Arpège
Lanvin
- Marque : Lanvin
- Année : 1927
- Créé par : André Fraysse - Paul Vacher
- Genre : Féminin
- Famille : Florale
- Style : Classique - Opulent
Symphonie florale
par Jeanne Doré, le 5 juin 2007
Arpège a été composé comme cadeau d’anniversaire offert par Jeanne Lanvin pour les 30 ans de sa fille Marie-Blanche. Elle souhaitait créer une nouvelle fleur, jamais sentie auparavant, et la liberté qu’elle a laissée aux parfumeurs a donné naissance à un accord riche et opulent, mélange complexe et harmonieux de rose, de jasmin, d’ylang-ylang, d’iris et de néroli, utilisant les meilleures qualités d’essences alors disponibles.
Les aldéhydes, dont la voie avait été ouverte avec Chanel N°5 quelques années plus tôt, ont été repris ici pour envelopper le bouquet floral et lui donner du relief et de l’envolée. Le fond est vanillé, vétiver et ambré, et donne sur la peau un effet chaud et crémeux, qui dure une éternité.
Début des années 90, la formule d’Arpège a été “ré-orchestrée” comme le disent les marques, afin de le rendre plus accessible, plus “au goût du jour”, en remplaçant notamment certaines matières premières naturelles par des nouvelles molécules de synthèse. Cela fait de l’Arpège actuel un parfum certes appréciable, mais considérablement différent de l’original, que je me souviens avoir senti dans les années 80, et qui m’avait complètement bouleversée.
La structure d’Arpège, innovante et subtile, a été une grande source d’inspiration et est ainsi devenue le chef de file de nombreux parfums floraux aldéhydés poudrés comme Madame Rochas, Calandre ou Rive Gauche.
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par Nez inexpert, le 16 décembre 2023 à 03:49
J’ai trouvé quelques gouttes de vieil extrait. Bonté divine ! C’est la neuvième symphonie de la parfumerie : toute création ultérieure à cette splendeur semble superflue. Même Blaque opium extrême ? Même Blaque opium extrême !
par Farnesiano, le 26 avril 2020 à 09:22
Le confinement me permet de redécouvrir de vieux flacons oubliés, rangés tout en bas, au fond de mon armoire. Hier soir, je retrouve, bien cachée dans l’obscurité, la petite boule noire et dorée d’Arpège, achetée il y a plus de dix ans...
OMG, comment ai-je pu négliger cette merveille ! Peut-être le trouvais-je à l’époque trop puissant, trop compact ? Plus familier aujourd’hui des grands féminins aux notes de tête tonitruantes, celles qui font un peu peur aux hommes ;-), de parfums tels que Bandit, Fracas, Habanita, Calèche, Paloma Picasso, Gold pour femme d’Amouage, Coco, les Lauder etc., plus familier donc de ces chefs-d’œuvre, j’abordais hier mon vieux Lanvin avec un nez nouveau. Après les aldéhydes du départ s’épanouit rapidement le plus magnifique des bouquets floraux (rose, jasmin, ylang-ylang, iris...), vraiment somptueux, beau à pleurer. Le fond à lui tout seul mériterait l’appellation de chef-d’œuvre, paradoxalement aussi distingué que sensuel. Mon parfum s’est-il bonifié avec le temps ? je n’ai jamais trouvé cet Arpège plus crémeux, moins hautain et d’une élégance plus abordable. Rebecca Veuillet-Gallot le qualifie de " pendant nocturne, hivernal, du N° 5". Bien vu : c’est ce côté sombre d’Arpège qui me fascine et m’enchante. Aussi je m’approprie sans complexe ce grand féminin, mais rien qu’à la maison...
par Absinthe, le 9 mars 2019 à 20:20
Somptueux, je crois que c’est le qualificatif qui lui convient le mieux.
Je l’avais senti il y a très longtemps, via un échantillon qui devait être périmé, et n’y étais pas retournée depuis. Mais en parcourant le site, en cherchant au hasard des grands classiques quel parfum pourrait remplacer mon fidèle Poison (que j’aime toujours mais qui m’incommode, trop de souvenirs plus ou moins bons liés à cette fragrance), je suis tombée sur Arpège et en vous lisant, je me suis dit "là, c’est lui, ne cherche pas plus loin."
