Laine de Verre

Après L’Eau et l’Eau Froide, voici Laine de Verre, dont le nom s’inscrit plutôt dans la lignée des dernières créations de la maison que sont La Fille de Berlin et La Vierge de Fer.

Encore une fois, le métal et le froid semblent avoir inspiré Serge Lutens. Laine de Verre, c’est tout d’abord une explosion d’aldéhydes comme j’en ai rarement senti, et cette entrée en matière est assez jouissive, tant ces notes se font rares dans les créations actuelles. Mais rapidement, ces aldéhydes, orangés et métalliques, sont rejoints par des notes ozoniques puissantes et déstabilisantes qui évoquent les fameuses Sécrétions magnifiques. Un souffle de menthe participe à cet effet de tempête polaire. C’est alors que l’on s’aperçoit qu’une petite rose, timide, a réussi à survivre malgré ce froid sibérien. Mais ce vent glacial venu du nord a givré la fleur, qui est devenue épineuse et tranchante comme une lame en acier. Un imprudent s’y est coupé le doigt et les gouttes de sang tachent ce manteau neigeux d’une blancheur immaculée.

La profusion de muscs blancs annonce la fin des hostilités de dame nature et adoucit cette Laine de Verre qui marche alors sur le fil du rasoir tandis que le cashmeran, qui se devine ici plus qu’il ne se sent vraiment, permet au parfum de ne pas basculer totalement dans le bidon de lessive.

Tout comme le matériau dont il tire son nom, Laine de Verre est un parfum inconfortable, qui met mal à l’aise. En apparence très radical, c’est en fait une création ambivalente, mi ange mi démon, qui joue à la fois la carte de la pureté et de l’obscénité, tour à tour aérienne, propre, métallique et sanguinolente, mais toujours dérangeante et effrayante. Brrrr...