Auparfum

L’obscurantisme des parfums

Opium

par Opium, le 13 mars 2013

Bonsoir à toutes et à tous
Salut Koimynose, je vais réagir à l’un de tes commentaires. (Précision : Il me semble que même si tu as les boutons, il ne sert à rien de noter les discussions, on ne peut les évaluer, seuls les parfums peuvent l’être...)

 

Comme toujours, tes interventions son ultra-pertinentes...
Merci à toi aussi pour tes conseils super judicieux !
Je repars de la "gauche" pour commenter car je vais être long (autant annoncer la couleur tout de suite !).

 

Et, j’ai pas mal réfléchi à ton commentaire à propos des formes de "mystifications" que le parfum, ou son discours, peut parfois prendre...
Il y a quelques semaines, j’ai proposé un sujet à propos de cela à Jeanne. Puis, on s’est dit qu’en ce moment sur auparfum on souhaitait être assez positifs, pas juste chanter des "Requiem". Mais, un sujet ensuite pourrait venir, on verra.
Je peux déjà réagir ici, c’est un peu le lieu pour après tout. Luttons contre certains "obscurantismes" donc... ;-)

 

Pour répondre à la question initiale de Jeanne sur ce que j’ai découvert qui était obscur, c’est que parfois, en fait, les choses ont l’air claires et limpides et ne le sont pas. Que "l’obscurité" est à peu près partout, même si elle peut être répandue de bonne foi.
En fait, j’ai appris à me méfier surtout.

 

A chaque lancement, on nous présente un produit "Génial !", "sensuel", "classe"... Et patatis et patatRas !
C’est normal que les gens qui communiquent sur un produit le fassent, à la manière d’un photographe, sous son meilleur angle.

 

Koimynose parle gentiment encore de "mystification", j’aurais plutôt envie, parfois, de parler "d’impostures" (pour rester poli et ne pas parler "d’arnaques")...
Je vais tenter d’être clair avec trois exemples...

 

Les accords floraux et autres matières et noms évocateurs qui font rêver seront la première démonstration. Normal de choisir de parler de "jasmin" plutôt que "d’acétate de benzyle", "d’Hédione" etc, cela fait moins rêver. En revanche, là où il y a presque imposture, c’est quand on vante ce jasmin comme "lumineux", "beau", "féminin" (et la synthèse le fait ainsi, donc, jusque là, à nouveau, pas de problème) mais aussi "naturel"... Alors que la part de "jasmin naturel" est de maximum 02 %, voire 0,5 %, voire même de rien du tout ! Là, il y a au moins "mystification".
Le problème ce n’est pas la synthèse, c’est de poursuivre l’illusion du "naturel comme mieux" alors que, en plus, il y en a très peu, voire pas du tout, dans le flacon ! Une marque et son jasmin célèbre est en train de mettre ce type d’accord à peu près dans tous ces flacons avec un discours que je trouve, personnellement, assez prétentieux en ce qu’il est, pour partie, presque mensonger.

 

