A World Tour Through Scent : un tour du monde olfactif et photographique
par Anne-Sophie Hojlo, le 20 septembre 2018
Une exposition réunissant des parfumeurs de la maison de composition Symrise, des photographes du collectif Tendance Floue et des auteurs de la revue Nez dresse une cartographie culturelle de l’olfaction.
Une mosaïque de rectangles d’un cyan qui attire l’oeil. En dégradé de bleu, on y distingue des silhouettes de plantes tantôt aux tiges arachnéennes, tantôt aux feuilles plantureuses. Un herbier à la fois minimaliste et onirique. « Comment traduire de manière visuelle quelque chose d’aussi immatériel que le parfum ? Je suis parti de l’idée que ce dernier est une empreinte olfactive, et j’ai choisi d’utiliser le cyanotype, une vieille technique du XIXe siècle, pour exprimer cette analogie de l’empreinte », explique le photographe Thierry Ardouin.
Bienvenue à l’exposition A World Tour Through Scent, dont le vernissage ouvrait mardi soir l’édition 2018 des Rives de la Beauté. À l’initiative de ce projet pluridisciplinaire, la maison de composition Symrise, associée à Nez, la revue olfactive et au collectif de photographes Tendance floue. Pendant les premiers mois de l’année 2018, 13 parfumeurs Symrise, accompagnés à chaque fois d’un journaliste de Nez et d’un photographe, ont sillonné 11 pays, du Mexique à Singapour, du Japon aux États-Unis, en passant par la France, la Chine, l’Espagne ou l’Inde. L’objectif de ce périple ? Explorer les relations nouées avec le parfum et les odeurs à travers le monde, et traduire cette cartographie subjective et culturelle de l’olfaction en images, en textes et en odeurs. « L’intérêt de la démarche était de croiser les disciplines : vivre une expérience d’immersion collective et exprimer la même idée via trois médias, en mettant l’accent sur la proximité des process d’un domaine à l’autre, et en valorisant la créativité et la subjectivité de ces regards », souligne Mathieu Chévara, fondateur de l’Atelier Marge Design, directeur artistique du projet… et cofondateur de la revue Nez.
Les cyanotypes de Thierry Ardouin sont ainsi nés au Brésil - « plus précisément dans la salle de bain de ma chambre d’hôtel, car on était en pleine saison des pluies ». Le photographe est parti à la rencontre de deux communautés de chasseurs-cueilleurs au plus profond de la forêt amazonienne, en compagnie du parfumeur Isaac Sinclair et de la journaliste Sarah Bouasse (Flair). A la clé, une plongée dans un vivier unique de formes, de couleurs et d’odeurs.
C’est celle du cacao qui a retenu l’attention d’Isaac Sinclair pour créer la composition baptisée Candy. Mais un cacao 2.0 grâce à un nouveau procédé d’extraction qui permet de capturer les molécules odorantes les plus volatiles des matières premières. Résultat : un cacao beaucoup plus proche de la fève fraîche que l’absolue traditionnellement utilisée. Enveloppé de notes épicées et de fleurs blanches crémeuses, il donne naissance à un accord gustatif de nouvelle génération.
Changement radical de décor à l’autre bout de la galerie. Nous sommes toujours dans la forêt, mais celle-ci, ténébreuse et austère, se couvre de neige, dans une atmosphère de conte mi-féérique, mi-inquiétante. La région d’Holzminden, en Allemagne, accueille la maison-mère de Symrise, mais a aussi inspiré les frères Grimm. Sous l’œil du photographe Pascal Aimar, les alignements rectilignes d’épicéas qui hérissent les abords de la ville font écho à l’enchevêtrement de cheminées et de tuyaux courant autour d’une usine. De ces géants à la silhouette impressionnante, on peut extraire une des matières premières synthétiques les plus anciennes, et sans doute la plus universellement aimée et utilisée de la parfumerie, la vanilline.
C’est ce paradoxe qui a inspiré les parfumeuses Leslie Gauthier et Marine Ipert pour leur création Once upon a time. La vanilline y est habillée de notes vertes (galbanum, jacinthe, noisette verte) et boisées-fumées (cèdre et bois de gaïac) en souvenir de la forêt dont elle est issue.
Quelques pas plus loin, nous faisons étape à Dubaï. Mégalopole à la pointe de la modernité et à l’atmosphère futuriste, elle est aussi riche d’une tradition séculaire du parfum. « Ce qui a guidé notre travail là-bas, c’est l’habitude du “layering” : la plupart des femmes portent un attar sur les poignets et derrière les oreilles, font brûler du bois d’oud dans un bakhoor pour imprégner leurs vêtements de la fumée, et peuvent ajouter un parfum occidental pour terminer », détaille le directeur artistique Mathieu Chévara. Cette superposition, on la retrouve dans l’architecture de la ville vue par le photographe Gilles Coulon : « Des couches et des couches de béton et de bâtiments, que j’ai pris au téléobjectif pour écraser les perspectives. »
Silver smoke, du parfumeur Pierre Guéros, qui a travaillé plusieurs années à Dubaï, traduit cette profusion et ce contraste entre héritage et futurisme. Des notes orientales classiques (rosées, boisée, oudées) y sont facettées par un effet métallique pour apporter une touche plus contemporaine.
Exposition A World Tour Through Scent
Photos : Romain Bassenne, Atelier Marge Design
Les Rives de la beauté (Facebook)
du mercredi 19 au dimanche 23 septembre de 11h à 19h
Galerie Joseph
16 rue des Minimes 3e
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Coffret A World Tour Through Scent
12 livrets, 12 parfums, tiré à 800 exemplaires
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