Parfum de Peau
Montana
- Marque : Montana
- Année : 1986
- Créé par : Edouard Fléchier - Jean Guichard
- Genre : Féminin - Masculin
- Famille : Chypre
- Style : Opulent - Pointu - Sensuel
Encens Brûlant
par Thomas Dominguès (Opium), le 27 mai 2013
Parfum de Peau nous montre que, finalement, l’incohérence entre une fragrance et un parfum, donc entre le seul jus et l’objet tout entier (flacon, emballage, nom, publicité), n’est pas une mauvaise habitude si récente.
Comment a-t-on pu avoir eu l’idée d’enflaconner dans un objet aussi ludique, naïf et architecturé, une fragrance aussi bestiale ? Ce serait presque comme glisser par inadvertance un film pornographique dans un emballage de dessins animés pour enfants.
Plutôt qu’une tour graphique surréaliste translucide, une cage rouillée conviendrait bien mieux pour enfermer cette "odeur de peau" (très) sale !
Parfum de Peau nous rappelle aussi que le traitement des notes dites "animales" de manière franche et non détournée ne date pas, lui non plus, d’hier. Il fut une époque où la parfumerie grand public osait proposer des créations au parti pris aussi radical que les marques de niche actuelles les plus pointues. La "sensualité" servie telle un "Diabolo Menthe" en carafe d’eau et sirop Tesseire était encore loin.
En effet, avec son accord épicé jusqu’à l’extrême d’encens brûlé de Somalie, Parfum de Peau paraît être la belle-mère âgée autoritaire de l’Absolue pour le Soir de Francis Kurkdjian : même bestialité crue, affichée sans détours, très "franche du collier" et dévergondée. S’il s’agit d’un "parfum de peau", alors cette surface-ci n’a pas connu les ablutions d’une douche depuis des lustres !
Ce parfum est, en effet, un encens cuiré si profond et sombre, si rêche et noueux, qu’il semble ne jamais vouloir en finir de la séance SM qu’il nous inflige. Le tout est à peine assouplit par les caresses d’un bouquet floral indistinct et de muscs propres qui lessivent le reste.
Une version proche, moins radicale, est proposée par Lorenzo Villoresi : Alamut reprend les mêmes codes d’un encens épicé qui vous fait faire un tour de grand huit olfactif et presque sexuel.
Je me rappelle très bien avoir senti ce parfum de Jean Guichard (qui allait composer Loulou l’année suivante), dont la civette a nécessité qu’il soit soigneusement reformulé par Edouard Fléchier (qui avait déjà sévi, lui, avec Poison un an auparavant, donc, tiens, que du "léger") à de trop rares occasions sur quelques femmes d’un âge souvent avancé dans les années 90. (Je précise cela car je crois qu’il fallait et il faut une certaine maturité pour "oser" ce parfum-ci.). Je me disais toujours alors à peu près la même chose : "Ça sent bizarre, c’est étrange. Ça sent mauvais. Non, pas vraiment. Ça sent le "sale". Mais, ça m’attire, j’aime bien cette odeur bizarre. La personne qui porte ça doit avoir une sacrée personnalité pour oser porter un truc pareil." Cette odeur me fascinait à chaque fois, ne sachant si je l’aimais ou non. Elle paraissait souillée, mais, en même temps, dédaigneuse du qu’en dira-t-on à travers un aspect revêche qui relève la tête fièrement (probablement grâce à sa structure boisée plus râpeuse).
A la manière dont on repasse de manière compulsive sa langue entre sa gencive et une dent de lait qui s’apprête à tomber lorsque l’on est enfant (attiré et rebuté par cette sensation), j’aimais être "confronté" à Parfum de Peau.
Il n’est pas vraiment étonnant que, des années plus tard, Muscs Koublaï Khän et ses félins en cage, dans un registre plus proprement animal, soit devenu un autre objet de fascination pour moi.
Si cette création des années 80 pour Montana a perdu en complexité avec le temps (et sa/ses reformulation(s)), à côté de toutes les réalisations chétives et rabougries qui trônent plus fièrement dans les linéaires aujourd’hui, ce parfum de peau, écorchée vive, reste une claque, ou un coup de cravache, dont on peut avoir un peu de mal à se remettre. Avec son encens tribal et primaire, Parfum de Peau fascine et dérange en nous ramenant frontalement aux sources du parfum en même temps qu’à nos instincts primitifs.
Fortement déconseillé aux âmes sensibles.
par Opium, le 27 mai 2013 à 21:39
Bonsoir à toutes et à tous.
Un bref message juste pour dire à quel point ce parfum est déstabilisant pour moi, et, à quel point il "a de la gueule", à défaut de pouvoir le qualifier de "magnifique".
