Auparfum

Seville à l’aube

jle

par jle, le 20 août 2012

Le clapotis de fines vaguelettes venant lécher la coque du voilier me tire doucement du sommeil. A peine le temps d’enfiler un t-shirt et je me glisse dans le carré baigné des premiers rayons d’un soleil de mai qu’aucun nuage même symbolique ne vient tempérer. La Sicile est fidèle à sa réputation. Plus que la vue, les parfums de l’ile de Salina où nous avons mouillé la veille au soir, chavirent mes sens. Le mélange est digne de figurer tel quel en flacon.
 
A la douceur épicée de la fleur d’oranger celle de citronnier vert vient apporter sa note fraîche et vive. Le jasmin et le chèvrefeuille jouent le contrepoint du haut de leurs arômes d’un tendre blanc. La lavande à peine en fleur apporte sa touche fusante que le fenouil sauvage et ses petites touffes vertes complète si bien. L’immortelle cuite par le soleil exhale ses notes vertes et fumées, denses et riches secondée par les eucalyptus baumés et boisés, les romarins sauvages et la mer dont les notes salées se marient à merveille à ce concert de notes primaires.
Parti faire le tour des îles Eoliennes en bateau, je redécouvre ma terre natale toute vêtue de coquelicots, de marguerites et surtout de mille senteurs, elle qui d’habitude n’est qu’herbes sèches et poussière dès l’été venu.
 
Hasard de calendrier, quelques jours avant le départ j’ai eu le privilège de recevoir un flacon de Séville à l’aube, le nouveau parfum de l’Artisan Parfumeur, une allégorie odorante due au talent de Bertrand Duchaufour et née du désir de ce dernier de prolonger la rencontre passionnée et sensuelle entre l’écrivain et amoureuse de parfums Denyse Baulieu et un bel hidalgo sévillan lors de la semaine sainte.
 
Piqué au vif par les mille senteurs qui m’entourent, je redescends dans ma cabine, sort le flacon et plonge à nouveau dans cette composition. Vais-je l’aimer autant qu’à Paris, ville aussi belle que malodorante, rien n’est moins sûr.
 
Je suis d’abord frappé par la puissance et la concentration de ce jus qui explose vraiment sur peau et diffuse presque sans ménagement. La fleur d’oranger et l’orange zestée notamment s’encanaillent avec des notes très vertes, aldhehydées, séveuses et presque trop éloignées du vrai rendu de mère nature. La suite est tout autant pêchue avec l’entrée en scène d’un très bel encens accompagné de notes lavandées, et d’un jasmin généreusement dosé. Le fond comporte du benjoin, beaucoup de muscs et quelques résines, bois ou autres trouvailles dont Bertand Duchaufour a le secret.
 
Moi qui râle toujours après les jus maigrichons tels certains mannequins à la beauté aussi osseuse qu’un squelette de SVT, je me prends à rêver d’un Séville à l’aube plus léger et court vêtu et dont on pourrait s’asperger l’esprit tranquille. Cette puissance est sans doute voulue, elle est ici la fidèle transcription de la fougue d’une étreinte, de la flamme qui embrase deux êtres qui s’unissent, elle n’en est pas moins un tout petit peu envahissante et presque troublante malgré l’association réussie entre l’encens et l’omniprésente fleur d’oranger.
 
Alors oui, Séville à l’aube est un beau parfum, racé, prenant, et indispensable dans la gamme de l’Artisan où son ingrédient principal faisait défaut en dehors d’une Fleur d’oranger millésimée et depuis épuisée, mais j’avoue lui avoir préféré l’espace de mon escapade italienne « Salina à l’aube », certes improbable mais aussi plus tendre et sincère. Le combat était inégal mais la morale est sauve, Salina est dans mon cœur, Séville est sur mon cœur…et il sent très bon.

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