Étreintes amoureuses, éclats de vie et matières précieuses : La revue de sorties parfums #15

Les jours se réchauffent et la saison des amours bat son plein, inspirant les nouveaux lancements qui célèbrent les corps enlacés, les paysages ensoleillés et leurs matières préférées. Et pour initier notre périple, partons d’abord en Italie, symbole de la dolce vita.

Comme le laisse deviner son nom évocateur, Hedonik, la nouvelle marque de Francesca Bianchi, déjà fondatrice de celle qui porte son nom, ne cache pas son jeu et propose différents « objets de plaisir » en cuir. C’est aussi cette matière qui est au cœur du parfum Divine perversion, habillée de caramel, d’ambre, de framboise, et de notes animales, « qui apportent une intensité, une sensation d’humanité et de carnalité, qui rend le parfum irrésistiblement sensuel ». Une violette cuirée, fruitée et charnue, légèrement cosmétique, fidèle à la signature de la parfumeuse.
Extrait de parfum 168 euros/50 ml

Avec Encore du temps, Giuseppe Imprezzabile célèbre lui aussi, pour sa marque Meo Fusciuni, l’union des êtres, mais sentimentale plus que physique. Il nous parle de « l’amour intemporel qui relie deux personnes » et dont il a pris conscience lors d’un voyage au Laos. Le parfumeur signe une création autour du thé, rejoint par la bergamote, la mandarine, l’osmanthus, le champaca, le magnolia, le maté, le benjoin et le santal. Il capture ainsi « certains moments de la vie, qui sont comme un lent film en noir et blanc » à travers ce bouquet blanc printanier.
Extrait 210 euros/100 ml

Arquiste met en flacon une autre étreinte, celle de l’empereur romain Hadrien et d’Antinoüs, son amant perdu, qu’il a commémoré par de nombreuses sculptures. Pour suggérer « l’intimité et la proximité », Rodrigo Flores-Roux chez Givaudan a composé un « parfum doux, salin et musqué » nommé Peau, employant ambre gris, « accord de musc pur », sauge sclarée, poivre blanc d’Inde, dérivés de labdanum et de bois d’okoumé du Gabon. Les bois ambrés sont aussi de la partie, reflétant il est vrai de nos jours bon nombre d’odeurs de peau...
Eau de parfum 170 euros/100 ml

L’Antiquité romaine et sa langue ont également inspiré les noms des trois nouveautés qui constituent la collection « Fragments By NVC » de Neela Vermeire. Développées en amont et pendant la pandémie, elles dessinent des éclats de vie, à travers des couleurs et des évocations diverses. Nemus, avec ses agrumes, notes de thé, sauge, gingembre, ambre gris, encens, oud et patchouli, est associé à la régénération, symbolisée par la nuance verte. Purpureum, qui désigne en latin la teinte pourpre, réveille la « chaleur mystique » en mariant le poivre et l’immortelle à la figue, au magnolia, au rhum, au café, au cacao, au tabac, à la fève tonka, au labdanum, à la myrrhe et au cuir. Thyina enfin, construit autour du santal, est associé aux tons beiges et au confort. Le bois lacté est complété de piment, de lavande, de violette, de noisette, de café, de baume Tolu, d’amyris, de styrax et de bouleau. Un triptyque qui semble s’orienter davantage vers une cible unisexe, s’éloignant des grands thèmes floraux plus féminins de la maison (même si bien sûr les parfums n’ont pas de sexe !).
Extrait 160 euros/50 ml

