Juliette Faliu : "L’Olfactorama met l’accent sur l’olfactif"
par Juliette Faliu, le 21 juillet 2015
Nous avons demandé à Juliette Faliu, présidente de Olfactorama, de revenir pour nous sur la troisième édition des Prix de l’Olfactorama, qui s’est tenue en juin dernier à la Belle Parfumerie du Printemps-Haussmann.
L’Olfactorama 2015
Voilà un mois que la troisième édition de l’Olfactorama est terminée. Je crois que c’était une très belle édition, qui a très clairement marqué un tournant important dans la vie de cette initiative, même s’il reste évidemment beaucoup de choses à construire et de chemin à parcourir.
Le fait d’avoir été soutenu par le Printemps en 2015 a été pour nous une belle avancée, dont nous sommes vraiment heureux. Cela nous a confortés dans l’idée qu’une partie de la profession pouvait accueillir notre démarche de manière positive et y voir un intérêt pour tous : professionnels, passionnés, mais aussi consommateurs. Ce partenariat nous a sans aucun doute fait gagner en crédibilité, bien qu’il reste du travail à faire pour faire accepter et comprendre ce que nous voulons promouvoir. Notamment le fait que cette démarche, à 100% positive, ne peut être que salutaire et avantageuse pour l’industrie dans son ensemble.
Nos relations avec le monde extérieur
Nous avons déjà de bons rapports avec beaucoup de marques, du côté de la parfumerie confidentielle en particulier, qui accueillent avec bienveillance et intérêt cette mise en valeur de leur travail. Concernant les marques grand public, à côté de grandes maisons qui sont déjà tout à fait en accord avec la vision artistique que nous défendons, certaines de nos demandes sont restées totalement ignorées… Nous sommes sûrement encore un peu jeunes !
Du côté des journalistes, ceux qui partagent notre vision de la parfumerie, notre envie de défendre le beau et l’artistique sont majoritaires et sont très enthousiastes au sujet de l’Olfactorama. C’est la raison pour laquelle il était parfaitement naturel que certains fassent partie de notre jury, et ce depuis la première édition. Mais il faut dire que notre démarche est encore perçue comme une initiative issue de la blogosphère, à défaut d’être comprise comme une réunion de passionnés, ce qui est sa véritable essence. De ce fait, il subsiste encore de l’incompréhension ou de l’incrédulité de la part de certains journalistes et nous avons du essuyer quelques déconvenues. De façon générale, je crois que nous avons encore beaucoup d’efforts de communication à fournir pour que les rôles des blogueurs et des journalistes soit perçus comme complémentaires plutôt que contradictoires.
Les gagnants 2015
À la lumière du palmarès 2015, on a pu lire et entendre que la sélection avait été orientée pour faire remporter les prix à nos favoris, de façon, peut-être, à nous attirer les faveurs de grands noms de la profession. S’il est clair que nous n’avons rien à justifier, il est important et primordial de rappeler notre démarche pour les professionnels et les passionnés intéressés ou intrigués par l’Olfactorama.
L’Olfactorama a pour principal objectif de mettre l’accent sur l’olfactif, car dans un parfum, c’est cette part qui nous fait vibrer, nous transporte, nous fait pleurer ou rire. La communication, le flacon, l’image de marque sont certes des éléments importants dans la perception globale d’un parfum, et sont pour cela, largement analysés... Mais nous avons préféré replacer l’olfactif au centre des débats. C’est notre parti pris à nous. C’est le moyen que nous avons choisi pour expliquer la beauté du parfum et attirer l’attention sur son statut d’oeuvre d’art. Le but, à terme, est que ce statut soit reconnu et partagé par tous. De ce fait, lors du processus de sélection, le nom des marques choisies importe peu.
Pourquoi Hermès et Cartier alors ? Peut-être simplement parce que ces maisons persistent, avec une régularité qui force le respect, à produire des parfums d’un niveau et d’une qualité qui les placent systématiquement et régulièrement au dessus du lot. Si notre propos est bien de “Révéler le meilleur du parfum”, nous n’avons aucun intérêt à faire le moindre calcul pour positionner telle ou telle création. Rappelons maintenant que le comité directeur de l’Olfactorama n’est responsable que de la “Sélection Olfactorama”.
La suite incombe à notre jury, qui est lui aussi placé dans une situation d’impartialité par la réception d’une trousse d’échantillons numérotés, garantissant une évaluation à l’aveugle (lorsque celle-ci est pertinente). Ce double examen a une valeur empirique que je trouve tout à fait intéressante.