Je l’ai donc commandé à l’aveugle - 100 ml, folle que je suis - toute fébrile en attendant le facteur, ravie qu’il arrive pile le jour de mon anniversaire, et après avoir religieusement débarrassé la boite noir et or de son cellophane crissant, sorti ce magnifique flacon, ôté le luxueux bouchon doré, je m’en suis timidement vaporisé la nuque et le cou. Et là... ah mon dieu. Somptueux, c’est le premier mot qui m’est venu à l’esprit. Riche, opulent, d’une élégance, d’une beauté presque douloureuse. Quand et comment porter un tel parfum ? Non, je ne suis pas digne. Et puis au fil des heures, il évolue vers des notes plus intimistes, crémeuses et sensuelles, d’une incroyable féminité, qui finissent par le rendre un peu plus accessible, un peu moins altier.
Arpège m’a bouleversée comme l’avait fait le N°5 quand je l’ai senti pour la première fois, à l’âge de 16 ans. Je me souviens avoir pensé "mais comment est-il possible de créer de telles merveilles ??", moi qui ne connaissait que l’eau de cologne et les Eaux Jeunes. Je ressens la même chose avec Arpège : il est presque trop beau pour être vrai, d’ailleurs je n’ose même pas imaginer ce qu’était la version non retouchée ; je crois que je n’oserais jamais le porter.
Donc un grand merci à AuParfum et aux perfumistas, grâce à vous je viens de trouver mon nouveau Graal.
Et comme dirait Jicky : "vive l’odorat !"
par S9, le 9 février 2019 à 08:00
Une anecdote concernant Arpège que Simone Veil a racontée dans son autobiographie "Une vie" en 2009 (je ne l’ai pas encore lue, mais cette anecdote est extraite d’un long article ) : en 1944, Simone est arrêtée par la Gestapo comme le reste de sa famille ; direction le camp d’Auschwitz-Birkenau, après un voyage infernal dans un wagon à bestiaux, avec sa mère et sa soeur. Elle a 16 ans ...odeur épouvantable au coeur de la nuit, les gardiens qui hurlent, les femmes qui sont dépouillées de leurs affaires. Une amie avait dans son sac un flacon d’Arpège. Pour ne pas l’abandonner, les adolescentes s’aspergent jusqu’à la dernière goutte. En souvenir, Simone Veil gardera toute sa vie dans sa salle de bain, comme un talisman, un flacon d’Arpège. Cette même nuit ces femmes seront tatouées à la chaîne sur le bras gauche.
Un peu plus loin on apprend qu’elle appréciait Must de Cartier. Son parfum signature ?
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par Duolog, le 9 février 2019 à 10:37
Quelques gouttes de frivolité salvatrice au cœur de l’enfer... Merci pour ce partage.
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par S9, le 9 février 2019 à 18:46
C’est exactement ça Duolog : un peu de beauté dans un monde déshumanisé.
Le plaisir du parfumage dans l’horreur de ces lieux.
par Nez inexpert, le 10 février 2019 à 19:51
Je crois que son prénom s’écrit "Simome".
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par S9, le 11 février 2019 à 07:28
Vous me faîtes rire Nez Inexpert !
Eh oui, je pense qu’elle était 100% naturelle. Pas de -one de synthèse chez elle ^^
Quand j’étais enfant je la trouvais "vieille mamie au chignon" , bref pas terrible, alors c’était une très belle femme.
C’est d’ailleurs sa beauté qui l’a sauvée dans les camps. Une matrone polonaise lui ayant dit qu’elle était trop jolie pour effectuer certaines tâches ingrates, elle a été déplacée dans une autre structure.
par Fanny9, le 5 janvier 2019 à 16:08
Bonsoir,
J’ai à nouveau testé ce parfum et sur moi, c’est terrible : il me donne la nausée. Il s’installe sur ma peau, se place et là j’ai mal au cœur. Quand je pose mon nez dessus, j’adore ses notes, il est très plaisant mais le sillage me semble n’être fait que d’ylang ylang sur moi. Je pense que c’est cette note qui ressort sur moi. Puis au bout de 3h environ, plus rien, le parfum a disparu, tout rabougri. Cela fait la même chose sur certains d’entre vous ?
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par DOMfromBE, le 5 janvier 2019 à 16:44
Bonjour,
Chez une de mes collègues, Arpège est vraiment très agréable : un bouquet fleuri et savonneux, assez présent, qui me rappelle mon enfance, quand les savons Camay étaient prisés (et leur parfum était un dérivé d’Arpège, rançon de la gloire).
J’ai retrouvé cet effet avec Héliotrope de Molinard, un autre flashback dans une salle de bain aux accessoires oranges.
;-)
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par Fanny9, le 6 janvier 2019 à 01:07
Je ne connais pas ce parfum de Molinard. N’est il pas un peu monotone du coup ?
