Arc-en-ciel, cognac et aromates : la revue de sorties parfums #16

Alors que les arbres ont revêtu leurs teintes automnales chatoyantes, c’est la thématique des couleurs qui inspire de nombreux lancements en cette rentrée.

Couleurs, c’est précisément le nom de la nouvelle collection proposée par la parfumerie bordelaise Le Nez insurgé, qui questionne notre perception de la gamme chromatique à travers les odeurs. Anne-Sophie Behaghel signe Vert sauge, décrit comme un « rituel ancestral » mêlant la plante aromatique à l’élémi, au Cashmeran et au musc, ainsi que Feu zinzolin, un patchouli ambré animal présenté comme « une braise de résine qui caramélise », et prenant une tonalité violacée tirant sur le rougeâtre, si l’on en croit son nom et le Larousse. Amélie Bourgeois a quant à elle créé Bleu nuit, « un thé noir constellé d’épices, feutré et texturé », et Cyan brûlant, « une mandarine aquatique, héritière charnue d’une fleur blanche, cultivée par la lumière réfléchie par la mer » qui tire vers la fleur d’oranger solaire. Enfin Camille Chemardin et Elia Chiche ont imaginé Peau de bois, un « murmure comme le crayon sur le papier » aux accents de poivre, violette, cèdre et styrax.
Eaux de parfum 120 euros/ 100ml

Ambiance tout aussi chamarrée chez Maison Crivelli qui nous invite avec Ambre chromatique à un trek épicé dans une « jungle arc-en-ciel » à la recherche de résines de benjoin. Quentin Bisch a marié encens, poivre rose, davana et osmanthus sur fond de benjoin et de vanille Bourbon pour offrir un « colorama ambré » à l’atmosphère presque lutensienne.
Extrait de parfum 195 euros/ 50ml

Chez Caron, le mythique Tabac blond a suggéré de nouvelles nuances à Jean Jacques. Tabac blanc s’inspire des premières lueurs de l’aube baignant les paysages luxuriants d’Amérique du Sud, proposant « un jeu d’équilibre entre fraîcheur du maté et intensité de l’absolue cacao ». À l’opposé du spectre, Tabac noir évoque une « échappée dans une soirée somptueuse en Orient », entre accord miel, fève tonka, absolue tabac, note de cuir, patchouli et papyrus. Tabac exquis rend quant à lui hommage à « la facette la plus gourmande du tabac », en l’enveloppant d’un accord chocolat, d’une pointe de cannelle, de myrrhe, d’iris et de benjoin.
À tout seigneur tout honneur, le Tabac blond revient en extrait dans une formule retravaillée pour être au plus près de l’original créé par Ernest Daltroff en 1919, délicieusement cuiré, poudré, épicé et baumé.
Eaux de parfum 120 euros/ 30ml, 155 euros/ 50ml, 220 euros/ 100ml ; Tabac blond extrait 205 euros/ 30ml, 250 euros/ 50ml, 355 euros/ 100ml

On continue à parcourir l’arc-en-ciel avec Poécile, jeune marque née l’année dernière qui célèbre les paysages français. Bleu Asgard nous emmène sur les côtes bretonnes, fouettées par les vagues, l’écume et les embruns. Le parfum tire son nom d’un des neuf mondes d’Yggdrasil créés par Odin et ses frères dans la mythologie nordique. Patrice Revillard associe baie rose, cardamome, notes iodées, absolue d’algue, papyrus et accord ambre gris pour créer « une bulle de bien-être », en évitant les évocations trop huîtreuses.
Eau de parfum 69 euros/ 50ml

Carlotha Ray opte de son côté pour le vert. La marque fondée par la créatrice d’origine paraguayenne Mariela Schwarz Montiel, qui propose des tongs haut de gamme aux effluves de rose et de muguet, a une fois de plus fait confiance à Jean-Michel Duriez. Les deux nouveaux parfums reprennent l’accord « cuir de fleur » que l’on retrouvait dans leurs trois prédécesseurs. Palo Santo & patchouli vert traduit les souvenirs d’enfance de la créatrice chez sa grand-mère, parmi les meubles en bois précieux, les feuilles de patchouli qui parfument les armoires à linge, les odeurs de talc et de feuilles de goyave, pour un « esprit cocooning ». Myrrhe & bois brûlés nous transporte dans son salon d’hiver, réchauffé par un feu de cheminée et par des effluves de gâteaux à peine sortis du four, alors que la neige tombe. Le parfumeur a combiné anis, pomme verte, myrrhe, thé à la réglisse, bois de cade et de genévrier brûlés pour ce « floral gourmand boisé qui souffle le chaud et le froid » et propose une vraie note fumée, rare en parfumerie grand public.
Eaux de parfum 85 euros/ 50ml, chez Blissim et Nocibe