La sélection fréquente de Hermès et Cartier (mais nous pourrions aussi parler de Chanel ou de Guerlain) par le comité directeur de l’Olfactorama peut se résumer par la proposition suivante : “Les créations de ces maisons sortent souvent du lot, sur le plan olfactif.” Si cette proposition se trouve confirmée et validée ensuite par un second examen, réalisé par un groupe d’évaluation indépendant du comité directeur, n’est-ce pas parce que leurs créations sont réellement au-dessus du lot ?
Ainsi, je ne sais pas si leur victoire était prévisible, mais elle était logique, à la lumière de leurs qualités olfactives intrinsèques. Cette démarche, finalement, a presque quelque chose de scientifique, et je trouve cela passionnant.
- Les lauréats de l’Olfactorama 2015
L’olfactif à l’aveugle
Une des particularités qui permet à l’Olfactorama de se distinguer et de légitimer objectivement sa démarche, tient à la place centrale que nous donnons à l’olfaction à l’aveugle dans toutes nos séances et débats, puis dans le processus de vote. Il s’agit pour les “évaluateurs” (comité directeur ou jury), de sentir les concurrents sans aucune indication de nom ou de marque.
Ce procédé nous permet d’avoir l’appréciation la plus objective possible et fait ressortir nettement les véritables créations. Elles se distinguent alors alors d’elles-mêmes et naturellement, soit par un propos fort, soit par une construction remarquable, soit par une émotion palpable, soit par tout cela à la fois. C’est pour cette raison que nous insistons sur le point suivant : être choisi pour faire partie de la “Sélection Olfactorama” est déjà une distinction en soi.
L’évaluation à l’aveugle permet de se couper, le plus longtemps possible, des schémas cognitifs liés à la marque, aux noms des parfums, aux a priori sur le parfumeur, aux discours publicitaires… Dans la pratique, ne soyons pas naïfs, nous-mêmes et beaucoup de jurés reconnaissent certains des produits sélectionnés. Mais l’aveugle permet toujours de prendre juste ce qu’il faut de temps et de distance, pour permettre à une certaine objectivité de s’exprimer. Ce système d’olfaction à l’aveugle à été très largement plébiscité par notre jury, pour la qualité et la profondeur d’analyse qu’il a rendues possible.
Le fondement de la démarche
L’aveugle est donc une donnée fondamentale et essentielle de notre démarche. C’est elle qui apporte légitimité et valeur aux résultats. Mais ce n’est certes pas la seule donnée. L’année 2015 ayant été particulièrement chaotique en termes d’organisation, nous avons été contraints d’annuler le second tour de vote, qui nous permet normalement de réintroduire les autres paramètres lorsque l’on juge un parfum : le parfumeur et le discours qui entoure sa présentation. Ce sont les mêmes paramètres pour toute oeuvre d’art : on regarde l’objet, l’artiste auteur et le contexte de création. Il est ainsi dommage que ce second tour n’ait pas eu lieu (il sera rétabli dès l’année prochaine), mais cette expérience inattendue nous a tout de même permis d’appuyer sur l’élément central de notre démarche : l’olfactif. Et de montrer à quel point il est important de le remettre au centre de tout discours élaboré sur le parfum : tant que l’olfactif n’aura pas la primauté dans l’analyse de l’objet parfumé, on ne pourra pas parler de création olfactive « artistique ».
En effet, lorsque l’on admire la peinture de Michel-Ange, on apprécie le maniement des couleurs, le jeu des proportions, les effets de masses et de positionnement, etc. Bref, l’oeuvre, la base. Ensuite, on s’interroge sur ce que l’on connaît de Michel-Ange, de son époque et des autres artistes qui lui sont contemporains ou non, du contexte de création (commande, création pure…). Pourquoi devrions-nous procéder différemment avec le parfum ?
Qu’est-ce que l’art olfactif ?
« L’Art est la mise en scène spectaculaire, visible, du fond invisible de toute émotion », Alexandre Abensour.
