Parfumeurs de demain
par Sun Jae, le 29 octobre 2013
Cher Jicky,
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J’arrive comme la cavalerie, après tout le monde, pour te féliciter pour ce choix de carrière qui n’a pas l’air facile. J’ai lu le livre de J-C Ellena pour la collection Que sais-je il n’y a pas longtemps, et le moins que l’on puisse dire est que devenir nez est un chemin semé d’embuches mais aussi riche en aventure. Je te souhaite donc tout le courage nécessaire et une bonne petite dose de civette bien pure et odorante pour ton choix de carrière.
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Pour répondre à ta question "comment verriez-vous le métier du parfumeur de demain" (qui est une question piège vu qu’elle renferme en elle une foultitude d’autres questions), je dirai les choses suivantes :
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Connaissances en chimie
J’aimerai, comme déjà dit précédemment, que le parfumeur de demain maîtrise la chimie aussi facilement qu’il enfile son slip le matin. De cette manière, il sera peut-être en mesure de décortiquer encore mieux les divers composants des matières premières devenues interdites afin de les restituer le plus fidèlement possible. De là, en découlera :
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Respect des formules anciennes
Que les parfums subissent des remaniements ou des reformulations semble être devenu la norme. A tort ou à raison, je ne sais pas. Cependant, je pense que si ma Mamy était encore ce monde, elle aurait du mal à reconnaître son Arpège (ma mère ne l’a pas reconnu). Pour moi, le parfumeur de demain devra être capable de reproduire un parfum disparu (ou reformulé) en collant au plus près au modèle original. Si il veut en faire une variante, très bien, mais qu’on arrête de prendre le consommateur pour un branquignol et que l’on renomme aussi le produit dans ce cas (Revenge of Arpège, genre)
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Création et innovation
En tant que chimiste chevronné, j’aimerai que le parfumeur de demain découvre de nouvelles molécules afin de créer des parfums encore jamais senti. Qu’il innove et ose se lancer dans un produit qui peut-être ne sera jamais un best of, mais qui restera portable tout en étant hors norme. Ce qui nous amène au :
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Marketing
Ne nous leurrons pas, le parfumeur de demain (et même d’aujourd’hui) ne peut plus rien faire sans un département marketing. Cependant, le marketing devrait travailler plus en symbiose avec le parfumeur, et non pas lui dicter ses actes. Que des jus comme LVEB, Invictus ou Si sortent, très bien. Ils cartonnent, ils atteignent leur cible (le nombre de mes amies qui trouvent Si ou LVEB sont « vraiment joli et élégant »), ça fait katching dans les comptes en banque. Mais n’oublions nous pas, nous en tant que G.I. ou Navy Seals des parfums, que le nez s’éduque, et que pour la moyenne des civils au pif aussi fin qu’un sein de Nabila, Si ou LVEB sont de beaux parfums qui plaisent vite et bien. Ce que la société veut de nous en tant que consommateurs en fait. Le parfumeur de demain devrait pour moi, être capable de créer un parfum « de masse » qui plaira à tous : le département marketing et financier qui se frottera les mains, les civils qui ouvriront un cadeau de Noël parfumé avec le sourire, et les membres du SWAT Parfum qui y trouveront un parfum accessible et en même temps fin et racé (cela dit, je trouve que ce tour de force a été réussi par Mathilde Laurent et sa splendide gamme Baiser Volé, mais je ne sais pas où se situe ce parfum sur l’échelle des best of/rentabilité).
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En ce qui concerne la question « Quel statut pouvoir donner aux métiers de la parfumerie pour que la situation aille de nouveau de l’avant ? », je dirai qu’il faut reconnaître la parfumerie comme un art à part entière. Je pense cependant que les parfums étant considérés pour beaucoup comme produits de luxe (ce qui est vrai, quand on a pas beaucoup de sous, le commun des mortels va plutôt s’acheter de quoi se sustenter ou de quoi se vêtir plutôt qu’un parfum), beaucoup de personne s’en détourne. Et comme beaucoup de choses, la passion ou l’intérêt pour les parfums est très subjectif, tout comme l’art. Du coup, le parfum est fort lié à l’argent (cf marketing), ou rn tout cas c’est comme ça que je le vois. Le parfumeur de demain devrait être en mesure de pouvoir concilier cet aspect peu reluisant qu’est la finance, avec le côté artistique du parfum (bonne chance gars !). Bien sûr les parfums de niche n’obéissent pas tout à fait aux mêmes règles que les grandes marques (mainstream ou pas), mais on ne doit pas non plus se leurrer : si le parfum ne plait pas, on ne l’achète pas, et donc pas de rentrées d’argent pour continuer.
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Voilà mes 2 cent résumés en vrac parce que ça se bouscule un peu dans ma tête en ce moment :p
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