Une quadruple "mystification" est, aussi, le oud.
On nous vante un produit naturel merveilleux rare et recherché dont je ne pense pas que les gens se fassent une vraie idée de ce dont il s’agit...
- Naturel est le oud. Une moisissure naturelle, une maladie d’un arbre. Mais, il vaut mieux ne pas trop insister sur ce point, ça, ça ne fait pas rêver.
- Un produit "riche", "intense" et "profond". C’est vrai ! Il pourrait se substituer aux matières naturelles animales en apportant ces qualités olfactives, en même temps que de la diffusion et du sillage ; un peu comme la civette ou le musc tonkin naturel en somme. Donc, en parfumerie, son intérêt est très réel. Mais, justement, s’il s’agit de "matières animales", cela peut, probablement, sentir... Revenons aux qualités olfactives de la matière. Elles se situent dans un specte large allant du pansemenrt purulent, de la plaie et de son désinfectant type bétadine, en passant par le bois, le cuir, une certaine fécalité et un formage du Cantal chauffé au soleil. Ça, ça ne fait pas rêver ! "Riche", "intense", "sensuel", oui... Et, en le manipulant, le oud peu devenir tout cela. D’où son prix. Mais, il vaut mieux "mettre sous le tapis certains éléments sales"... De la pudibonderie en somme. Il en est souvent quand on cherche à décrire les matières animales, pour ne pas rebuter, on arrondit les angles, au risque d’être "à côté de la plaque" !
Ai-je senti du "vrai" oud ? Je n’en sais rien puisque la matière n’est pas normée. Il n’y a pas de fiche d’identité de cette matière. Mais, des différentes "souches" testées, ce qui est parfois décrit ressortait plutôt bien.
- En outre, ce que l’on vend le plus souvent pour du oud, ce sont des reconstitutions synthétiques puisqu’il n’y pas de norme, à peu près tout ce qui "pue fort" pourrait en être... Mais, de quels types de composants s’agit-il ?
- Des crésols (qui peuvent sentir la sueur de cheval, une "haleine au camembert" pour moi), des indoles peut-être, des "bois qui piquent" envahissants et vrillent les narines comme le Karanal (si vous avez été dans un lycée, vous savez de quoi je parle, 1 Million autrement dit et ses "p’tits copains"), le tout boosté par des muscs ambrés qui diffusent à mort et sont plus ou moins animalisés pour créer la sensation de "plénitude" et "richesse" du résultat final. Plusieurs sociétés de composition ont ainsi recréé leur oud et possèdent une base reproduisant une reconstitution de oud. Plutôt réussie parfois d’ailleurs. C’est surtout ce type de composition qu’il y a en lieu et place du naturel tant désiré...
Et voilà comment on vend du luxe pour :
1 - une matière naturelle luxueuse et noble, mais qui est une maladie, une moisissure, ce dont on ne doit pas parler dans l’univers "de la beauté" ;
2 - une matière très utile mais "sale", ce dont on ne parle surtout pas pour ne pas faire fuir...
3 - souvent reproduite artificiellement, et...
4 - en plus, dans ce cas, souvent à moindre coûts avec des matières cheap que l’on dénigre quand il s’agit d’autres parfums alors que, là, l’effet est assez similaire et alors que l’on va vous parler de "richesse" à ne plus savoir qu’en faire...
Je ne peux que vous conseiller de lire la très vive et intéressante critique à propos du oud de ce blogueur sur les parfums qui est génial et a souvent un ton franc et sincère ! Son site est jouissif, c’est drôle et très pertinent ! (Lui, au risque de déplaire, se sert des "vrais" et "justes" mots...) ;-)

 

Enfin, revenons à ces "bois qui piquent". On vous dira souvent en parfumerie que le premier d’entre tous, 1 Million, est un sommet de vulgarité. Je ne reviendrai pas sur ce point. Le souci que j’ai, c’est quand on "démonte" ce parfum pour en proposer une copie, tellement mieux car plus chère et moins acessible. Plus snob en somme ! J’en ai deux exemples en tête qui sont sortis en niche, dont un "Bois... Sombre" d’une marque connue pour sa tubéreuse historique... (Jicky : Inutile de dire de qui il s’agit, je sais que ça te démange en me lisant... ;-) Enfin, fais comme tu veux... ^^)
C’est que le 1 Million que l’on conspue était novateur, soit, il est vrai par la seule surpuissance qu’il avait, mais novateur lors de sa sortie tout de même. A son lancement, il marquait les esprits et continue toujours de le faire ("pour le meilleur et pour le pire").
Prenez une fragrance "bof" (au rendu surpuissant, criard, mais envahissant, statique, et monolithique) mais un "bon" voire un "excellent" parfum qui a su cibler le public et arriver au "bon" moment, et vous obtenez une nouvelle référence, ce que 1 Million est devenu en moins de 5 ans. La référence du nouveau boisé-ambré "décomplexé" qui s’affirme haut et fort avec son effet de "sciure de bois sèche et synthétique" qui entre dans les narines coûte que coûte.
J’espère, juste, qu’avec un profil olfactif fragrance/parfum équivalent au féminin, LVEB ne deviendra pas le prochain maître étalon du parfum "féminin décomplexé" lui aussi... Mais, il est bien parti pour ! Bref.
Le succès de 1 Million et mon avis dessus n’est pas le souci : ce qui en est un, c’est de dénigrer ce produit car "cheap", "bling bling" et "racoleur" pour vendre la même chose ré-enflaconnée dans une version plus chère. Parfois, en mettant la mention "Oud" simplement sur le flacon et en rajoutant de la dorure. Comme quoi, les sujets se rejoignent. #toutsetient
Voilà encore une "imposture" tiens... ;-)

 

En espérant que cela nourrisse ce sujet passionnant de Jeanne et, peut-être, que cela invite un peu à la réflexion.
Mais, la parfumerie reste avant tout un bel objet. Du rêve souvent. Du transport. Simplement, parfois, certains réécrivent un peu l’histoire...
Bonne soirée.
Opium

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