J’aime beaucoup cette définition parce que, lorsqu’on la lit avec le prisme de l’olfaction en tête, on comprend à quel point la création olfactive prend tout son sens : d’odeurs disparates et parfois disgracieuses, on fait ressortir l’âme de beauté, imperceptible de prime abord, pour le profane. On exprime le coeur de ce qu’elles portent en leur sein, on les met au diapason et on les rend accessibles en créant une forme olfactive nouvelle, faite de tout cela. C’est la métamorphose nécessaire : le parfumeur, par son art, donne à sentir, à vibrer et à pleurer. Le beau est-il plus beau lorsqu’il y a eu 30, 300 ou 3000 essais ? Je n’ai pas la réponse à vrai dire. Et je pense que la question n’est pas là.
Il y a bien une différence entre ne pas être capable d’équilibrer une formule ou exprimer une idée, et parvenir à déployer un propos cohérent et profondément touchant, même imparfait. Car, ce qu’on évalue, ce que l’on tente d’analyser, c’est la portée artistique d’un parfum, à tous les niveaux. L’Olfactorama a des critères pour cela, dont l’importance est modulée en fonction du ressenti global. Autrement dit, les aspérités, défauts, maladresses de certains parfums, peuvent faire partie de l’émotion finale et participent à rendre l’oeuvre authentique. À quoi cela sert de toute façon d’obtenir un parfum parfait ? Cela a-t-il un sens ? Je ne crois pas.
La danseuse est-elle plus touchante et parfaite sur les planches de l’Opéra ou dans le petit théâtre de ma ville ? La question c’est de savoir reconnaître la beauté quand elle est là, et de la laisser rentrer, de la laisser parler. Après, bien sûr, on peut discuter de niveaux, de puissance, de maîtrise… Mais si déjà, en parfum, on était capable de juste faire la différence entre le moche, le sans intérêt et le beau, ça serait vraiment bien.
Attention ! L’idée ce n’est pas de dire que tout le monde est capable de faire du parfum, bien au contraire et justement. Être parfumeur, ça ne s’improvise pas. Cela demande énormément de travail, de persévérance et d’abnégation. Alors quand le résultat est là, chez les petits indépendants ou chez les grands industriels, c’est important de le dire.
L’action de l’Olfactorama pour l’art olfactif
L’Olfactorama, c’est une action concrète pour faire reconnaître la parfumerie comme un art. En effet, on parle de statut d’oeuvre d’art, de création artistique, d’émotion et de beau. En soi, tout ceci est très louable, et nous le soutenons bien entendu à 100%. Mais le dire ne suffit pas. Cela fait plusieurs années, en France notamment, que l’on entend parler de parfumerie artistique, de démarche créative originale. Beaucoup de professionnels sont légitimes pour parler de cette manière, beaucoup d’autres ont simplement pris le train en marche et tentent de faire valoir leur grandeur en “ayant l’air de”. Cela ne contribue pas à faire avancer les choses.
Pour que les choses avancent, il faut une démarche, une méthode, des règles, des critères, un processus… Bref, une base sur laquelle chacun puisse s’appuyer pour juger et discuter ensuite. Autrement, ça reste du verbiage. Sur ce sujet, l’Olfactorama a été la première initiative totalement indépendante au monde (n’ayons pas peur des mots), à se doter d’une méthodologie écrite et transparente allant dans ce sens, visible sur son site.
Cette méthodologie détaille soigneusement les différentes étapes de sélection et de vote, et présente le processus d’évaluation olfactive (critères olfactifs définis) que nous utilisons et que nous proposons à notre jury. Il n’a d’ailleurs pas fallu attendre très longtemps pour que le modèle de l’Olfactorama (prix, jury indépendant, olfaction à l’aveugle) soit repris et adapté par d’autres. C’est bien normal à vrai dire, et c’est en réalité un point très positif.
Parfumerie à multiples vitesses
Il a parfois été mentionné le fait que certaines marques n’ont pas besoin du support et de la publicité que l’Olfactorama leur fait. C’est une remarque qui s’applique au grand public, comme à la niche. Il est en effet tout à fait possible de segmenter aujourd’hui ces deux secteurs en plusieurs catégories, tant les logiques de créations à l’oeuvre sont parfois disparates. Ces segmentations, qui ne sont d’ailleurs pas clairement formulées, sont avant tout basées sur une observation des logiques marketing et des moyens commerciaux en place chez les marques. C’est certes passionnant, mais artistiquement et olfactivement parlant, c’est peu pertinent.
