Les parfums de la honte

par Farnesiano, le 28 octobre 2013
Jeune adolescent, j’étais entré dans un supermarché pour acheter, en cachette de mes parents, le célèbre Brut de Fabergé, contenu à l’époque dans un étroit flacon en plastique vert. Un jour que je faisais de l’auto-stop pour descendre en ville après m’être préalablement aspergé d’une quantité incroyable de cet after-shave qui agissait sur moi comme un philtre d’amour (narcissisme de l’adolescence), je suis embarqué dans une voiture dont les occupants n’étaient autres que des amis de mes parents et leur trois enfants. Coincé avec ceux-ci sur la banquette arrière, j’ai dû " dégager " comme jamais dans ma vie. En plus, c’était l’été et il faisait une chaleur épouvantable dans cette voiture dont je ne souhaitais qu’une chose : m’échapper. Je voyais les mines se renfrogner et j’ai senti ma propre gêne contaminer les cinq voyageurs. Embarrassé d’empester tout le véhicule par les émanations de mon philtre devenu subitement si peu magique (et qui était censé me donner de l’assurance), j’ai dû rougir comme rarement depuis. Aujourd’hui, j’aimerais re-sentir ce parfum populaire, puissant et presque vulgaire, mais qui m’avait cependant enchanté à l’époque. Ses nombreuses reformulations l’ont complètement défiguré... Pas une grande perte finalement.
La honte de s’asperger à l’excès... Paris, il y 4 ou 5 ans, je sors d’une boutique Caron, les vêtements complètement imbibés de Narcisse Noir, Royal Bain, Acasiosa, En Avion, Poivre et Tabac Blond : une vraie " fontaine " à moi tout seul ; et j’entre ainsi dans une rame de métro bondée. Plusieurs têtes se tournent dans ma direction, sans doute à la recherche d’une cocotte à la Odette de Crécy, pour finalement se rendre compte qu’à la source de ces puissants effluves fleuris où l’oeillet dominait tout, il y a un homme. Mais pourquoi pas ? Ma gêne ne survint que deux ou trois stations plus tard quand entra et se posta à côté de moi, debout près de la porte, un jeune écrivain dont j’admire le grand talent ainsi que l’interprétation de son propre rôle d’enseignant dans un film adapté de son plus célèbre roman : Entre les Murs. L’écrivain, suffocant, poussa un grand soupir d’exaspération. Il descendit dès la station suivante qui s’avéra être également la mienne. Je ralentis le pas pour ne pas lui donner l’impression que je voulais le suivre et surtout pour ne pas l’empester davantage. J’avais tant envie de le féliciter pour son oeuvre. Pauvre François Bégaudeau que j’avais emprisonné dans les sillages surpuissants de mes trop nombreuses fragrances. Entre les murs du Parfum...
Quelques parfums de la honte ou que je n’oserais plus porter aujourd’hui : 4711 qui me rend malade et sent la maison de repos qui ne voudrait pas sentir mauvais ; Blazer d’Anna Klein et Monsieur de Rauch qui font vieux monsieur endimanché ; Drakkar Noir que j’ai reçu en cadeau autrefois et porté un moment ; les premiers Paco Rabanne et Versace pour homme, toujours disponibles mais maintenant ringards ; Sicily de Dolce et G, cet ensorcelant aldéhydé vaguement oriental que j’ai adoré à sa sortie voilà presque 10 ans mais que je trouve aujourd’hui trop synthétique ; Kouros, création géniale mais tellement vulgarisée qu’on n’oserait plus le porter ; Cardamome et Lavande de Berdoues ; la dernière violette de chez Caron, mauvais bonbon...etc
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