Gucci by Gucci

Je tiens à vous prévenir dès maintenant, il sera autant question dans cette critique de spot publicitaire que de parfum concernant le dernier Gucci by Gucci.
Ce chypre fruité, qui annonçait des notes de goyave, de framboise et de poire, des fleurs de tiaré, du miel, du patchouli et du musc ressemble effectivement au mélange de tous ces ingrédients, sans trop de surprise supplémentaire. Ce “nouveau chypre”, comme il a été décrit de manière très originale dans la presse, comporte toutefois la particularité de se faire très discret après la disparition des notes fruitées fanfaronnant en tête. J’hésite entre manque de tenue ou subtilité, toujours est-il qu’il ne reste sur la peau qu’un accord de bois sec, d’ambre et de patchouli, plutôt élégant mais assez frêle, presque imperceptible, du moins sur moi, ce qui peut tout autant être apprécié que reproché. Globalement, difficile d’avoir un avis tranché, et s’il me déplaît de loin moins que la plupart de ses prédécesseurs “chyprés modernes”, je me dis qu’il ne plaira peut-être pas aux amatrices du genre qui le trouveront trop discret. A l’inverse, les amateurs de parfums rares et subtils se laisseront-ils séduire par un accord si attendu ?

En revanche, le spot publicitaire réalisé par David Lynch ne peut laisser sans avis, et on n’y trouve pas forcément ce à quoi on s’attendait.

On est bien l’univers classique Lynchien : décor sombre années 30, éclairs, superposition et fondu d’images, plans de villes aériens et nocturnes, ajouts de sons inquiétants dans la bande-son, mais il semblerait que le maître n’ait pas eu le choix de tous les paramètres.
De grandes gigues gauches et l’air affligé ondulent leur corps au son du mythique Heart of Glass de la chanteuse disco culte Blondie, entrecoupé d’éclairs et de tonnerre. En les voyant ainsi agiter leur bras maladroitement, on se demande vraiment si ces filles ont déjà ressenti du plaisir à danser, ou si Lynch leur a demandé de faire exprès de ressembler à des caricatures de top models, anorexiques et déprimées, par volonté d’être second degré ? Le choix de la musique, festive et légère, et que je considère pourtant être un hit fabuleux, me paraît toutefois en décalage avec l’univers retro-chic de la marque, et encore plus avec celui du cinéaste, d’habitude à la limite de l’angoisse et du fantastique, et qui semble ici avoir bien été édulcoré par l’agence de pub.
Finalement, David Lynch fait comme tous les artistes, il exécute des films publicitaires pour pouvoir être (bien) payé par une industrie qui en a les moyens, afin de se permettre à côté de poursuivre un cinéma d’auteur plus personnel et moins rémunérateur. Espérons au moins qu’il aura bien rigolé en demandant aux modèles (certainement imposées par la marque) de se dandiner ainsi de manière aussi peu naturelle et spontanée.