Black
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Compositrice de fragrances indépendante et rédactrice pour Nez, la créatrice nous explique comment le parfumeur se joue de notre odorat avec sa palette.
il y a 22 heures
Bonjour, Merci pour votre retour. Je n’ai malheureusement pas l’occasion d’aller à la capitale.(…)
Lavande délavée
Église en flammes
Fraîcheur souterraine
Salut Jeanne.
L’équipe de l’Olfactorama et moi-même sommes enchantés si nous parvenons encore à surprendre un peu en "prescrivant" un parfum à LA pointure que tu es... ^^
Je te rejoins presque totalement dans ton ressenti à propos de ce parfum dont la description est, comme toujours, excellente.
En fait, le seul petit point de divergence est que je perçois, moi, dans le noir, des zébrures jaunes et orangées qui transforment le "black" en "brun". Mais, à cela près, je suis totalement d’accord.
Ce que tue révèles très bien c’est ce côté que certain(e)s, dont moi, comme toi, ont pu avoir : "Oh, encore un boisé - encens chez Comme des Garçons, juste le quoi, le 20ème d’une collection de plus de 60 parfums ?"... Une sorte de lassitude face à la marée "marasmatique" des lancements. Puis, on découvre que, parfois, prendre son temps et oublier ces quelques préjugés dus à la lassitude, vaut vachement le détour (parfois hein ? ! ??!).
Black ne "dépote" pas tant que cela. Il serait même en retrait en termes de puissance par rapport à des tanks de la même marque des années 90 - début 2000. Il ne dépote pas non plus tant que cela par rapport à l’ultra fumé de l’extrême Bois d’Ascèse. Mais, comme tu le décris très bien à la fin de ton article, ici, ce n’est pas la recherche de la performance arty expérimentale, mais le résultat qui "réussit l’exploit d’être hautement qualitatif, complexe, mais merveilleusement équilibré et abouti, et de ne tomber ni dans le boisé masculin caricatural ni dans le cliché du parfum de niche extrême impossible à porter". Tu as tout résumé. #lamesseestdite
Testé rapidement sur touche vite fait, il m’a eu l’air joli, pas franchement davantage peut-être, mais au moins joli.
Mais, il en est tout autrement si on prend le temps de le tester.
Senti les deux premières fois à la va vite, il m’a plu sans me marquer. Testé attentivement lors d’une séance de travail de l’Olfactorama, il m’a tiré des larmes.
Comme je l’ai expliqué à quelques personnes, Black sent la cuisine de ma grand-mère, avec son âtre au feu de bois, ses placards en vieux bois usés, il sent les intérieurs des épiciers de l’époque. Des épiciers comme je crains peu de lectrices et lecteurs sauront s’identifier car ces épiceries là n’existent plus depuis longtemps. Des épiceries où tout s’achetait à partir de grands sacs de 50 kilos en toile de jute ou en carton, dont on transvasait les contenus dans des emballages bricolés en papier - carton : farine, sucre, café (chicorée), épices (sel, poivre, piment rouge moulu), salinité de l’éternelle morue (eh oui, elle existe/ait vraiment ! ^^). Le tout posé sur des comptoirs et dans des armoires ouvertes en bois usés par le temps. Tout cela était très odorant. Tout embaumait, les odeurs déplacées diffusaient bien davantage qu’aujourd’hui, surtout sous le soleil en plein été.
A la manière de Sables qui m’a également forcé à un retour en arrière au Portugal lors des retours de la plage, ici, ce sont les moments des courses une fois par semaine et l’odeur de la cuisine de ma grand-mère qui ont été activées sans appel à la conscience par Black qui - en sentant l’encens, les bois, les résines et la réglisse qui rappelle souvent l’immortelle - façonne une foultitude d’images et d’odeurs.
Le même choc de l’imprévu, le même bouleversement du parfum qui est davantage qu’un produit odorant : en fait, une machine à remonter le temps.
Alors, car l’émotion était très forte, je me suis pondéré pour mon vote personnel cette année et ai fait le choix de ne pas voter pour le somptueux Black mais pour le magnifique Mito Voile d’Extrait qui avait l’avantage ou l’inconvénient pour lui, je ne sais plus si c’est un bien ou un mal, d’être beau sans être aussi évocateur. Par volonté de tentative d’objectivité au moins partielle, j’ai préféré voter pour l’évocation de ce jardin que je ne connais pas plutôt que pour ces évocations presque trop nombreuses d’un passé oublié.
Mais, indéniablement, Black est un superbe parfum, en soi, pour son odeur, sa "gestion de la radicalité", son compromis de l’extrême.
Il restera l’un des souvenirs marquants de cette année 2013 !
Merci pour l’article au top Jeanne. ;-)
A très vite.
Opium