Auparfum

Ysatis

17 mars 2013, 17:10, par Opium

Bonsoir Farnesiano.

 

Merci bien pour votre compliment ! Suis ravi d’avoir visé si juste et que mon évocation soit parlante.

 

Votre évocation du paradoxe de l’époque de création de ce parfum m’a interpellé. C’est vrai que pendant que les parents "s’enformolaient" (s’embourgeoisaient) en rêvant aux épaulettes et tailleurs ultra-cintrés, à des comptes d’épargne bien fournis et à toujours davantage de produits de consommation ("essentiels"), les enfants se rebellaient, ainsi que toute une part de la société.

 

Cette hyper-opulence, ce trop plein de tout est hallucinant.
Là où je suis fasciné, c’est qu’en composition : 1 + 1 + 1 font rarement 3, encore plus rarement 4, mais plutôt souvent 2 ou 2,5 ! En ajoutant des éléments disparates, des jeux de forces et d’oppositions font que des notes et éléments s’annulent. Dominique Ropion est le seul, avec Edouard Fléchier, à avoir trouvé une sixième et même une septième vitesse dans une boîte à changements avec un levier qui n’en contient que cinq et où la plupart des gens ne poussent que les trois premières vitesses.
La double idée de génie a été : d’une part, de "dérider" le chypre par une association entre ambre et fruité de la coco, qui parvient à le faire sourire malgré son corset bien serré ; d’autre part, d’oser remplacer l’habituel jasmin délicat qui lie les notes dans les chypres historiques, remplacé oui, mais par une fleur apparentée mais bien plus expressive, la normalement si vulgaire tubéreuse et son "éclat de rire à la coco" (c’est elle qui apporte ce moment de rire survivant quand le lamé or du chypre commence à s’imprimer dans la chair et à se faire douloureux, comme un cocktail qui, par l’alcool, parvient à faire oublier les désagréments d’une tenue sexy mais inconfortable) !
Mais, si cette idée est géniale, encore faut-il que, techniquement, les notes jouent en même temps sans écrasement les unes des autres. Là où, vraiment, ça force l’admiration (en tous les cas la mienne), c’est qu’on entend toutes notes, tout est perceptible ! Dans l’orchestre, les violons, les flûtes et même la harpe si fragile parviennent à se faire entendre. L’équilibre de l’orchestration est parfait. Il ne s’agit pas juste d’empiler les notes, il faut que chacune survive dans toutes les autres instrumentations qui jouent avec elle et lui son concurrentes. Dominique Ropion et Edouard Fléchier parviennent à cela. Ce sont un peu les "Verdi" de la parfumerie pour moi. C’est, vraiment, génial !

 

Ysatis semble tentaculaire. Un parfum récent qui y est apparenté est, selon moi, Géranium pour Monsieur, la menthe contagieuse qui semble devenir un éléphant de sillage au fur et à mesure qu’elle sort du flacon et s’évapore de soi. Et, encore davantage, le parfum qui en serait issu, Portrait of a Lady. Pour moi, c’est le double "maléfique", la "mauvaise jumelle", de Ysatis : là où l’une est solaire et lumineuse, malgré quelques assombrissements, l’autre est sombre et ténébreuse malgré quelques éclaircies. Mais, toutes deux sont à la fois, paradoxalement : envahissantes et exaspérantes en même temps que fascinantes et radieuses !
C’est dingue comme, à 25 ans d’intervalle, deux parfums se répondent dans le style. La rose-patchouli boisée orientalisée animale "et-bien-plus-que-cela" à la tubéreuse ambrée chyprée "bien-davantage-que-cela" !

 

J’ai une sorte de rêve/fantasme (qui, donc, ne sera jamais assouvi), ce serait que le génial Dominique Ropion réécrive Ysatis 25 ans après, soit aujourd’hui, mais avec les nouveaux composants à sa disposition, comme pour l’énormissime Portrait of a Lady : une réécriture du gigantesque floriental chypré vert tubérosé... Juste pour voir ce que cela donnerait... #onpeutrêver

 

Vos expressions "la morsure dans la fourrure" et "le tranchant dans la tendresse" sont tellement vraies, poétiques, imagées et justes ! Et, applicables à quelques anciens parfums tels les chypres. Aujourd’hui, c’est le vautrage dans le sirop en guise de "sexualité" qui ne s’assume pas et que la pudibonderie ambiante a choisi de nommer "sensualité" que l’on étale comme "nouveauté qu’elle est trop bien, trop belle, trop clâsse". Qui a dit "politiquement correct" ? Décidément, tout n’est qu’un éternel recommencement. Les normes sont élargies, puis, resserrées et ainsi de suite.
Ysatis est une merveille. C’est dingue comme je le veux lui. ;-)

 

Merci pour votre compliment et votre intervention.
Bonne soirée et bonne fin de week-end.
Opium

Signaler un abus

Vous devez être connecté pour signaler un abus.

à la une

Tutti Twilly

Tutti Twilly - Hermès

Voilà une création dont les idées sont comme ses notes fruitées : vives, fusantes, presque vrillantes !

en ce moment

il y a 3 heures

J’ajouterais à la liste des parfums précédemment cités : Chant d’arômes de Guerlain, au charme tendre(…)

il y a 3 heures

Bonjour Christine Andriot, bienvenue sur Auparfum. Ah vous touchez là une corde sensible pour(…)

il y a 5 heures

Bonjour à toutes et tous ! Je suis nouvellement abonnée à Au Parfum ! J’ai fait cette démarche(…)

Dernières critiques

Iris Médicis intense - Nicolaï

Sous le soleil de Toscane

Encre indigo - Lalique

Roche en fusion

Belle de Niassa - Caron

Fleur au zénith

Avec le soutien de nos grands partenaires