Shalimar Parfum Initial
par Jicky, le 1er octobre 2013
Maena,
Ma réponse n’était pas cordiale, mais elle répondait à votre ton outré genre c’est la fin du monde, c’est absolument scandaleux.
Il n’y a pas de rancune. Je trouve ce que vous dîtes peu pertinent voire faux, et je tente de vous le démontrer avec une palette d’arguments et d’exemples suffisamment variée pour pouvoir vous convaincre que SI Shalimar est effectivement un parfum culturellement sensuel voire socialement appréhendé comme un parfum de brune féminine mature, ce n’est pas pour autant que lorsqu’on aborde plus Shalimar selon ces critères (dignes d’un communiqué de presse recopié par un étudiant n’ayant que 3h de sommeil au compteur : la sensualité orientale c’est-à-dire raffinée à l’extrême de la féminité suggérée dans toute sa plénitude. Un parfum qui devait être intimidant et représenter un défi pour chaque femme en quête de sa sensualité orientale), Shalimar n’est plus Shalimar.
Vous voyez la nuance ? Où est-ce que je nie la "féminité" de Shalimar ? Nulle part, je dis juste que Shalimar c’est un beau parfum, et c’est donc beaucoup plus que cela, et c’est même dommage de le réduire à deux trois punchlines sur la sensualité orientale, surtout sur ce site qui tente de parler du parfum en touchant un maximum de monde, dans sa diversité (vive l’odorat pour ma part) : la féminine, le viril, l’androgyne asexué et toutes les autres cases possibles et imaginables.
Quant à dire que je suis un pauvre type contre la féminité (vous n’avez pas dit pauvre type hein, c’est juste une association que je fais personnellement sur ce genre de mecs), j’ai envie de dire que vous me connaissez mal ^^ (c’est même mignon à lire), j’ai même plutôt des "tendances féministes". Mais si vous pour vous, dire que Shalimar dépasse "l’épreuve initiatique pour une femme" c’est faire une diatribe contre la féminité, j’ai bien peur que nous ne pourrons nous entendre là dessus =). Pareil, je crois que vous êtes mal tombée si vous me réduisez à un nez simplement technique et jamais symbolique. En toute modestie, je crois même que vous êtes vraiment mal tombée (j’ai rien à prouver, mais je vous invite à relire mes textes sur auparfum, mais surtout sur mon blog... )
Pénultième point : l’état actuel de Guerlain. En fait, je me permet d’affirmer ceci ==> Guerlain s’occupe de ses classiques, et ils sont loins du "je baisse le coût de ma formule en faisant passer pour de la réglementation". Bien au contraire, j’en ai parlé sur la brève de La Légende (en expliquant le pourquoi du comment via le succès de La Petite Robe Noire), et je pense qu’il était impossible cette année de manquer sur auparfum toutes les discussions sur les reformulations 2013 des grands classiques (car il y en a eu des discussions, limite un peu trop ^^). Mais vraiment, tant pis pour vous. C’est tout à fait légitime et même obligé de s’offusquer des reformulations. En revanche, je fais appel à votre bon sens quand j’entends que Shalimar ne tient plus (oui, effectivement, au bout de 10h, il diffuse moins, mais bon, j’imagine que vous ne vous parfumez pas toutes les 48h non ?). Il tient moins bien, clairement, mais je pense qu’il n’y a pas de quoi crier au scandale non plus... (et je dis ça en comparant l’edp 2013 avec une edp 2006, une edt 2003, l’edt de Patrice, l’extrait actuel, l’edp 2010 et j’en passe). Que les amateurs d’Opium se plaignent : maintenant c’est de la Volvic. Que les amateurs de Femme de Rochas se plaignent : maintenant c’est de la Badoit. Mais que les amateurs de Shalimar, de Poison et de Mitsouko se réjouissent dans une certaine mesure =)
Et dernier point : la subjectivité.
Ca, c’est ZE argument sur un délicat petit forum du nom de beauté test : quand on commence à critiquer un parfum selon des points de vue olfactifs (qu’ils soient techniques ou symboliques), on a le droit au mantra monolithique "nan mais de toute façon c’est les goûts et les couleurs".
Bitch please.
Si effectivement la subjectivité intervient toujours d’une manière ou d’une autre, ce qui est cool c’est de toujours essayer (je ne dis pas réussir) de la dépasser ou de la nuancer. Car dans notre période actuelle, c’est souvent - pour reprendre la formule de Pastoureau - ou tout noir ou tout blanc, jamais gris et encore moins gris perle ou gris tourterelle. La dernière fois, on a senti un aldéhydé qu’a créé la Patrice avec Newyorker et ce dernier crie "c’est le 5" et moi je crie "c’est Joy !". Et après on a fait un combat dans la boue. Or, il s’avère qu’on avait tous les deux raisons, que cela dépandait de la manière d’approcher le parfum ==> Newyorker restait sur la structure florale aldéhydée tandis que moi je demeurais dans l’appréhension du bouquet : je voyais un bouquet classique froid. J’associe ça typiquement à Joy, alors que le 5 pour moi c’est un bouquet classique chaud, d’où selon moi le côté plus Joy que N°5. Mais on avait tous les deux une bonne partie de la réponse : il avait la structure du 5 avec le rendu de Joy. Ceci pour répondre à l’importance de l’approche.
Avec l’approche vient l’utilisation des arguments qui dépassent le binaire "j’aime/j’aime pas", qui est loin d’être votre cas, ni le mien j’ose espérer, donc que je ne vais pas traiter ici.
Et j’en fini avec ce point en arrivant de l’argument à celle de l’écriture autour du parfum en tant qu’"art" (pour vous citer). Et si la subjectivité a une part, il faut néanmoins admettre que l’objectivité et l’établissement de critères - qu’ils soient olfactifs, esthétiques et j’en passe (synesthésie, techniques, etc) - permettent de créer un langage que nous comprenons entre passionnés, mais aussi avec des parfumeurs. Et oui, car si nos mots ne se rejoignent pas forcément avec ceux qu’utilisent les professionnels, on se rend compte (je dis ça pour avoir eu la chance d’avoir discuté avec plusieurs parfumeurs) qu’on se comprends, notammment en s’expliquant. Imaginez les parfumeurs ils se braquent en nous écoutant genre "vous dîtes de la merde, vous n’utilisez pas le bon vocabulaire, vous restez dans la subjectivité binaire" ?? Non, on échange, on partage et c’est génial. C’est aussi ça la visée de ce site : le partage d’une passion avec des mots, des sensations, dans leur pluralité de significations et donc dans la pluralité des personnalités qui participent à ce forum.
Et c’est aussi cette pluralité qui fait la richesse de ce site. Cette pluralité qui implique que des jeunes pré-pubères même pas sevrés et baveux viennent s’offusquer quand ils lisent que Shalimar c’est for chaudasse only ;)
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