Eau capitale

Tout commence dans une rose mêlée de bergamote et de poivre rose. Directe, fraîche, un peu verte, elle déjoue les pièges de l’opulence évidente ou du réalisme timide et se paie le luxe d’assumer un vrai caractère fruité et croquant. Soudainement bohème, elle lorgne du côté de l’Orient : cannelle, épices et bois sombres équilibrent et assagissent l’envolée initiale, dans un registre familier à la parfumerie de niche de ces dernières années. Mais notre rose poursuit déjà son chemin. Un brin rétro, elle n’oublie pas ses origines et prend des airs de chypre sans vraiment en réciter le texte : c’est la veste Chanel avec les baskets, un hommage aux classiques qui ne choisit pas entre l’allure et le confort. Le patchouli cœur et l’Akigalawood se substituent à la mousse de chêne et apportent une structure toute en finesse, aux lignes nerveuses et ciselées. En réponse, l’ylang-ylang se lie aux muscs volumineux et aux notes ambrées qui se réchauffent et s’arrondissent sur la peau. Paris n’est pas une beauté froide.

Référence à la parfumerie française avec la rose, aux garçonnes d’hier dans son interprétation du chypre, tout autant que clin d’oeil à la Parisienne pointue d’aujourd’hui, Eau capitale réunit les contraires et impose sa cohérence dans un rendu final tout simplement enthousiasmant. Elle incarne à merveille ce flou sophistiqué, ce mélange de codes et d’indiscipline de la ville aux mille visages et se révèle tout au long de la journée attachante et versatile, belle sans trop en faire. Paris réussi.