Orage
Louis Vuitton
- Marque : Louis Vuitton
- Année : 2018
- Créé par : Jacques Cavallier-Belletrud
- Genre : Masculin
- Famille : Boisée
- Style : Discret - Élégant - Frais
Eau d’orage fraîche
par Samuel Douillet, le 8 juin 2018
En 2016, Louis Vuitton dévoilait au public sa très attendue collection de sept parfums. Présentés comme féminins, ils reprenaient plusieurs grands thèmes de la parfumerie (le cuir avec Dans la peau, les fleurs blanches dans Turbulences, la rose dans Rose des vents, Contre moi pour la vanille etc.), interprétés par Jacques Cavallier Belletrud, bombardé in-house perfumer en 2012 (d’où l’attente !)
Ces sept créations ont été affublées début 2018 d’une petite sœur, Le Jour se lève, puis juste avant l’été, d’une entière collection de cinq parfums, masculins cette fois. Si ces derniers, comme leurs aînées, écrivent chacun sur un sujet olfactif (la cologne verte et fugace, la fougère commerciale, l’oud lorgnant vers le Golfe, etc.), approchons furtivement notre nez d’Orage, celui qui me semble être le plus intéressant de la fratrie.
On pourrait résumer Orage comme un boisé moderne assez propre sur lui. L’ouverture est vive, franche et nette comme seules les belles colognes savent l’être. Une bergamote juteuse nous renvoie illico vers l’Eau d’orange verte d’un autre artisan du cuir, Hermès, dont on retrouve la belle et énergique amertume. Ce départ cologne paraissait très fugace sur touche mais se déploie bien à même la peau. Rapidement, une note bien identifiable de patchouli s’invite dans la danse, et entame un pas de deux avec les agrumes, avant de progressivement rester -presque- seule sur la piste.
Le patchouli est rejoint par un cousin, le Cashmeran, une matière synthétique à l’odeur boisée de terre humide, voire de moisissure. C’est là le cœur, et à la fois le fond, de cet Orage, la structure reposant en deux temps et non en trois (tête/cœur/fond académiques) ; et de l’avis du parfumeur lui-même, il s’agit de la formule la plus courte qu’il ait jamais écrite. Consolidée par un vétiver, l’assise boisée présente ainsi plusieurs facettes qui se complètent, partageant l’aspect commun d’humidité et de froid en se donnant le mot l’une à l’autre. A certains moments, on croit entendre murmurer le souvenir de Peau d’ailleurs de Starck qui partage le même effet de bois minéral, terreux et mouillé. L’iris, en filigrane, fait office d’entremetteur entre les différentes facettes terreuses et moussues.
Si je me représente davantage le soupir de la nature après la pluie, plutôt qu’un déchaînement des éléments auquel son nom semblait inviter, il est intéressant de mentionner que Jacques Cavallier Belletrud fut parmi les premiers à mettre en avant les notes marines et ozoniques dans la parfumerie, avec la paternité d’œuvres telles que L’Eau d’Issey (féminine et masculine), ou la série des Aqua pour Homme de Bvlgari, Ici le « mouillé » n’est pas aquatique mais il est évoqué indirectement, à la manière d’un gros nuage chargé d’eau. Et l’association iris-humidité-terre ne manque pas de rappeler, en tout cas sur le papier, la brume argentée de Serge Lutens.
On pourra reprocher à Orage son côté linéaire, manquant un peu de surprise et de spontanéité, mais Louis Vuitton accouche là d’un parfum moderne “qui sent bon”, à la structure cohérente, et adapté - n’en déplaise à son bulletin météo identitaire - à toutes les saisons.
210 euros/100ml ou travel spray 4 x 7,5ml
115 euros/ recharge 4 x 7,5ml
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par jerryb, le 11 juin 2018 à 07:46
Véritable coup de cœur pour Méchant Loup également habitué à traversée des forêts humides. Il me rappelle Voleur de Roses, qui aurait gommé ses facettes un peu dures. Orage est pétillant sur le départ, ce qui le rend très vif et lumineux, puis il se fond dans un beau patchouli terreux. Mais grâce au vétiver qui les booste et au cashmeran qui les tient, les agrumes perdurent et l’iris se dessine en filigrane pour la noblesse du propos. Parfait d’équilibre, juste dans ses notes, je suis d’accord, Orage n’est pas celui qui gronde, mais ce qui reste dans la nature après son passage. J’aime, ainsi que Sur la Route, lui aussi d’un très bel équilibre.
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par ghost7sam, le 11 juin 2018 à 21:13
Bonsoir Thierry, je ne suis pas étonné de lire votre commentaire : quelques jours après avoir terminé ce texte, je lisai votre version sur olfactorum !
Cela nous ramène quelques années en arrière, lorsque les blogueurs parfums faisaient des critiques croisées à l’aveugle (Grain de Musc, Musque Moi, Poivre Bleu et Dr Jicky & Mr Phoebus s’y sont souvent prêté).
Et c’est donc drôle que nous ayons les mêmes sensations sur Orage. J’ai découvert Voleur de Roses une seule fois et il y a bien longtemps alors je n’en aucun souvenir, mis à part que l’accord rose/patchouli était assez net et structurait un chypre moderne et androgyne. Voilà une raison de remettre le nez dessus.
Pour revenir au Louis Vuitton, je pourrais ajouter que je le classerais un peu dans la même catégorie que Terre d’Hermès. Non pas olfactivement mais symboliquement : un boisé froid voire minéral. Certes ce dernier est tout de même plus chaud/ocre avec son poivre, mais on reste sur quelque chose de relativement propre et bien élevé.
merci pour votre intervention !
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peace
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