Auparfum

Tuberosa, Mimosa et Ambra : les « Signatures » de Jean-Claude Ellena pour Le Couvent

par Jessica Mignot, le 7 juillet 2021

Pour cette nouvelle collection Signature, le directeur artistique de la marque, Jean-Claude Ellena, prend les rênes de la composition, et rend hommage, après plus de 45 ans de métier, aux matières naturelles.

La maison de parfum, rebaptisée Le Couvent en 2018, proposait jusqu’alors trois gammes : les Colognes botaniques, pensées comme des « promenades olfactives » dans les jardins ; les eaux de parfums Singulières, « dans la lignée du bestiaire du botaniste royal Louis Feuillée » ; et les eaux de parfums Remarquables, « une invitation à la découverte d’autres lieux, d’autres horizons ».
Grâce à cette multiplicité de collections, la marque souhaite ainsi offrir une liberté de choix aux passionnés, tout en se centrant sur son identité, celle de la sérénité d’une « nature sublimée » dans des formules simples, essentielles et lisibles.
Depuis 2019, chacune est conçue sous la direction de Jean-Claude Ellena, qui évoque le plaisir de la transmission, lui permettant « d’être en contact avec de jeunes et moins jeunes compositeurs, d’avoir des échanges de parfumeur à parfumeur. »

Mais la nouvelle collection Signature est née du désir de retourner à son métier premier, de la formulation à la pesée des ingrédients, qui induit un tout autre rapport à la création : « comme compositeur de parfums, je conçois la création comme un acte égoïste, aussi mon exigence est autre puisqu’elle m’expose », explique-t-il.
Un désir qui s’explique par la redécouverte des matières premières naturelles, car si Jean-Claude Ellena les a toujours utilisées, il reconnaît qu’il leur préférait les produits de synthèse :
« Les produits de la nature, par leur complexité, s’imposaient et ne laissaient pas de place à l’imaginaire qui ne sait et ne peut s’exprimer que par une mise à distance. L’orange parlait d’orange, l’angélique d’angélique et la rose de rose, alors que les corps de synthèses ne disaient presque rien, aussi il était aisé de m’ajouter à leur bavardage et leur faire dire ce que je désirais. »
Mais avec le temps, ce regard sur le naturel s’est modifié, débarrassé de ses conceptions initiales. Une redécouverte dont il a d’ailleurs souhaité rendre compte dans son Atlas de botanique parfumée, publié en octobre 2020, et par ces trois parfums pour Le Couvent. Fabriquées en France et contenant jusqu’à 84% d’ingrédients d’origine naturelle, ces nouveautés se veulent qualitatives d’un point de vue de la matière, mais également du style.

Tuberosa est né de la redécouverte de cette fleur classique de la parfumerie, non plus à partir de son extrait, mais de la plante elle-même, que le parfumeur a cultivée dans son jardin. Une odeur qui se dit comme un conte, qui s’offre à la tombée du jour et chante pendant quelques heures avant de s’éteindre à nouveau, telle une Shéhérazade faite fleur : « C’est surprenant, car soudain. Chaque jour, à une heure précise, la fleur émet des notes fruitées de pêche qui deviennent musquées, sucrées, enveloppantes puis épicées entre clou de girofle et noix muscade, celles-ci s’évanouissent au profit de la vanille et de l’héliotrope et se terminent vers minuit. »

Le Mimosa, souvenir de la première rencontre de Jean-Claude Ellena avec Edmond Roudnitska qui en avait évoqué l’odeur fine et poudrée, est également l’odeur de Cabris, ville bien connue du premier, et évoquée par Albert Camus dans sa correspondance avec Maria Casarès : « La route chemine en plein ciel au milieu d’un immense panorama, et de pentes qui croulent sous les mimosas. Je suis rentré avec des taches jaunes dansant devant les yeux et un tourbillonnement de lumière en moi ». Pour composer ce parfum léger, doux comme un souffle velouté, le parfumeur a utilisé de la bergamote d’Italie, de l’absolue de mimosa du Maroc et du cèdre des États-Unis.

Enfin, Ambra reprend le thème traditionnel qui mêle la vanille au labdanum, mais dans une volonté de lui faire dire quelque chose de différent. Jean-Claude Ellena évoque l’idée d’un « ambre corse  » chaud et épicé, qui marie l’accord classique avec l’absolue d’immortelle française et la bergamote d’Italie.

