Muse est loin d’être désagréable, mais un peu trop générique à mon goût pour que j’investisse dans un flacon !
Je connais mal le premier flanker (senti vite fait, je n’avais d’ailleurs pas trop senti la différence avec l’original...) et le nouveau Le Rouge (un oriental fleuri fruité apparemment : roses bulgare et centifolia, framboise, cassis, poivre noir, safran, vanille de Madagascar, patchouli, vétiver, jasmin, magnolia), je ne pense pas qu’il soit encore sorti en France, il faudra que je regarde aux Galeries Haussmann à l’occasion, ne serait-ce que par curiosité...
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par Lady of Shalott, le 27 août 2015 à 13:47
Je comprends mieux... je me sentais déroutée à l’idée que vous ayez dépensé de l’argent dans tous les Modern Muse immaginables.
par dau, le 24 août 2015 à 14:46
Pour moi aussi, la côte d’Azur, c’est non...Mais pourquoi pas, dans un esprit jet-set qui se moque de l’heure et des saison en traversant le monde à bord d’un avion privé ? A essayer. En attendant, reste sur moi un joli cuir, assez peu fleuri, qui se révèle plus amusant qu’Aramis. Je ne suis pas très cuir en parfum, mais c’est celui-là que j’ai choisi pour placer dans ma collection, un parfum à poigne, dans un gant de velours.
J’ai envie de dire qu’il faut le sentir, absolument, pour relativiser nos enthousiasme face à certaines collections de niche qui n’ont pas tout inventé contrairement à ce qu’elles essayent de faire croire ! Faite croire que ce n’est pas signé Lauder mais d’une marque improbable à concept et le prix pourra doubler ou tripler. (On parie ?) Bref, cherchez tous à mettre le nez dessus si vous ne le connaissez pas encore !
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par PoisonFlower, le 25 août 2015 à 01:11
Moi non plus, je ne suis pas très cuir : ça donne souvent des parfums fascinants et charismatiques, mais je serais bien incapable de les porter pour la plupart. J’ai du mal avec leur côté fumé, souvent trop dur, trop âcre à mon nez.
Seules exceptions, Azurée donc (que je trouve plus sec et chypré que véritablement cuiré) et puis Cuir de Russie (que je n’ai pas encore dans ma collection, mais que j’aurai un jour ou l’autre, c’est sûr !), qui est plus fumé, mais la touche florale très Chanel me le rend tout à fait accessible. J’aimerais aussi faire plus ample connaissance avec Cabochard et Empreinte... Et là grosso modo j’ai fait le tour des parfums à note cuirée qui m’intéressent et pourraient me convenir !
Pour revenir à Azurée, même s’il a du caractère comme tout bon Lauder qui se respecte, je trouve qu’il possède en même temps une lumière qui le rend réellement souriant, bien plus en tout cas que l’autre grand chypre maison, Knowing, qui me paraît au final plus sombre et autoritaire.
par invité, le 23 août 2015 à 22:57
Quel article intéressant PoisonFlower, merci beaucoup pour ce moment de lecture.
Il existe un décalage similaire avec Beautiful très prisé par les mariées aux Etats-Unis, alors que ce parfum est plutôt porté chez nous par des femmes affirmées.
par Memories, le 23 août 2015 à 22:53
Bravo pour ce bel article dans lequel je reconnais tout à fait la description de l’un de mes parfums préférés, y compris la référence à Douglas Sirk, l’un des plus grands metteurs en scène de mélodrames, dont j’ai pratiquement vu tous les films, y compris ceux réalisés en Allemagne, son pays d’origine, avant son départ aux USA pour cause de rejet du régime hitlérien.
Une belle description d’un parfum vraiment beau et qui réconcilie avec les grandes fragrances.Merci encore.
par zapakh, le 23 août 2015 à 21:23
PoisonFlower, je vous félicite pour ce brillant article ! Merci pour les références et le voyage. Estée Lauder est une belle maison. Bonne soirée et... vivement l’automne !
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