Auparfum

Qu’est-ce qu’un parfum iconique ?

par Jeanne Doré, le 4 octobre 2014

A condition de pardonner à Frédéric Malle son point de vue plutôt contestable sur les Beach Boys et les Beatles, cet article du Monde intitulé "En quête d’essences" devrait vous plaire.

On y parle de l’industrie de la parfumerie en général, de ce qu’est un parfum iconique, intemporel ou statutaire aujourd’hui. Y sont donc évoqués J’Adore, Angel, Chanel N°5, mais aussi My Burberry, La Panthère, Arpège, Elisabeth de Feydeau, Francis Kurkdjian, et Jean-Claude Ellena...

A défaut d’être alignée avec M. Malle sur la musique, je le suis parfaitement dans son constat à propos des tests consommateurs sur les parfums : « Lorsqu’on teste à l’aveugle, on n’apprécie que ce que l’on reconnaît ».

Pierre-Emmanuel Bisseuil, consultant pour Peclers Paris (agence de tendances), tient par ailleurs des propos fort justes, qu’aucun fidèle d’auparfum ne saurait renier :

« Depuis quinze ou vingt ans, on a renversé la relation entre le processus de création et le consommateur. L’histoire de la parfumerie s’est construite avec des créateurs qui avaient une vision esthétique. Aujourd’hui, on demande au client, qui n’a pas forcément une culture olfactive élaborée, de décider ce qui sera lancé sur le marché. A l’arrivée, on obtient des jus peu différents les uns des autres, qui marchent parfois deux, trois ou cinq ans, mais rarement plus.
Les cycles d’innovation de la parfumerie de luxe ont fini par se calquer sur ceux de la consommation de masse. On lance un produit, on le fait vivre quelques années, le temps de rembourser l’investissement de départ et la campagne publicitaire, puis on passe à autre chose. Avec 1 200 nouveautés par an, alors qu’on n’en comptait pas plus de 250 il y a dix ans, on est passé dans l’ère du parfum yaourt »

Et pour vous, c’est quoi un parfum iconique aujourd’hui ?

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lrisfleur

par lrisfleur, le 5 octobre 2014 à 10:52

Merci Jeanne, pour nous faire partager cet article ! Une mise au point nécessaire, mais maintenant que tout le monde partage le même constat, il faudrait peut-être arrêter ces tests de consommateurs contre-productifs.... Quant à la question des matières naturelles ici évoquée, c’est toujours la même histoire dont on a déjà beaucoup parlé sur Auparfum.
Malgré tout, l’engouement pour les marques de niche montre que le "consommateur", cet être présenté comme stupide et affamé de sucre et de patchoufruit, finit par désirer quelque chose de plus qualitatif une fois dégoûté des multiples clones qui sortent chaque année dans les Séphora.

Quant à la définition du parfum iconique...
Ce serait un parfum qui a une histoire, un passé, et qui a apporté quelque chose à la parfumerie. Un parfum d’une originalité particulière, audacieux pour son temps ou pour le contexte dans lequel il est sorti. Et puis, forcément, il n’aurait pas été tellement reformulé : un parfum iconique est celui que l’on peut reconnaître facilement parce qu’il n’a pas beaucoup changé depuis ses débuts. Par exemple, selon moi Féminité du bois est un parfum iconique car il a expérimenté pour la première les notes boisées dans un féminin (c’est donc une innovation) tout en se positionnant en best seller de la maison Lutens depuis un grand nombre d’années (même s’il ne se vend pas autant que Chanel n°5 !).

Pour finir, l’article est intéressant car il montre qu’aucun parfum n’est iconique par nature : sans un travail de promotion et de soutien, aucun parfum ne peut se maintenir tout seul à un tel rang. C’est à la fois le jus et la stratégie de la marque qui font la différence !

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par Jeanne Doré, le 5 octobre 2014 à 20:41

Merci Iris, j’aime beaucoup votre définition d’un parfum iconique !
Et je partage également votre interrogation : quand va-t-on un moyen de tester "autrement" les parfums ?....

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par Youggo, le 6 octobre 2014 à 12:47

Quand les grandes marques, labos, et distributeurs (parfois affiliés au même groupe multinational) auront autre chose en tête que la rentabilité à court terme ?

J’approuve tout à fait la définition d’Iris, notamment sur le côté novateur, avant-gardiste même, que doit avoir un parfum iconique. C’est le bouleversement, l’audace, l’innovation, la singularité, qui inscrit un parfum dans l’histoire de la parfumerie. Plus que le succès populaire.
C’est en ça que le N°5, Shalimar, Opium, M7, ou même récemment Terre d’Hermès sont des parfums iconiques. Et c’est ce qui manque à J’adore de Dior pour en devenir un. Ce parfum est certes un best-seller, mais il n’est en rien iconique, se contentant de reprendre les codes à la mode d’une époque, sans rien bouleverser... jouant même volontairement la carte du consensus. C’est un peu le Guillaume Musso de la parfumerie quoi : c’est mignon, ça plait à tout le monde, mais qu’apporte-t-il ? Et surtout qu’est-ce qu’on en retiendra ?

Il est d’ailleurs étonnant de constater que, dans l’ère de l’égo dans laquelle nous sommes, où chacun souhaite afficher son originalité sur les réseaux sociaux, où chacun revendique sa micro-seconde de célébrité (noyée dans le flux débordant d’information), dans cette ère également de la personnalisation à outrance des biens de consommation (des coques de portable au timbres poste)... la parfumerie continue à utiliser des procédés marketing qui ne produisent qu’une uniformisation des produits et des modes de consommation. C’est parfois à se demander si "l’iconique" n’est pas déjà une valeur du passé.

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par lris, le 6 octobre 2014 à 14:00

Ah Youggo, j’adore votre analyse concernant le passage de l’uniformité à une originalité toujours plus revendiquée, notamment par la démocratisation de l’accès à une pseudo-célébrité factice ! Sous cet angle, vous avez raison sur votre vision du parfum iconique comme valeur du passé et la stratégie actuelle des marques comme dépassée par rapport à l’air du temps...

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