Présage futuristique
par Jeanne Doré, le 1er janvier 2010
Quand le futur était presque prédit dans le passé...
par Yuri Gutsatz, extrait de ses critiques de parfum parues dans le bulletin de liaison de la S.T.P.F. (Société Technique des Parfumeurs de France), en 1980.
JACOMO - JACOMO DE JACOMO, ou retour au cubisme
Flacon en forme de pyramide en verre noir, mais qui veut évoquer le COLT 45 accroché à la ceinture du cow-boy. On appuie sur le bouchon du vaporisateur comme sur une gâchette pour faire partir le jet odorant qui sent ... quoi, en fait ? Mais "L’eau des mousquetaires", voyons, revue et corrigée par le Jules de service ! C’est puissant, tenace, poivré, aromatique et ambré comme si on avait découvert quelque part en Auvergne ou dans les Vosges une source inépuisable qu’il suffit de mettre en bouteilles. La nouvelle Eau de Jouvence, la nouvelle eau virile pour l’homme ! De l’une à l’autre, tout est parfaitement interchangeable, à quelques nuances près.
Imaginons une vision futuriste (bête et méchante) : les maisons de parfumerie lancent sur le marché des emballages originaux qui les distinguent les unes des autres.
Les noms des créations sont aussi des nouveautés, mais le contenu est parfaitement identique pour tous les flacons pendant un an. Cru 1981, 1982 ... Ou encore, on vendra aux consommateurs les emballages vides de leur choix et pour les faire remplir, l’acheteur ira dans un supermarché ou grand magasin, ou "centre spécialisé de parfumage" et se fera remplir - au poids ou en volume - son flacon original à partir d’une pompe qui distribuera "l’eau pour homme" de l’année 1981, 1982 ... Il y aura, comme pour les vins, des années plus réussies que d’autres, mais au fond, rien ne ressemble plus à un Beaujolais Village qu’un autre Beaujolais Village. Et cela sera tellement plus simple et permettra à beaucoup de parfumeurs-créateurs, auxquels on demande de tourner en rond, de se recycler dans un nouveau métier : informatique, ou design, ou forage de pétrole en haute mer - des occupations lucratives pleines d’avenir. »
En 2010, on y est presque, non ?
Bonne année à tous !
Merci à Denis Gutsatz pour le texte.
Image : phildesign.com
par Le Gnou, le 2 janvier 2010 à 15:48
Un intéressant retour vers le futur avec ces prospectives de D. Gutsatz, il ne s’était guère trompé sur l’avenir de la parfumerie !
Je suppose que la profusion de lancements est un moteur économique pour l’industrie de la parfumerie, comme dans bien d’autres domaines de notre société consumériste, où l’obsolescence des produits est quasiment programmée dès leur conception par les stratèges du marketing.
Avec la base de donnée de basenotes.net (peut-être pas exhaustive, mais très complète), j’ai trouvé les chiffres suivants, qui en disent long sur l’évolution de la parfumerie d’un point de vue industriel et commercial :
1970 : 29 lancements
1980 : 50 lancements
1990 : 92 lancements
2000 : 447 lancements
Les sommets ont été atteints en 2006 avec 701 lancements, depuis il semble s’amorcer une érosion :
2007 : 676 lancements
2008 : 608 lancements
Et seulement 471 lancements pour 2009 (mais la base de données n’est peut-être pas tout à fait complète pour cette année qui vient de se terminer).
Assisterons-nous dans les années 2010 à une correction à la frénésie de lancements de nouveaux parfums des années 2000 ?
En tout cas, il est plaisant de constater que le domaine de la critique de parfum, que l’on croyait être une fille du XXIème siècle et d’Internet, existait déjà il y a 30 ans.
par Le Jardin Retrouvé, le 1er janvier 2010 à 21:55
Bonsoir,
Et que dire de cette autre critique, toujours de 1980 ?
JOURDAN CHARLES : UN HOMME
Dans un flacon mauve, d’une forme originale en arc de cercle. Le parfum bien équilibré, agréable à porter, propre et soigné. Pour les détails, voir plus haut (Jacomo, etc. ...).
Mais a-t-on vraiment besoin de "nouveautés" ? Tant que le public continue d’acheter, pourquoi diable se creuser la tête pour introduire des notes originales ? Pour plaire à qui ? Pour donner satisfaction à qui ? Pour arriver à quoi ? Pour flatter le goût de quelques esthètes attardés ? Pour faire taire le chroniqueur de ce "Bulletin" avec ses commentaires acides, acerbes et accablants ?
Cela ne vaut pas la peine, bien sûr. Pour faire progresser la Parfumerie avec un "P" majuscule ? Foutaises, tout cela ! D’ailleurs, les années des vaches grasses, hélas, se terminent, et qui sait si en 1981, il y aura des nouveautés à commenter ?
Denis GUTSATZ
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par Le Jardin Retrouvé, le 3 janvier 2010 à 12:50
Bonjour,
Je ne suis pas l’auteur de ces critiques, elle sont de mon père, Yuri GUTSATZ.
Sans consulter basenote, vous retrouverez quasiment tous les lancements en lisant les bulletins de liaison de la STPF (http://www.lejardinretrouve.com/forums/index.php?showtopic=79) et vous trouverez toutes ses critiques sur ce lien http://www.lejardinretrouve.com/forums/index.php?showforum=4
C’est comme Mac Donald, la quantité n’a jamais fait la qualité, et pour survivre et passer les modes il faut être original, sortir du lot, mon père qui savait de quoi il parlait pour avoir été le parfumeur du roi (Louis Amic, maison Roure) reprochait le manque d’audace aux productions de l’époque et même plus récentes.
Cordialement
Denis Gutsatz
ni nez, ni parfumeur, simplement fils de mon père !
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