Mais si je le trouve je le sentirai ! Merci :)
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par DOMfromBE, le 6 janvier 2019 à 10:00
Bonjour,
Monotone, c’est une affaire de goût. De nombreux parfums de niche ne sont que des mélanges de quelques bases et de beaucoup beaucoup de bavardages.
Héliotrope est un très beau parfum fleuri, radicalement féminin pour mes narines, un beau bouquet propre.
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par Fanny9, le 6 janvier 2019 à 11:07
D’accord, trop drôle ! Tant que le bavardage n’a pas trop vent d’ylang, ça me va ;)
J’y jetterai une narine alors ! Merci beaucoup d’avoir pris le temps de me répondre. Que de choses à découvrir quand on vous lit tous. On a juste envie de tout sentir.
par Beer luc, le 5 janvier 2019 à 17:10
Bonsoir,j’ai acheté ce parfum pour ma collection,au vu de son aura auprès des réactions,mais comme ce sont les aldéhydes qui le composent le plus,ensuite viennent l’ylang-ylang,le jasmin et d’autres matières par la suite,l’ensemble me parait également un peu léger.
Le résultat d’une reformulation s’en est faite sentir ( au sens propre comme au figuré ).
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par Anna, le 5 janvier 2019 à 21:08
Bonsoir,
peut être je peux vous aider. Mon flacon de edp date de fevrier 2015.
Quand je le porte j’ai impression d’être assis dans un gateau d’anniversaire rempli de la crème au beurre. Il est si épais que le sillage me semble opaque. Le bouquet floral aldehydé dans lequel ylang clairement domine est assis sur un lit interminable de santal vanillé. J’ai sente aussi le coriandre et une petite touche de noix de coco. Texture est presque grasse, quelque part entre le velour, daim et de la fourrure. Les testeurs torturés dans le parfumeries me semblent avoir du cuir dans le fond. Tenue est de 10-12 h sans aucun problème, sur les vetements, qui sait ?
Le seuls qui peuvent s’approcher au niveau de consistence parmis des aldéhydés historiques sont First de Van Cleef & Arpels et Gold d’ Amouage. Tous les autres que j’ai eu plaisir d’essayer sont plus transparents.
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par Fanny9, le 6 janvier 2019 à 01:02
Vous sentez bien l’ylang aussi alors ? Par contre moi le reste est peu présent sur ma peau. Sur les vêtements, je vais tenter. Merci Anna pour l’idée de First. Je me rappelle vaguement sa senteur et dans mes souvenirs c’est proche de Arpège, peut être un peu plus sucré, mais plus certaine, ça date ! Je penserai à lui rendre visite ;). En espérant que l’ylang soit moins présent. Il faut que je me méfie des parfums avec de l’ylang moi....
par Iridescente, le 7 janvier 2019 à 02:12
Pour moi, à peu près la même chose, à ceci près qu’il me colle mal... au nez !
Je commence à me soupçonner incapable de percevoir pleinement les aldéhydes parce que chaque fois qu’ils occupent le devant de la scène dans un parfum j’ai aussitôt l’impression qu’on vient de me passer les sinus au papier de verre. Ou qu’un sadique particulièrement obsessionnel vient de me souffler des grains de sable en pleine figure après les avoir soigneusement passés à la laque pour cheveux.
Sur le papier, Arpège est fait pour moi, et de fait, s’il n’y avait pas cette tête d’oubli de fer à repasser sur un col raidi à l’amidon, il me rendrait très heureuse... Je le porte parfois, quand je suis toute de noir vêtue, et je passe ma journée à me sniffer d’un air assez dépité chaque fois qu’une vapeur florale monte de mes vêtements. Au bout d’un moment, le cinglé du bac à sable a rangé sa pelle et son seau, mais ça pique encore un peu, quand même.
par Chanel_5, le 22 novembre 2018 à 16:57
Très beau floral aldéhydé, il me fait penser au n°5, je le préfère même un peu, le santal et la pêche apportent quelque chose en plus. Je suis contre l’idée qu’il y ait des parfums de "vieille", l’élégance n’a pas d’âge.
par cabochabanita, le 13 novembre 2017 à 10:16
Habanita j’ai également beaucoup de mal avec ce concept de "tu sens la vieille" assez récurent. À chaque fois ça me fait bondir ! Généralement pour ma part c’est suivi d’un "mais ça te va bien" (merci...?)
Pourtant avec un peu de temps ces mêmes personnes finissent souvent par être séduites. C’est attristant..
par cabochabanita, le 12 novembre 2017 à 16:32
Je me pose des questions ; Arpège a totalement disparu de toutes les parfumeries où j’ai mis les pieds récemment. N’est-ce que dans ma petite ville de province ou bien y a-t-il anguille sous roche ?
