1957, le quart d’heure américain de Gabrielle Chanel
par Jeanne Doré - Laure Pivot, le 27 décembre 2018
L’année 1957 symbolise les liens que Gabrielle Chanel a entretenus avec les États-Unis depuis les débuts de sa carrière : d’une part, dès 1912, l’attrait de ce pays pour les créations de la jeune femme, et notamment ses chapeaux, d’autre part la fascination que l’Amérique exerçait sur elle, sans doute en relation avec le départ de son père pour le nouveau continent. Comme elle le confiait à Paul Morand dans L’Allure de Chanel (Hermann, 1996) : « J’admire et j’aime l’Amérique. C’est là que j’ai fait fortune ».
Si les Français découvrent le N°5 en 1921, il ne sera commercialisé que trois ans plus tard aux États-Unis, et poursuivra sa conquête durant les décennies qui suivent, notamment grâce au pouvoir de son nouveau sillage, car il était « le premier parfum de luxe à employer les aldéhydes ».
En 1931, Gabrielle Chanel se rend à Hollywood pour habiller Gloria Swanson, et fait escale à New York, où elle enchaîne les interviews, incarnant alors « l’élégance à la française, synonyme de la mode, celle qu’il faut suivre impérativement ».
En 1952, Marilyn Monroe contribue à la naissance du mythe du N°5 en déclarant ne porter que lui pour dormir. Mais c’est en 1957 que Gabrielle fait son grand retour aux États-Unis, où ses dernières collections sont encensées, contrairement à la France qui lui est plus hostile. Elle est alors accueillie à Dallas, telle une star, et reçoit le Neiman Marcus Award la consacrant « créatrice de mode la plus influente du XXe siècle ». Deux ans plus tard, le mannequin Suzy Parker, deviendra l’image du N°5 sous l’œil du photographe Richard Avedon.
Aujourd’hui, Chanel rouvre une boutique à New York sur la 57e rue, où la maison a présenté en novembre son nouvel Exclusif qui célèbre l’année 1957 et « jette un pont olfactif entre la France et l’Amérique ».
Olivier Polge, le parfumeur maison, rend hommage à l’année chère à Gabrielle avec une composition décrite comme un « équilibre de douceur moelleuse, de confort enveloppant », qui se concentre sur les muscs blancs, matière encore jamais exploitée par la maison dans sa collection. D’après le parfumeur, « 1957 est un parfum de peau qui, plus que d’autres, se révèle justement sur celle-ci car chaque peau réagit de façon unique ». Huit muscs blancs ont été assemblés pour obtenir une « superposition immaculée, confortable et enveloppante, douce, presque molletonnée ». L’image évoquée pour décrire le résultat est « le dessin d’une perle fétiche de Gabrielle Chanel, ses contours délicats rendus insaisissables par les reflets changeants ».
Des notes vanillées, cédrées, miellées, du poivre rose, de la graine de coriandre et de la fleur d’oranger habillent la blancheur des muscs. Selon le parfumeur, « 1957 est un trait d’union : il réinterprète la parfumerie américaine avec l’idée du parfum à la française que se font les USA ».
Eau de parfum, 175 euros/75ml - 320 euros / 200ml
Disponible le 31 janvier 2019 en boutiques Chanel
Premières impressions
L’hommage au N°5 est bien là, en filigrane, avec ces aldéhydes scintillants en tête, mais dans une structure beaucoup plus actuelle, très blanche, mouvante, à la fois d’une élégance un peu guindée, mais d’une souplesse vaporeuse. Beaucoup de petites facettes fraiches, aériennes, épicées, poudrées, musquées, comme en pointillé…
Puis un fond plus nettement boisé sec, légèrement miellé, doucement fauve. On est très loin du musc simple et lessiviel à la Body Shop, mais encore plus du musc animal à la Musk Koublaï Khan. Alors oui, on peut se dire qu’il y a déjà eu N°5 Eau première, puis N°5 L’Eau, et que la maison n’avait pas besoin d’une nouvelle variation autour du même thème. Mais avec sa silhouette bien roulée et sa dose de matières luxueuses que lui permettent son statut d’Exclusif (et donc son prix), 1957 se laisse porter sans trop d’effort. Même avec un certain plaisir.
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par Ewandé, le 7 janvier 2019 à 19:58
Grande déception, je m’attendais à un parfum fourrure qui représente ce qu’est la 57ème Rue à New York, le parfum d’une new-yorkaise extravagante et fortunée de l’Upper East Side qui passe ses weekends dans les Hamptons ou les Berkshires. Rien de tel, 1957 n’est rien d’autre que la version Chanel de Fleurs de Citronnier de Serge Lutens. Si le Lutens est plus épais et chaud, le Chanel est plus transparent et froid, mais la ressemblance est troublante, on frôle la copie.
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par moustique, le 21 mai 2019 à 06:23
Beaucoup de douceur, presque intime, dans ce joli parfum de peau. La tenue, hélas, n’est pas à la hauteur de Chanel. Après quelques heures, impossible de retrouver la moindre note parfumée. Un compagnon décidément trop discret à mon goût. Dommage.
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