Deux marques penchent quant à elle pour la transparence et la limpidité du cristal. Matière première propose avec Crystal Saffron une interprétation « lumineu[se] et enveloppant[e] » du précieux pistil. Aurélien Guichard a choisi de travailler une essence de safran de Grèce, soulignée d’encens, de musc Habanolide, d’Ambroxan et d’autres molécules boisées ambrées.
Eau de parfum 195 euros/ 100ml

L’éclatante pureté inspire aussi Comptoir Sud Pacifique, qui présente Musc Cristal comme un « éventail de lumière ». La composition met en vedette « une harmonie de muscs blancs poudrés » habillés de jasmin, de fleurs blanches, de feuilles de violettes, d’iris, de fève tonka et de Cashmeran. Un cocon tendre et réconfortant qui n’est pas sans rappeler Clair de musc de Serge Lutens avec son départ propre aldéhydé et son fond de santal crémeux.
Eau de parfum 31 euros/ 10ml, 59 euros/ 30ml, 116 euros/ 100ml

Les tonalités se font plus fauves et ambrées chez Scents of Wood, nommée L’Âme du bois pour le marché français, qui emploie dans ses parfums un alcool vieilli en fûts de différentes essences. La riche gamme de 27 créations oscille ainsi entre armagnac, calvados et bourbon aux lueurs mordorées. On retiendra particulièrement Plum in Cognac, aux effluves liquoreux de pruneau épicé, miellé et boisé.
Eaux de parfum 220 euros/75ml

J.U.S nous offre aussi un verre, mais en mettant cette fois l’orange à l’honneur avec Spritzlove. Alexis Dadier s’est inspiré du cocktail vénitien pour un « contraste clair-obscur » entre accord Spritz, rose, safran, absolu ciste, vétiver et accord oud. Signé Pierre Gueros, Andaluiza nous transporte dans un « jardin andalou millénaire riche en senteurs » à l’aide d’un accord grenade, de mandarine, de fleurs de ciste, de Tonkalactone et de cèdre. Enfin, avec Spicydelice, Marine Ipert rend hommage aux recettes colorées des rives de la Méditerranée. Un « riche et voluptueux bouquet d’épices » accompagne le davana, la vanille, le patchouli, le santal et le vétiver.
Eaux de parfum 50 euros/ 25ml, 180 euros/ 100ml, recharge 230 euros/ 200ml

On reste dans le registre gustatif avec Frustration chez État libre d’Orange. D’abord vendue en exclusivité chez Selfridges et désormais disponible plus largement, la composition est décrite comme un « voyage en régression » à l’invitation de la vanille, de la cannelle, du bois de châtaigner, d’une rose de jardin, d’une touche de vieux rhum et d’un vétiver aux facettes de noisette sèche. « Un parfum pour réveiller l’enfant solide en l’adulte fragile ou éveiller l’enfant fragile en l’adulte trop solide », nous promet la marque.
Eau de parfum 210 euros/ 100ml

Notre tour d’horizon se poursuit dans une atmosphère parisienne, avec la toute jeune maison Judith, qui célèbre « les archétypes féminins » que l’on croise dans la capitale, en s’inspirant de la mode. Taille haute, créé par Suzy Le Helley, restitue ainsi un look années 1980 autour d’une rose métallique ornée de Calone, pêche, freesia, cèdre et ambrox. Composé par la même parfumeuse, Col rond propose un accord tee-shirt propre, mêlé d’absolue jasmin, d’Iso E Super et de vétiver, pour « sublimer la femme et accessoiriser le look sans trahir la personnalité ». Pour Oversize, notre préféré, Maurice Roucel a imaginé un « complexe musqué ambré enivrant », mêlant accord végétal, violette, absolue jasmin, benjoin, patchouli et muscs.
Eaux de toilette 90 euros/ 50ml

On reste dans la ville Lumière avec la marque de parfums naturels Ormaie. Son Tableau parisien restitue « une certaine élégance parisienne bercée par une pointe de nonchalance », à travers une tubéreuse solaire, charnue et miellée, mariée à une rose épicée, sur un fond de vanille, fève tonka et benjoin. Mention spéciale pour le flacon, surmonté d’un capot en loupe d’orme, dont la forme de losange « vient rappeler les inspirations architecturales Art déco. »
Eau de parfum 260 euros/ 100ml