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par DOMfromBE, le 12 novembre 2017 à 16:41
Bonsoir,
Dans les parfumeries généralistes, les références et les marques perdent leur métrage de linéaire si elles n’ont pas une rotation minimale, et donc un seuil de rentabilité.
La politique actuelle en vigueur est de vendre vite et beaucoup, dès lors un parfum comme Arpège n’intéresse quasiment plus. A part quelques fidèles, qui s’en soucie ? Je ne cautionne pas cette attitude, mais vous trouverez plus facilement ce genre de parfum en ligne dans un moyen terme. Ensuite, les fabricants pourront en justifier l’arrêt total.
La parfumerie a été un art.
C’est juste un business.
Il vaut mieux ne pas être sentimental ni nostalgique... Et être capable de tourner la page.
De nombreuses marques françaises qui ont marqué l’histoire repositionnent leurs activités. Chanel a bien défiguré son N°5, alors les autres...
par Habanita, le 12 novembre 2017 à 19:04
Bonsoir Cabochabanita,
Je vis dans une petite ville de province aussi, pour le moment Arpège est toujours vendu sauf que parfois il faut le demander (il est dans un tiroir hors de la vue du public...)
Je l’ai porté la semaine dernière et une collègue passionnée de parfums (sucrés) a trouvé que mon parfum sentait la vieille ! Dans la mesure où elle aime la Petite robe noire, j’ai pris sa remarque pour un compliment. Je préfère sentir la vieille poule de luxe plutôt que la strip-teaseuse cheap :))
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par DOMfromBE, le 12 novembre 2017 à 19:21
Bien dit !
;-)
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par Anna, le 12 novembre 2017 à 23:30
Un compliment, c’est clair.
On ne veut pas être complimenté par n’importe qui non plus ;-)
Ma pharmacienne complimente régulièrement mes parfums, elle a une faiblesse pour des aldéhydes et la mousse de chêne, de l’age de ma mère, mais une femme que j’apprécie. Et j’ai contaminé une autre avec l’Heure Bleue et Apres l’Ondée, elle aimait particulièrement l’odeur d’une crème Nuxe... Si la personne qui montre l’intérêt pour une odeur particulière (au la parfumerie en général) et si elle a suffisamment d’ouverture d’esprit, il n’est pas difficile la pousser de, hm, coté obscur de la force. Oh, zut, je voulais dire coté obscure des étagères en parfumeries.
par cabochabanita, le 13 novembre 2017 à 10:01
Merci pour vos réponses qui ne me rassurent que très moyennement sur l’avenir d’Arpège...
par Adina76, le 8 février 2017 à 14:37
Excusez-moi Tamanoir malicieux. Le correcteur automatique me joue des tours et j’ai écorché votre pseudo.
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"Arpège" extrait (vieux flacon à spray)
Ce parfum cache bien son jeu, derrière son départ au jasmin doux et vieillot. On le destinerait bien aux jeunes mamans sages à serre-têtes. Ce serait alors le cliché du cadeau facile, le même sous le sapin tous les ans.
Or, pas du tout. Une fois dissipé le classicisme du tout début, "Arpège" est une immense caresse olfactive envoyée à tous les gens de la pièce, sourire en prime. Il est très plaisant, très diffusif, et très rémanant. Il serait intrusif si son jasmin et son fond santalé n’étaient pas si agréables. Arpège est une étole en cachemire, et un masque de velours noir, qui tour-à-tour dissimulent et révèlent une personnalité eudémonique.
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par Petrichor, le 27 février 2024 à 16:15
Le début "d’Arpège" en extrait est une illusion. On dirait un jasmin à l’intensité modérée, au classicisme vieillot, et qui ne fera que perdre en puissance avec le temps. Je commence donc sur le cliché négatif, et faux, qu’on connaît d’Arpège.
1° Un parfum un peu vieillot, démodé, en raison son bouquet floral abstrait, savonneux, et sa pointe de mousse de chêne à l’odeur d’encre. Il y a aussi ces petites odeurs de renfermé, de part les petites notes sales qui servent de contraste au jasmin.
2° Un extrait qu’on trouvait pour pas cher d’occasion. Beaucoup des flacons anciens, notamment des flacons rectangulaires, ont un "Arpège" mal conservé. Ces flacons mal conservés alimentent le mythe "d’Arpège" comme étant un parfum confus, voire fouillis, voire fourre-tout. (J’ai plusieurs de ces flacons. Je percevais en tête une note d’orange cuite, résineuse et aldéhydée, des odeurs de sueur d’aisselle au lieu d’un bon santal, et la tonalité un peu "soupe" commune aux parfums trop ancien, quand le temps les a trop destructurés et réduits à un magma ambré boisé un peu animalisé).
