Cher orphée, auparfum est un lieu où l’on peut partager des avis et donc, par extension, débattre. Les sorties Guerlain ont toujours été débattues, depuis la nuit des temps. Vous avez totalement le droit de penser qu’il n’y a plus de "Guerlinade", que Guerlain est une marque morte et que la colère d’Iris Silver Mist va détruire notre société parfumée décadente (#humour). Votre avis est même partagé par beaucoup beaucoup d’autres personnes (si vous saviez le nombre de commentaires, sur d’autres sites ou sur Facebook par exemple qui disent "c’est pas un Guerlain donc c’est nul" ! Permettez moi de ranger le votre dans cette catégorie). Je réponds de manière assez ferme en écho à votre premier message bien définitif, afin de vous montrer que si l’on change de point de vue, il est possible de voir en l’homme idéal une sortie pas si catastrophique que ça du point de vue d’une écriture Guerlain. Qu’on vienne me dire que le souffle de parfum n’est pas un Guerlain etc., ok oui je comprends, pour l’homme idéal les choses ne sont pas aussi fermes et facilement discutables que cela. J’en veux pour preuve le nombre d’échanges très significatif de cet article.

D’expérience, je peux vous assurer que toutes les sorties Guerlain depuis les années 2000 (et je dis 2000 car c’est facile à voir sur internet, mais je pense que c’est depuis le post-Nahéma, donc depuis les années 80) ont été critiquées sur leur soi disant appartenance ou non au patrimoine Guerlain, assez vite annoncées comme étant la fin de Guerlain. Toutes ont été redécouvertes (ou pas !) avec le recul.

Enfin, je me permets de reprendre le débat, que cela vous fasse plaisir ou non, vous dites que Wasser pourrait sortir une gamme de parfums à son nom. C’est une idée intéressante, elle souligne l’idée d’une écriture qui se dégage, l’idée d’une parfumerie propre. Ce que j’en dis c’est : "pourquoi refuser à cette "gamme Wasser" d’appartenir à la marque Guerlain ?". Étayons le propos : sur les 800 et quelques parfums sortis par Guerlain depuis 1828, pensez vous qu’ils se ressemblent tous par la Guerlinade ? J’ai du mal à y croire. En revanche, et c’est ce que je disais à Nymphomaniac, les parfums sont facilement classifiables selon leurs papas (et quelques mamans). La parfumerie de Jacques est très différente de celle de Jean-Paul (pour faire court, Jacques est dans l’étude de l’équilibre, de la structure et de la délicatesse des nuances là où Jean-Paul est un parfumeur de l’overdose texturée, de la matière habillée), ils ont écrit tous les deux une importante part de l’histoire de la marque avec des parfums facilement reliables entre eux (Shalimar - Habit Rouge en tête) mais d’autres beaucoup plus difficiles à lier (existe t-il un lien direct entre Après L’ondée et Vétiver ? Hormis dans la note épicée du départ, c’est déjà plus difficile selon moi). Refuser à Wasser cette légitimité me semble injuste, surtout quand on lui reconnaît une écriture.

Quant à l’art et la matière, elle est finalement intéressante dans ce débat. C’était la collection exclusive lors du creux de Guerlain (en gros, milieu des années 2000), quand ils n’avaient plus de parfumeur maison. L’idée c’était faire appel à plusieurs parfumeurs différents pour leur demander d’interpréter une matière clef de la maison. Forcément, tous les parfumeurs n’ayant pas réfléchi 150 ans sur le style Guerlain à travers les âges (on n’enseigne pas l’histoire de la parfumerie d’un point de vue esthétique en école de parfumerie), on obtient certaines choses franchement caricaturales (pas forcément mauvaises !) mais finalement intéressantes car soulignant le fait que l’écriture Guerlain serait quelque chose à s’approprier, dans laquelle insuffler sa propre esthétique (et là je vous invite à relire ce qui s’est dit sur Bois d’Arménie avec Nymphomaniac).

À bientôt.