Référence antique toujours avec Enby, incarnant l’être qui « nargue Œdipe autant qu’Electre » et lancé par la récente marque de prêt-à-porter mixte Genderfluid de l’artiste Soull, qui a fait appel à sa mère, la parfumeuse Majda Bekkali, pour créer trois fragrances unisexes. La première est décrite comme « une composition transparente et réconfortante qui invite à la rêverie vagabonde », avec des notes de fleurs blanches, de miel, de foin et de cuir. Lovely Queer quant à lui nous invite au carnaval de Rio, dans un esprit festif traduit par « l’effet gustatif et épicurien immédiat » du rhum, qui dévoile les fleurs de frangipanier et d’ylang, sur un fond de cuir et de patchouli. Dans IEL enfin, le « flot de vie ininterrompu » qui nous habite est illustré par des « notes pétillantes et juteuses de la mandarine rouge », complétées de baie roses, fleur d’hibiscus, et d’un fond baumé et ambré, pour peindre les contours d’une vie à Montmartre, dans un « petit hôtel particulier couvert de vigne vierge ». Ce dernier (le seul que nous avons reçu) est un musc poudré vanillé rafraîchi de quelques agrumes, évoquant une guimauve.
Eaux de parfum 95 euros/50 ml

Restons en France mais quittons sa capitale pour rejoindre le sud avec la nouvelle déclinaison d’Herbae de L’Occitane, qui met à l’honneur la sauge sclarée provençale dont elle contient un extrait local, dans une édition limitée. Poursuivant l’exploration des herbes folles, la plante aromatique est ici entourée de « détonants accords de ronce, rose sauvage et ortie blanche », pour former un floral fruité mignon, mais sans grande surprise.
Eau de toilette 60 euros/50 ml

Toujours en Provence, à Grasse, c’est la rose centifolia qui est célébrée par Dior. La marque propose en effet son premier « parfum millésimé Miss Dior, fruit des récoltes 2021 de roses de mai du Domaine de Manon ». Avec Miss Dior Rose Essence, François Demachy célèbre « toute la félicité d’un champ printanier » à travers « la rencontre entre une saisissante fraîcheur florale et une sensualité de notes boisées de vétiver, de patchouli et de gaïac, habillées de muscs confortables ». Les pétales de rose sont palpables, délicats et plutôt épurés, sans sucre ni lourdeur.
Eau de toilette 170 euros/100 ml

Les roses illuminent également la déclinaison Éclat de l’eau de parfum Brioni. Michel Almairac a retravaillé sa création de 2021 en s’inspirant « d’une journée enchantée » où l’on perçoit « simultanément la fraîcheur du petit matin et la douceur rassurante de la tombée de la nuit ». Cette « note florale inattendue » est complétée de pamplemousse, d’encens et de santal pour une fragrance « à la fois intemporelle et contemporaine ». Très différente du premier parfum de la marque, plutôt orienté masculin, cette rose chyprée se révèle plus féminine et d’un classicisme raffiné.
Eau de parfum 110 euros/ 100 ml

Traversons les continents avec Astier de Villatte, qui nous invite dans le Grand Ouest américain pour rejoindre Tucson. Entre « senteur enivrante des immortelles du maquis », « terre rouge brûlée de chaleur du bouleau » et « résine du ciste labdanum », la marque spécialisée dans la céramique nous promet pour cette eau de parfum signée Alexandra Monet un « désert torride d’une beauté sauvage », qui prolonge la lignée initiée par Sables, en plus sobre.
Eau de parfum 45 euros/10 ml, 95 euros/30 ml, 95 euros/30 ml

La chaleur des dunes inspire également Eris Parfums, qui nous propose de « jouer avec le feu » grâce à son Scorpio Rising reprenant le symbole de cet arachnide redouté. Antoine Lie en dessine les contours avec une « overdose d’épices mêlées » : poivres noir et rose, clous de girofle, cannelle, cardamome et safran reposent sur un lit d’encens, de bois et de cuir, pour constituer un boisé épicé élégant et évolutif.
Extrait 180 euros/50 ml

Les épices ont aussi la part belle dans la nouvelle création des « Absolus d’Orient » de Guerlain, Épices exquises. Thierry Wasser a souhaité retranscrire la sensation du café à la cardamome moyen-oriental, dans un clair-obscur olfactif entre « un fond chaud, corsé et sensuel, teinté de poivre noir et de notes boisées de oud, de patchouli et de santal » et « des facettes rafraîchissantes subtilement surdosées de cardamome, de notes de baies roses et d’angélique verte et fraîche ». Une cardamome caféinée, métallique, plus surprenante en départ qu’en fond.
Eau de parfum 164 euros/125 ml