3° Une odeur trop sage, trop familière, l’odeur fantôme d’un proche laissée sur une écharpe, un parfum qu’on laisserait à nos aînées.
Or c’est tout l’inverse qui arrive. Passé les premières minutes, il se projette énormément. En revenant dans la pièce où j’avais laissé le carton imprégné, l’air s’était rempli de son doux accord principal au jasmin. "Arpège" y était partout comme un ami invisible : calmement souriant, plaisant, optimiste, à la fois lent et posé, et pourtant bien présent. "Arpège" a la radiance horizontale de l’aube. Ce sillage, qui arrive après, suffirait déjà à faire d’Arpège une belle réussite.
La perception est aussi différente à un demi-mètre. Arpège se rappelle à nous plusieurs fois par minute, les effets floraux dialogues avec les effets d’onctuosité beurrée. À cette distance, les fleurs ont des inflexions plus naturalistes. On perçoit ce qu’apporte le jasmin -et la rose- de Grasse, c’est-à-dire des effets supplémentaires de fraîcheur d’équilibre et de radiance : jasmin solaire, jasmin à la fraîcheur muguettée, pétales beurrés (ylang-ylang, iris, effet lacté), et de minuscules nuances entre le giroflée et le lys (anisées, épicées -girofle, cannelle-, vanillées).
En collant son nez ou en utilisant le carton comme un éventail, on a un autre parfum. On peut humer ce qui rapproche le parfum du champagne : des notes florales gazeuses, fusantes, et beurrées.
Les notes boisées de l’accord de fond sont en tenue de camouflage. L’accord floral donne l’impression de flotter tout seul dans les airs. On perçoit une grosse caresse de bois de santal (chaud, lacté, rosé). On goûte la tonalité d’encre de la mousse de chêne. On perçoit à peine les contours de la vanille, de l’ambre (labdanum, plutôt ciste), du vétiver, et du reste des aldéhydes savonneux qui ont survécu.
L’accord final a la douceur d’un cachemire. Il y a des petites touches de notes sales dans le fond pour que les fleurs se projettent bien par contraste. (Le jasmin naturel contient déjà en soi des facettes animales, et pas que l’indole.)
Cet extrait pourrait sortir aujourd’hui, car il reste unique, et car il a un parti-pris artistique. Il ne pas tomber dans certaines facilités :
la vanille n’est pas surdosée, l’ambre n’est pas surdosé, pas de musc blancs éternels, pas de surdose d’agrumes comme poncif au démarrage, le santal n’est pas mis en avant comme dans la mode des solinotes (une mode issue de la niche et qui a désormais 30 ans), et la qualité euphorisante du bouquet floral le rapproche du "N°5" actuel. (Il y a eu d’excellent millésime de l’extrait du "N°5" sur la dernière décennie).
Ressortir "Arpège" en extrait ? Pour InterParfum, qui détient la licence parfum Lanvin, je pense que c’est le moment idéal pour prendre ce pari . Car la mode est désormais aux parfums très chers. Les parfums très chers sont la nouvelle norme. Les marques de niche et les grandes maisons historiques rivalisent pour sortir toujours plus de créations, plus chères, plus luxueuses, plus exclusives, et qui semblent pourtant bien se vendre et emporter l’adhésion sur les réseaux sociaux. (D’habitude je déplore cette hausse de prix. L’inflation n’a aidé personne. Mais personnellement je ne suis pas la cible commerciale et je me rattrape sur le marché de l’occasion).
Pour ne rien gâcher, je pense que "Arpège" extrait est mixte, selon les codes actuels des passionné.e.s.
Pour résumer à outrance, "Arpège" extrait est un beau jasmin naturel, porté par le dialogue entre d’autres fleurs naturelles abstraites -rose, iris, ylang-ylang, extraits d’oranger-, avec des fleurs de synthèse -muguet, pêche-, et des aldéhydes un peu savonneux puis beurré, puis noix *, puis boisé lacté chaud (santal).
* (On retrouve un bout de l’effet "noix" de "Que sais-je ?" de Jean Patou.
Derrière la fausse simplicité du début "d’Arpège", l’émotion, le plaisir et le confort seront là pour 24 heures. Il cache une grande virtuosité technique sur la gestion de la diffusion et de la durée. Il mérite son statut de chef-d’œuvre.
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