Auparfum

Un parfum pour grandir encore...

Nymphomaniac

par Nymphomaniac, le 31 mai 2014

Brontë, ce sont avant tout les photos magnifiques de ton blog artistique qui m’évoquent des idées de parfum. Ton travail m’évoque en effet quelque chose de sereinement morbide. Une morbidité sereine. J’y associe sur le plan musical les dernières œuvres de Luigi Nono, à la fois élégiaques, mortifères, alternant de brefs éclats d’une grande violence fortissimo avec de longues stases emplies d’une grande sérénité, à la limite de l’audible.

Ton travail textuel et photographique dégage un paysage impitoyable :
les eaux troubles les poissons et les oisillons morts la nature morte la mort d’ailleurs il faut le dire la terre la tourbe le sang la menstruation les gestes implacables placés à mi-chemin entre le désir de tuer et celui d’aimer l’absence de l’être aimé peut-être il faut le dire le verre broyé la mort le sexe le sexe et la mort oui c’est un peu la tarte à la crème il faut le dire aussi les poils la peau mais aussi de manière allégorique une lumière prégnante quoique cachée presque un clair-obscur donc pouvant laisser croire à une hypothétique renaissance de la nature après son inévitable destruction et ainsi du coup la graine la semence l’éjaculat ; mais l’être aimé n’est pas là il est mort peut-être seuls des hommes errent pareils à une meute de chiens menaçants ils vont venir se vider les éjaculats donc mais point d’éjaculations pas de jouissance ici oui il faut le dire l’orgasme est absent la nature est livrée minérale et la lumière est faible le soleil s’est presque éteint quatre milliards d’années peut-être se sont écoulées les centrales nucléaires ont explosé depuis longtemps livrant la mort rendant le sang radioactif les animaux morts la putréfaction la souffrance est là oui la mort la mort et le sexe malgré tout il faut bien se vider oui et aussi du sang des menstruations un très faible éclat de lumière blafarde parmi les giclées de tourbe les oiseaux meurtris leurs plumes desséchées les éclaboussures de foutre les rires éteints les poils les animaux au regard interrogateur les cadavres aussi peut-être.

Donc je proposerais un parfum de sang, de terre, de sexe, de destruction, de restes, surtout. À la fois minéral et menstruel. Un Jus de Parfum, tâché, sombre, plus qu’un Parfum. Mais aussi, malgré tout, un soupçon de lumière, un voile de douceur peu perceptible mais fulgurant, et conséquemment une très modeste présence de la tubéreuse dans le parfum personnalisé que je propose ci-dessous.

Pour réaliser 100 ml. de ce jus de parfum, voici tout d’abord les ingrédients à acheter (il faudrait commander des « decants » pour diminuer le coût) :
– 45 ml. de M/Mink (Byredo) ;
– 22 ml. de Bois d’Encens (Armani) ;
– 16 ml. de Secrétions Magnifiques (EldO) ;
– 16 ml. de sang de canard frais (Boucheries Bernard ou autres) ;
– 15 ml. de ton sang menstruel ;
– 14 ml. de Peety (O’Driu) personnalisé par un passant choisi au hasard ;
– 14 ml. d’Iris Silver Mist (Serge Lutens) ;
– 13 ml. de jus de maquereau mariné au vin blanc (Saupiquet) ;
– 11 ml. de Fracas (Piguet) ou mieux de Carnal Flower (EdP Malle) ;
– 9 ml. de sperme fraîchement recueilli (de provenances multiples).

Il faudra également les matériaux et ustensiles suivants :
– 250 grammes de terreau (Leroy Merlin ou autres) ;
– une bouteille en verre quelconque ;
– une écuelle en acier, impérativement rouillée ;
– une amphore en terre cuite.

Voici ensuite la phase de réalisation que je te propose : dans la bouteille, mélange tout d’abord l’ensemble des constituants liquides (soit 175 ml. exactement). Secoue bien dans une phase de violence cathartique, puis laisse reposer la solution dans l’écuelle rouillée quelques heures lorsque la douceur ou la lassitude s’empare de toi. Ici, je te propose comme musique d’accompagnement « Okanagon » puis « Maknongan » (impérativement dans la version avec voix de Joëlle Léandre) du regretté Giacinto Scelsi : violence et douceur alternent dans un tout cosmogonique magnifique. Ensuite, passe très lentement la solution à travers la motte de terreau (filtrage par la terre nourricière, hélas meurtrie). L’action doit s’arrêter lorsque 100 ml. de Jus de Parfum exactement sont recueillis dans l’amphore en terre cuite placée en dessous (aux parois encore tâchées de sang menstruel, dans la mesure du possible). Le terreau encore imbibé des 75 ml. de liquides non recueillis par le filtrage pourra servir de pâtée exfoliante pour le corps, voire de beurre corporel parfumé, selon la texture initiale du terreau ayant servi de filtre. L’amphore, une fois fermée, contiendra ton parfum personnalisé, à conserver au frais et à l’abri de la lumière.

Ce Jus de parfum, je l’espère, accompagnera ton travail à venir, en le sublimant encore plus, si cela était toutefois encore possible.

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