Lancée par Vittoria Liu et Randry Glorieux, la nouvelle marque Hima Jomo nous invite quant à elle à un « voyage sensoriel et responsable aux confins de l’Himalaya », loin des « méfaits de l’agitation quotidienne du monde contemporain », avec sa collection « Seasons » constituée de quatre créations signées Delphine Thierry, et à 95 à 99% d’origine naturelle. Spring in Bome nous emmène au sud-est du Tibet, au cœur d’une « forêt de pêchers sauvages et centenaires ». Le cœur floral est tissé de notes végétales évoquant l’air environnant, « doux et vert comme un voile poudré ». Summer in Paro nous immerge au milieu des pins, dont la « résine odorante au parfum fumé et ambré se mêle aux doux arômes du miel des hauts plateaux ». Le temple bouddhiste de Paro Taktsang, perché sur une falaise, teinte le paysage de mysticisme, dans une composition construite autour de résines ambrées et d’un fond boisé. Pour Autumn in Lhoka, la parfumeuse a retranscrit la cérémonie des habitants de ce plateau fertile, célébrant la récolte de l’orge. Épices et notes fumées figurent « l’ardeur des cœurs », tandis que l’orge, le son, et le sapin baumier suggèrent « l’opulence et la gourmandise des céréales fraîchement moissonnées ». Ce sont les neiges éternelles de la huitième plus haute montagne du monde qui ont inspiré Winter in Manaslu, dressant un paysage « brut et escarpé, minéral et cinglant », mais qui constitue « un sanctuaire pour de nombreux animaux menacés ». Menthe poivrée, basilic vietnamien et anis étoilé apportent de la fraîcheur, avant de laisser place aux bois et à des notes plus musquées.
Eaux de parfum 170 euros/50 ml

Autre « voyage olfactif extraordinaire », dans la forêt du Paraguay cette fois, avec Gaïac éternel d’Atelier Cologne, mêlant le bois à la bergamote d’Italie et au papyrus d’Inde.
Elle initie ainsi sa collection « Cologne rare » autour des « ingrédients les plus purs, originaires des lieux les plus reculés et de territoires uniques », et dans une concentration dite « cologne absolue », c’est-à-dire, selon la marque, d’« extrait de parfum qui exalte la fraîcheur et l’élégance des agrumes ». Un joli boisé fumé, vétiver, qui évoque Encre noire.
103 euros/30 ml, 190 euros/100 ml

Hommage à une matière première historique de la parfumerie toujours, avec Ambre magique de Mizensir, qui met en avant l’ambre gris, source de nombreuses légendes concernant son origine et ses vertus. Alberto Morillas chez Firmenich signe un parfum « lumineux, sensuel et traversé d’une intensité vibrante et boisée », mariant le Cachalox à la mandarine, la cardamome, la fleur d’oranger, la rose bulgare, la vanille bourbon, les muscs, le benjoin et le Dreamwood, qu’il indique être « un bois utilisé pour la première fois dans une composition ». Beaucoup de bois ambrés, mêlés à un santal crémeux et vanillé.
Eau de parfum 290 euros/100ml

Enfin, ce n’est pas une création mais une marque tout entière que Gérald Ghislain, déjà fondateur d’Histoires de parfums, a choisi de consacrer à l’oliban, autre nom donné à l’encens. Olibanum décline ainsi la résine à l’histoire ancestrale, « offrande brûlée sur les autels dédiés aux divinités », dans dix-huit créations, la mêlant ainsi par exemple au maté, à l’ambrette, au safran ou à la cardamome... Elle est ici employée sous forme d’extrait au CO₂ supercritique, une méthode d’extraction plus écologique et « plus respectueuse des qualités olfactives de la résine brute et qui restitue fidèlement ses tonalités boisée, aromatique, balsamique, minérale, épicée et citronnée ». La marque propose de superposer ses fragrances selon la méthode du layering pour personnaliser son parfum.
Eaux de parfum 28 euros/12 ml, 85 euros/50 ml