Pour le porter, "il faut en avoir"... ^^
Il est assez hallucinant que ce "Parfum de Peau" soit sorti en parfumerie Grand Public, même dans un passé où on innovait et prenait bien plus de risques.
Je dédie cet article a un habitué ici qui a pris son envol sur un site que je vous invite à consulter pour sa passion et ses coups de clavier : http://musquemoi.blogspot.fr/
Je le dédie donc à Patrice à qui je jais un clin d’œil, et à sa maman, dont le parfum concerné a été la signature durant des années et qui est, peut-être, responsable d’une partie de la passion de son fiston pour les plantes, les parfums et les odeurs.
[Moment "Emotion" terminé... ^^] (Mais, le parfum, ce doit être plus que de simples odeurs ; mais, aussi, des interprétations et les émotions que ces accords et odeurs déclenchent !)
Bonne soirée à toutes et à tous sur auparfum. ;-)
Opium
PS : Et, une note maximale pour ce parfum hyper culotté et totalement déculotté ! ^^
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par Patrice, le 27 mai 2013 à 21:48
Rhooooooooooo... je suis très touché !
*larme à l’oeil*
Oui, ce fut le parfum de ma mère pendant une époque, puis elle est passée à autre chose (Miss Dior, ce n’est pas non plus l’horreur !). J’ai un peu été déçu qu’elle change, mais j’ai conservé le flacon, où il reste un mini-fond que je sens de temps en temps.
Je suis allé le sentir en parfumerie, et il a bien changé. Il semble avoir été dilué dans de la flotte. Dommage ! Mais je suis très content de te l’avoir fait REdécouvrir, tout comme son demi-frère Alamut (à privilégier, face à la version actuelle de Parfum de Peau).
J’ai d’ailleurs réussi à dénicher un flacon ancien que je garde jalousement dans un coin.
Je ne pourrais pas parler de ce parfum de façon objective et sincère. Je ne pourrait même pas poser des mots qui puissent vous parler, je pense, tant il m’est personnel. C’est la force qu’ont certains parfums sur nous.
Encore un énorme merci Opium !!!
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par Opium, le 29 mai 2013 à 21:42
Bonsoir Patrice.
Avec plaisir ! ;-)
Merci à toi de m’avoir fait re-découvrir ce parfum que j’avais oublié ou presque.
Ce qui est dingue, c’est toujours la différence de comparaison entre celles et ceux qui ont connu un objet dans le passé et celles et ceux qui le découvrent.
A quelqu’un qui découvrira(it) Parfum de Peau actuellement, il semblera probablement fascinant, culotté, osé, voire imbitable. A toi qui l’a connu, il paraît simplifié, délavé - rincé - essoré.
Ton dernier paragraphe est touchant. *regarde pensivement au loin* ;-)
Un grand merci encore à toi (et, indirectement, à ta maman qui a eu le panache (peut-être sans le savoir d’ailleurs...) de porter ce parfum-ci).
A très vite. ;-)
Excellente soirée.
Opium
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par Patrice, le 29 mai 2013 à 21:55
"Je ne pourrais" bien sûr, au lieu de "pourrait" !!! Sans faute c’est mieux. Il y en a surement d’autres, mais celle ci arrache les yeux !
Je l’ai justement porté hier. Je me suis dit "est ce que je le supporterai ?", "est ce qu’il ne me rappellera pas trop de souvenirs au point de devenir insupportable ?".
Finalement : super !
Sillage de dingue, je me sentais énormément... un vrai parfum type "JE SUIS LAAAAAAAAAAAAAAA VOUS ME VOYEZZZZZZZZZZ" des années 80 et très bien fait en dehors de ça, tout comme on les aime.
Contrairement à d’autres parfums actuels qui jouent aussi sur le "vous me sentez bien là ?" et qui sont juste immondes ! Oui LVEB et OneM, c’est de vous que j’parle !
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par Opium, le 29 mai 2013 à 22:46
Re-Bonsoir Patrice.
Les phôttes, on s’en... "cogne"... Même si elles rayent la rétine. ^^
Content que tes retrouvailles avec Parfum de Peau se soient bien passées, sans trop de pollutions par les réminiscences passées.
Et, tu le sais, moi "z’ossi" je préfère très largement les parfums "Regarde-moi ! Sens-moi ! Remarque-moi ! Youhouuuh, je suis là !" des années 80 aux mêmes bavards actuels, mais qui n’ont rien à raconter d’intéressant si ce n’est leur propre vacuité qu’ils nous infligent haut et (trop) fort ! ^^
Bonne soirée encore.
Opium
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