Parfums, 16 euros/ 10 ml, 139 euros/ 100 ml
Disponibles en septembre 2021 chez Marionnaud, Printemps-Haussmann, Galeries Lafayette, BHV, Samaritaine et sur le site de la marque

Premières impressions

Le départ de Tuberosa est médicinal, amer, puis elle se fait plus fruitée et crémeuse. En fin d’évolution, le parfum prend des aspects de savonnette blanche, mais aussi le fantôme d’un gardénia, et une amande boisée. Tenue et sillage sont au rendez-vous, sans pour autant que le parfum ne prenne toute la place.
Mimosa est très naturaliste, l’on perçoit bien les pompons jaunes poudrés et leur note amandée, dans une ambiance de douceur chaleureuse. Au porté, des facettes plus vertes rappellent la sève de l’arbre, mais aussi l’odeur délicate d’un bouquet légèrement fané, oublié dans un vase. Le fond évoque la paille et les champs blonds de l’été. Une poésie assez courte, qui reste très près de la peau, avec beaucoup de délicatesse.
Ambra explore les facettes liquoreuses de l’ambre, tout en conservant une forte dose de vanille. On perçoit l’essence d’immortelle, chaude, avec ses facettes anisées de réglisse, mais sans l’aspect curry. L’ouverture épicée parle plutôt de cannelle, fusante et évidente. Puis, avec plus de sillage que le mimosa, il se stabilise dans son évolution.
Les compositions ne prétendent pas à l’originalité mais plutôt à une simplicité assumée, et c’est en ce sens réussi. Par ailleurs, le flacon de 10 ml, très accessible, permettra à chacun d’essayer ces parfums sans avoir à casser sa tirelire – chose devenue plutôt rare par les temps qui courent !

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par Bluebell, le 17 septembre 2021 à 09:07

Quelle belle surprise que ces trois créations !
Pour ma part ma préférence va à Tuberosa qui je trouve est l’une des meilleure tubéreuse que j’ai pû sentir. Un équilibre parfait, très naturaliste tout en restant complexe, évitant l’écueil lacté/coco.On sent poindre dans la composition du gardénia, de la rose et l’alliance au santal et magnifique. Une tenue et un sillage parfait ! On est dans un jardin luxuriant et délicieux. Une fragrance qui me rappelle la même pureté et la qualité de Santa Maria Novella . Il en va de même pour Mimosa et Ambra. Un coup de cœur pour cette maison qui a le mérite de rester accessible quand on voit l’envolée des prix chez Guerlain…

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Passionez

par Passionez, le 15 septembre 2021 à 20:06

J’ai fait une brève découverte de ces nouveaux parfums aujourd’hui. Avant le changement de packaging de la marque, j’étais séduite par la beauté simple, joyeuse et non prétentieuse de ces parfums. Après la "ré-orientation" du Couvent en marque de niche aux codes de luxe sobre (si lassants tellement ils sont répétitifs), je m’en étais éloignée. (Le packaging noir est d’un ennui mortel et me fait penser avec nostalgie aux flacons colorés de l’Artisan Parfumeur qui jadis infusait la parfumerie d’une touche de gaieté bucolique.) Les nouvelles fragrances ne me séduisaient plus et je trouvais que la marque devenait quelconque tout en étant moins abordable côté prix.

Ces 3 parfums fraichement lancés me réconcilient avec le Couvent (je regrette le "des Minimes" qui ajoutait de la poésie). On retrouve la simplicité d’antan et les belles matières premières. J’ai eu une préférence pour Ambra et Mimosa. Le 1er m’évoque un accord ambré particulièrement chaleureux et pétillant à la fois. La famille ambrée est l’une de mes préférées même si je m’en suis un peu lassée en la portant trop. Souvent je trouve les parfums ambrées rassurants et/ou sensuels. Mais ils restent assez sombres, riches et résineux. Ambra garde cette facette rassurante mais bizarrement ce n’est pas le labdanum et l’immortelle qui me sautent au nez mais la bergamote. Elle traverse le parfum comme un rayon de soleil l’infusant de lumière, de légèreté et de gaieté. Effet que je trouve particulièrement réussi. Le petit côté meringue au citron est craquant aussi.

Mimosa m’a charmée par ses accents poudrés amandés qui retranscrivent si bien la fleur de mimosa.

Tuberosa est plus classique à mes yeux. Autant j’aime la tubéreuse, autant je la préfère plus verte et moins crémeuse et lactée comme elle se présente ici. J’ai eu une pensée pour Vamp à NY d’Honoré des Près que Tuberose m’a rappelé en la sentant aujourd’hui.

En résumé, ces 3 nouvelles créations, que j’ai abordées avec hésitation je l’avoue, ont été une belle surprise. J’y retrouve la patte de Jean-Claude Ellena. Simplicité, beauté et poésie. Elles me font penser à certaines Hermessences et parfums Perris Monte Carlo, en plus dense.

Il ne me reste plus qu’à les essayer sur peau.

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