Quel parfum portez-vous ?
par Petrichor, le 27 février 2024
"Shocking" extrait d’Elsa Schiaparelli. 3 petites gouttes, mises hier sur le tissu de ma manche. J’apprends à le doser, pour peut-être sortir un jour avec.
Cette fois, "Shocking" est civilisé.
Son accord de tête a débuté par une transition "rose rouge - bonbon - œillet". Il s’est prolongé par un cœur "rose jasmin à la "Joy" - foin du narcisse - animalité du miel". Là il atterrit rondement sur un fond chypré ambré, réchauffé par d’autres notes animales. Pour le fond, on est entre "Vol de nuit" extrait, et "Antilope" extrait de Weil.
("Antilope" est une sorte de "Calèche" d’Hermès, dopé avec plus de civette et de castoreum. Les frères Weil vendaient des manteaux. Dans leurs parfums, ils assumaient de mettre le nez dans la fourrure).
Sur la fin, "Schocking" finit par ressembler à ma propre odeur corporelle, je ne retrouve plus la délimitation. Sur ce point, il me rappelle "Musc Koublaï Kahn".
Parfois, "Shocking", c’est la fête du slip.
Quand j’ai reçu le petit flacon, au moment où j’ai testé le parfum, le joint d’étanchéité est parti en miettes. J’ai réussi à transvaser son contenu, non sans avoir taché des mouchoirs en papier.
En sur-application, le miel et la civette ont court-circuité le parfum. Le miel s’est mis à sentir la salive et le phénol. Civette, ambregris, castoréum et aldéhydes ont fusionné pour sentir la culotte sale. Tâche de pipi, drap après une nuit de noce, et fumerolles cuirées.
Le narcisse et l’œillet -la rose et l’huile essentielle de clou de girofle- se sont transformés en cognac flambé. Les accords floraux rétros ont cessés d’être sages. Les fleurs se sont transformées en pétroleuses, en Melissae qui essaiment le feu, se recroisant souvent autour de leur facette gasoil.
Crasse et classicisme. Habits de luxe et exhibitionnisme. Essence et inflorescence. Liberté saisie et vie consumée. "Shocking" est traversé par une beauté insurrectionnelle et joyeuse.
"Shocking" fonctionnement donc étrangement mieux quand on en met plus. On cesse de détecter les notes sales individuellement, elles gagnent une cohérence abstraite dans le maelstrom qui lui sert de sillage. À la manière de Mae West, qui a inspiré cette création, on peut faire dire à cette fragrance "Quand je suis bonne, je suis très bonne, mais quand je suis mauvaise, je suis encore meilleure".
(Merci à Anatole Lebreton et son blog civetteauboisdormant, sans qui je n’aurais pas osé acheter ce flacon à l’aveugle. Ce flacon aurait pu contenir un simple liquide coloré. Mais j’ai été vite rassuré en le débouchant, vu la bête.)
(Je me surprends à trouver des héritages de "Shocking" : dans l’accord de tête et de cœur du premier "Voile d’été" de Mathilde Laurent pour Guerlain (rose façon sirop de grenadine, en contrepoint d’un œillet très sec, sur un fond poudré boisé qui sent la brique rouge cassée et les canicules) ; dans "Ce soir ou jamais" d’Annick Goutal (Rose narcisse et miel évolue au fil de l’effet de l’ambrette : alcool de poire en tête, salive en cœur, et note animale végétale en fond) ; dans "Tabac tabou" (miel, narcisse, aldéhyde propre, cuir, et évidement du tabac) ...)
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