L’idée communément admise, surtout au sujet de la niche, serait celle-ci : une marque ayant des moyens de création / production importants, est en mesure de produire quelque chose de plus beau que celle qui en a moins ? Ou inversement, de moins beau, parce que moins sincère et expérimental ? Ainsi, dans le cadre des Prix de l’Olfactorama, il faudrait évaluer les concurrents entre eux, chacun dans leur cour, pour comparer ce qui est comparable. C’est une logique valable, qui se tient tout à fait, et qui est en place dans d’autres domaines. Mais je trouve cette tendance à tout compartimenter assez pénible.
Une Vero Kern qui gagne avec un Mito face à un Shangai Lily de Tom Ford ou un Tam Dao de Diptyque (Sélection Olfactorama 2014) est la preuve qu’il n’est pas nécessaire d’avoir de gros moyens pour formuler et que ce qui compte, c’est surtout d’être capable de provoquer de l’émotion et du beau. Compartimenter les choses, c’est se priver de voir la petite indépendante, pratiquant une parfumerie alternative et profondément touchante, faire botter en touche un féroce compétiteur, savant du marketing, armé d’un arsenal surpuissant de création et de distribution. Or, selon moi, ce symbole vaut vraiment le détour. Je crois, une fois encore (pardon), qu’il faut rester centré sur l’olfactif et la qualité, autrement, on se perd.
Au final, je crois que l’Olfactorama n’aurait pas d’intérêt à se calquer sur le marché, qui est objectivement en profonde mutation. Il vaut mieux rester centré sur une démarche et des objectifs qui sont clairs :
- Révéler, chaque année, le meilleur du parfum.
- Oeuvrer pour une reconnaissance prioritaire et accrue de l’olfactif en parfumerie, avant tout le reste.
- Proposer une réflexion profonde sur ce qu’est l’art du parfum et des outils pour en discuter.
Ce n’est que de cette manière, qu’à terme, nous obtiendrons une réelle légitimité. Notre idée n’est pas que tout le monde embarque dans le bateau avec nous, mais plutôt de proposer une vision forte du parfum, pour quitter une parfumerie du “prêt-à-sentir”, aussi mortifère que le “prêt-à-penser”.
L’avenir de l’Olfactorama
On pense toujours à la prochaine édition. On a toujours dans un coin de la tête l’Olfactorama à venir quand on sent une nouveauté. On se demande ce que ça va rendre en séance à l’aveugle, et quand on a un coup de coeur, on a hâte d’en débattre avec les autres ! Je crois d’ailleurs que notre équipe fonctionne bien, parce que nous sommes animés par la même chose : l’amour du parfum. Nous n’avons pas encore évoqué l’idée de faire évoluer le comité directeur, mais il faudra sûrement le faire un jour ou l’autre. Personnellement, je n’y pense pas pour le moment car ce n’est pas d’actualité.
Les priorités vont plutôt être mises sur la nécessité de rendre la démarche encore plus claire, plus transparente, de mieux travailler sur la communication, mais aussi d’améliorer nos processus et notre méthodologie. Si l’essentiel de notre fonctionnement est valable et solide à la base, il faut toujours s’améliorer. Nous allons sûrement retravailler un peu les critères, pour leur faire gagner en intelligibilité.
Enfin nous réfléchissons aussi à un moyen de réintégrer le public de passionnés qui nous suit. Le vote des lecteurs est passé à la trappe cette année (organisation oblige), mais nous voudrions retrouver cet esprit avec un nouveau dispositif.
À suivre...
- L’Equipe de l’Olfactorama (de g. à dr.) Thomas Dominguès - Alexis Toublanc - Sophie Normand - Juliette Faliu - Thierry Blondeau - Patrice Revillard
par Nymphomaniac, le 22 juillet 2015 à 11:53
Sans connaître leurs noms ex ante, lire 3 à 4 pages à l’aveugle – l’expression est un peu inappropriée ici j’en conviens –, me permettrait, sans trop me tromper, de distinguer un roman de Régis Jauffret d’un autre de Marie Ndiaye ou de... Amélie Nothomb ! De même, si on connaît bien les voix pour les avoir écouter maintes fois en concert ou en disque, on est capable de distinguer à l’aveugle un Dichterliebe chanté par Matthias Goerne d’un autre par Christian Gerhaher !
Là, on nous dit que l’olfaction a lieu à l’aveugle et que cela "légitime objectivement la démarche". Mais si on prend l’exemple de La Panthère, ce parfum était déjà bien connu et senti maintes fois par plusieurs membres du jury sinon la totalité, avant même l’établissement de la présélection. Moi-même suis capable de l’identifier immédiatement sans erreur ! Il en va de même pour Terre ETF, que je reconnais immédiatement, sans que j’aie besoin de voir le flacon ou la marque.
