Or des Indes

Certains parfums sont hors du temps, et impossibles à dater. L’Or des Indes pourrait tout aussi bien être une création des années 20, 50, voire un récent lancement d’une nouvelle marque niche. Qu’il date de la fin des années 80 ne me surprend donc pas davantage, et ce décalage par rapport à son époque le rend presque encore plus sympathique à mon nez.
J’aime les parfums chargés d’atmosphères, et la première impression qui se dégage ici est celle d’un salon de musique décoré de boiseries et de tissus sombres et épais, au parquet blond et ciré, et cette odeur si particulière de vieux piano, à la fois boisée, un peu poussiéreuse et résineuse. La professeure est bien sûr dans la pièce, elle a l’élégance pincée d’une vieille dame et porte un parfum poudré.
Si la lavande et le géranium, furtifs, apportent une touche proprette et nostalgique au départ, la suite est largement sous le signe des baumes, en particulier l’opoponax, une résine qui délivre une puissante odeur cireuse et cuirée, et que l’on retrouve par exemple dans Shalimar. L’allusion à univers Guerlinesque est par ailleurs amplifié par un nuage de poudre épicé et miellé, qui peut évoquer L’Heure bleue. Cet aspect talqué vanillé comme un talc pour bébé ou une ancienne poudre de riz rappelle également le mythique accord poudré et boisé d’Habanita qui aurait ici été débarrassé de ses notes florales et du patchouli.
Douceur cotonneuse et douillette, cet Or indien n’a rien de clinquant, il aurait plutôt le charme nostalgique et discret d’un vieux bijou désuet..