Invictus
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Compositrice de fragrances indépendante et rédactrice pour Nez, la créatrice nous explique comment le parfumeur se joue de notre odorat avec sa palette.
il y a 6 heures
Bonjour, j’adore ce parfum, il me reste un fond de flacon que j’économise. Il devient(…)
Lavande délavée
Église en flammes
Fraîcheur souterraine
J’avoue être d’accord avec Beurk. Ca ne sert à rien de descendre un parfum en projetant sur ceux qui porteront la chose. Oui c’est vrai, Invictus sera sûrement porté par nos Kévin préférés mais pas que. Pas que. Déjà parce que je connais deux trois Jean-Charles qui porteront et seront fiers de leur Invictus, et surtout parce qu’en soi le problème ne vient pas de là. Le problème il vient juste du parfum. Parce que Terre d’Hermès aussi il est beaucoup porté par toute une clique de kéké. Mais c’est pas grave parce que le parfum est génial.
Quant au débat sur les parfumeurs, il faut peser le pour et le contre. Oui ils signent ça de leur nom etc. Mais il faut considérer que le salaire du parfumeur il est versé par la maison selon la considération suivante : je te paye pour que tu formules pour moi. Tes formules ne t’appartiennent pas, elles m’appartiennent. Tu respectes le brief parce que sinon le client iras chez l’autre.
Oui c’est navrant. Mais après les parfumeurs se consolent en faisant une petite symbolique personnelle genre "oui c’est pas top, mais sache que j’ai mis xx% de cassis base, ce qui veut dire ça etc". Les dessous des formules des jus les plus commerciaux sont parfois drôles à décortiquer (le miss Dior chérie de Nagel, le DiorAddict...). C’est une vision relativement pessimiste des choses. Néanmoins je continue d’avoir l’optimisme de penser que oui, quand le parfum n’est pas beau dans un lancement de cette envergure, c’est la faute du brief ; que quand le parfum est réussi c’est souvent grâce au parfumeur (mais pas que, parfois une collaboration pousse la création vers le haut, on a qu’a voir la différence entre YSL période Tom Ford et YSL période L’oreal, Dior période Slimane, etc ou Balenciaga avec le Nicolas Ghesquière). Enfin, le top du top, c’est quand tu sens que le parfumeur a sûrement su jouer avec le brief pour faire un parfum vraiment intéressant tout en restant dans ce qu’on lui demandait (tiens par exemple, le pauvre Guerlain Hommequi s’est fait défoncé la tronche à sa sortie par exemple (oui je joue grave sur le pathos) ... Une menthe verte et légèrement alcoolisée qui s’envole avec une réécriture fougère moderne, le tout en ne se patatraffant jamais dans un fond boisé ou musqué indéfini).
C’est plutôt facile de tacler les parfumeurs. Mais c’est au final un peu "naïf" de s’en prendre qu’à eux dans une industrie qui génère des millions voire des milliards. Dans des lancements de cette envergure, il y a un moment où la responsabilité du parfumeur est dilué...
On pourra conclure cette discussion en disant que dans ce genre de situation le parfumeur n’est plus un parfumeur (un créateur de parfum) mais simplement un "nez" : un instrument de mesure et de contrôle de qualité, en communication avec le cerveau afin de vérifier si le produit correspond à l’attente.