Ce processus à l’aveugle est sans doute objectivable pour des parfums rares peu diffusés et donc peu ou pas sentis, mais certainement pas pour les têtes de gondole ou autres produits phare diffusés en masse, qui sont déjà connus et donc presque immédiatement identifiables, bien plus encore que pour la littérature ou la musique. Bien sûr, je ne dis pas que La Panthère ou Terre ETF n’auraient pas été in fine sélectionnés par le jury dans une démarche réellement aveugle, je dis juste que l’alibi de l’olfaction à l’aveugle relève ici davantage de l’aveuglement que d’une démarche objective, et qu’en réalité – comme tout prix quel qu’il soit – la subjectivité des membres, avec leurs présupposés, leurs choix, leurs désirs et le cas échéant leurs contraintes, prime toujours.
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par Nicolaï, le 22 juillet 2015 à 12:46
Disons que l’olfaction à l’aveugle est intéressante pour les jus moins connus, moins sentis (donc moins mémorisés) – ceux qui justement n’encombrent pas les têtes de gondole. Et y a de quoi faire, houla. Des milliers de flacons qui dorment, attendent, hors des feux de la rampe. Quoiqu’il en soit, c’est un procédé qui évite dans une certaine mesure de "boire l’étiquette" (on sent souvent ce qu’on compte sentir...). A conserver donc.
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par Poivrebleu, le 22 juillet 2015 à 14:18
Merci Nicolaï pour votre intervention.
Effectivement, des flacons qui dorment et qui méritent amplement l’attention sont légions. D’ailleurs, beaucoup de jurés nous ont déclaré avoir "découvert" des produits grâce à ce procédé.
Du côté des organisateurs, les séances de sélections sont pour cela passionnantes, car nous ne savons rien de ce que nous allons sentir. Et lorsque nous reconnaissons un produit, cela ne lui donne finalement pas vraiment l’avantage et ne le handicape pas non plus. S’il est mauvais, il ne passera pas l’examen olfactif. Inversement, si le produit est très bon et qu’il est sélectionné, c’est parce que ses qualités olfactives l’auront mises au dessus du lot.
Merci pour votre soutien et votre adhésion à la démarche !
par Poivrebleu, le 22 juillet 2015 à 14:10
Bonjour Nymphomaniac,
Vos remarques sont intéressantes et à vrai dire, ne me surprennent pas, car je savais que nous pourrions lire ce type d’intervention suite à la publication de ce texte.
Comme je le précise dans mon développement, personne ici, ni les organisateurs, ni les membres du jury ne sont dupes. Les produits les plus significatifs sont reconnus et reconnaissables. En premier lieu, par le style du parfumeur que l’on peut aisément reconnaître lorsqu’il est identifiable, citons au hasard : Bertrand Duchaufour, Olivia Giacobetti, Jean-Claude Ellena... Viennent ensuite le thème du parfum, sa trame, son développement : lorsque ceux-ci ont été sentis et qu’ils sont marquants (identifiables, originaux, puissants, pointus...), ils sont en effet difficile à oublier. Diantre ! N’est-ce pas ce que l’on recherche dans un parfum justement ? N’est-ce pas ce qui manque justement et cruellement à la parfumerie actuelle ?
Vous présupposez de la subjectivité des membres du jury sans en avoir fait partie. Je soutiens moi, que sans être naïfs, le processus d’olfaction à l’aveugle permet de rétablir pour un temps certes court, mais effectif tout de même, une certaine objectivité chez les jurés (et organisateurs), qui légitime la démarche de l’Olfactorama. Lorsque les jurés reçoivent les échantillons, ils savent qu’ils vont sentir des produits du marché sortis l’année précédente. Ainsi, pour peu qu’ils aient été attentifs aux nouveautés, ils seront capables de les reconnaître.
La différence, c’est la mise en contexte : sans flacon, sans communication, sans marque ni nom du parfumeur (dans un premier temps), l’évaluation est majoritairement olfactive. Ce processus permet de mettre en comparaison des produits connus et d’autres moins connus les uns à côté des autres. Il permet donc la surprise, l’étonnement, parfois la révélation et aussi simplement l’objectivité. Si Untel est reconnu, l’aveugle permet de rétablir un état mental neutre pour chaque concurrent avant de le sentir. Chaque nouveau concurrent est évalué de la même manière que le précédent, puisqu’on ne sait pas ce qui va se retrouver face à ce concurrent que nous avons reconnu.
