Auparfum

Le 15

Farnesiano

par Farnesiano, le 27 avril 2019

Chère Adina, puisque vous évoquez la tubéreuse, je vais vous avouer qu’un rapport amour/gêne a toujours caractérisé ma relation avec cette fleur qui, reconnaissons-le, n’est pas une fleur ordinaire. Pour moi synonyme de menace d’envoûtement, voire d’ensorcellement, je perçois son parfum comme dangereux... Y a-t-il odeur plus capiteuse ? Il m’aura fallu des années avant de pouvoir l’apprécier. Ma première rencontre fut celle de Fracas qu’une actrice d’une petite troupe théâtrale locale portait avec " ostentation " et en overdose à tel point qu’à chacun des passages de la dame en question à la bibliothèque où je travaille, le vaste lieu s’imprégnait durant de longues heures de ce sillage aussi puissant qu’opulent, aussi fatal que luxueux, et qui me montait à la tête, et qui me piquait les narines. En même temps, j’aimais l’ivresse maladive que me procurait le passage de cette belle dame rousse, souvent vêtue de manteaux au large col en fourrure. Je ne sus que bien plus tard qu’il s’agissait de la tubéreuse, et du célèbre parfum de Robert Piguet. On était loin du muguet, de la rose ou du freesia. La marque Vinolia qu’affectionnait ma mère proposa-t-elle jamais des savons à la tubéreuse ? Au gardénia peut-être. A chacune de mes rencontres avec la tubéreuse, j’ai quelque peu suffoqué tant son parfum est fort et entêtant, mais j’étais séduit, comme je le fus par exemple avec un Kenzo Jungle. Depuis, la fleur m’a apprivoisé et je l’ai domestiquée sans toutefois avoir jamais osé la porter. Des tubéreuses aussi différentes que celle d’Annick Goutal, ma préférée, extraordinaire de verdeur terreuse, presque masculine, mais mille fois hélas ! supprimée, celle toujours charmante des Jardins de Bagatelle, celle plus délicate de Narcotic Venus de Nasomatto, la White Tubéreuse de Réminiscence avec sa pêche juteuse, la tubéreuse boisée, baumée et orientalisante d’Adjatay de The Different Company, celle verte, mouvante, à la fois sombre et fraîche, et tellement intrigante (joue-t-elle à cache-cache ?) de la devenue culte Nuit de Bakélite et celle de Caron que je recommande chaudement ... Toutes ces tubéreuses m’ont désormais conquis. J’avoue ne pas avoir exploré attentivement la Criminelle de Lutens et la Carnal Flower des Editions Malle, et tant d’autres, mais ça viendra ! En attendant, j’ai fait la découverte récemment de celle très fleurie, souriante, réconfortante et d’une classe sans artifices, du parfum New York de la marque belge namuroise NezZen : fleur d’oranger et soupçon de rose en tête ; tubéreuse et jasmin en cœur ; muscs blancs et ambre gris en fond, avec omniprésence durant l’évolution, de la " terrible " fleur.
Alors tubéreuse dangereuse ? Rime riche peut-être mais association trop facile.
Bon week-end !

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