Untel (bien que je l’ai reconnu) est-il toujours au dessus du lot ? Si oui, pourquoi ? Ou finalement, Tel Autre est-il plus intéressant (que je l’ai reconnu ou non) ? Pour répondre à ces questions, nous devons examiner ce que dit l’olfactif en nous éloignant de nos schémas de pensée habituels.
Le cadre est donc bien objectif en grande partie et au maximum (cette année) de ce qu’il était possible d’atteindre. Il ne s’agit donc aucunement d’un "aveuglement" et d’une soumission à de quelconques présupposés ou contraintes que j’aurais peine à identifier d’ailleurs.
par anthobe, le 22 juillet 2015 à 10:45
Bonjour, très bel article !
Dans la commande publique (mais aussi privée) d’architecture, les prix de concours se font aussi "à l’aveugle", c’est réglementaire.
Il y a déjà une première phase où les candidats sont selectionnés sur leurs références. Les candidats séléctionnés lors de la première phase rendent des planches de dessins+maquette sans nom, et sans aucun signe distinctif, un numéro donné par une administration permet de différencier les projets.
Cela permet effectivement une sorte d’impartialité "forcée" des membres du jurys puisqu’ils ne savent pas s’ils choisissent un architecte super star ou non.
On peut poursuivre l’analogie, parfois des concours sont remportés avec de la poudre aux yeux, les dessins et maquettes sont magnifiques et emportent l’avis du jury. Derrière, il n’y a rien, c’est juste du graphisme. C’est pourquoi, sous l’influence des concours suisses notamment, on nous demande de plus en plus un rendu de dessins/maquette neutre : maquette blanche, dessin très codifié, afin que le jury ne se laisse pas influencer par des artifices.
Cependant, l’analogie s’arrête là, puisqu’il s’agit des concours pour la construction. En revanche, les prix d’architecture à proprement dit, ne se font pas du tout à l’aveugle, et les mêmes noms assez influents reviennent ...
Le fait de jugé "à l’aveugle" les parfums permet effectivement de supprimer les "artifices" du flacon et du packaging.
Malgré tout, j’ai parfois des réticences à adopter un parfum dont le flacon me fait honte, je pense aux parfums de Marly, où le mélange du blason et du laqué noir plastique me fait un peu fuir :-)...
par Tamango, le 22 juillet 2015 à 10:15
Merci Juliette pour cet article qui m’éclaire pleinement sur les objectifs et le fonctionnement de l’Olfactorama. Auparfum est une source fabuleuse d’informations sur l’univers des parfums dans laquelle les échanges sont vraiment nombreux et fructueux. Bravo !
par Nicolaï, le 22 juillet 2015 à 09:14
Centrer sur l’olfactif plutôt que sur l’image — par une soumission à l’aveugle — voilà qui me semble essentiel et de fort bon augure. En fait, centrer sur le produit plutôt que sur l’emballage, sur tout le discours et l’aura qui l’accompagne. D’autres domaines seraient bien inspirés de procéder de la sorte. Je pense par exemple aux prix littéraires. Parvenir enfin à quelque chose de plus juste et équitable où les jeux d’influences restent bloquées au placard. Bravo pour votre initiative et votre méthodologie. Pourvu que ça dure ;)
par invité, le 22 juillet 2015 à 09:09
Merci beaucoup Juliette pour cet article passionnant qui nous permet de mieux comprendre le fonctionnement de l’Olfactorama. La mise en avant de l’olfaction et l’évaluation à l’aveugle sont très importants pour un palmarès le plus objectif possible.
Félicitations et longue vie à l’Olfactorama !
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Merci pour ce bel article qui nous fait découvrir un peu plus les coulisses de l’Olfactorama. Par curiosité, combien de parfums sentez-vous pour établir votre selection ?
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par Poivrebleu, le 24 juillet 2015 à 18:47
Bonjour Aloxe,
Cela varie bien entendu d’une année sur l’autre, mais disons que pour cette édition 2015, nous avons été amené à évaluer près de 300 parfums toutes catégories confondues. Précisons que nous nous concentrons sur la parfumerie fine exclusivement.
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