Auparfum

Imperial Tea

Kilian Paris

Flacon de Imperial Tea - Kilian Paris
Coup de cœur
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La première gorgée de thé

par Thomas Dominguès (Opium), le 14 juillet 2014

Imperial Tea est l’une des deux propositions effectuées dans la collection Asian Tales avec Sacred Wood en 2014.

Une âcreté immédiate, celle du jasmin, monte à la vaporisation. La thé aux inflexions florales s’humidifie dans la foulée pour se faire détrempé. Puis, il développe l’impression d’une banane grasse entre verte et un peu mûre. On croit croquer dans la peau de la banane, comme lorsque l’on tente de percer l’enveloppe qui entoure le fruit moelleux à l’intérieur et qu’on le regrette en fronçant du nez car cela est farineux et surtout très amer.

L’âcreté, fugace et peu agressive, participe du réalisme de ce thé et se métamorphose assez rapidement en âpreté. L’illusion est parfaite, on croit avoir avalé une gorgée de thé au jasmin brûlant qui serait amer avec ses notes de foin sec au point de recouvrir le voile du palais d’un film âcre en fond de gorge. Sensation que l’on a souvent lorsque l’on termine son repas par un thé au jasmin dans un restaurant asiatique de quartier dont l’amertume, fort heureusement, évolue vers la douceur d’une nuance de tilleul.

Le parfum assez linéaire, peu évolutif, si ce n’est par l’adoucissement du jasmin qui semble perdre son amertume rugueuse pour se faire plus cotonneux jusqu’à disparaître lentement en devenant totalement transparent, paraît simple tout en se révélant de toute beauté. Ainsi, ce qui s’apparente à une simple évocation d’un thé au jasmin devient en réalité un tour de magie enchanteur.

Imperial Tea est la démonstration que l’on peut proposer un parfum intelligent destiné d’abord aux asiatiques, puisque cette sortie s’inscrit dans la collection des Asian Tales ("Contes Asiatiques"), qui échappe aux floraux gras printaniers aux notes fruitées douces indifférenciées et autres sempiternelles fleurs de cerisier insignifiantes qui semblent être les seules propositions à même de creuser un sillon auprès d’une cible connue pour ne pas supporter les parfums.

Mais, ces considérations matérielles mises de côté, Imperial Tea est surtout une esquisse parfaite, qui pourrait ressembler à une sorte d’haïku tracé à grands traits déterminés et se révèle être plutôt un travail pointilliste où chaque coup de pinceau a été pensé pour parfaire le motif voulu de ces grelots de jasmin asséchés qui parfument un thé humecté puis versé dans une tasse.

Ce parfum aurait été la possession de Calice Baker qui a accepté de la commercialiser pour Kilian. Il est tout à fait possible qu’elle ait souhaité conserver cette odeur parfaitement équilibrée pour elle seule, comme un secret, tant ce parfum évoque presque quelque chose de l’ordre de l’intime. Il émane de ce thé, dont le réalisme figuratif confine à la quasi-perfection, toute la poésie d’un moment partagé autour d’une tasse un après-midi au calme dans un intérieur confortable, chaleureux et douillet.

La transparence fruitée de Beyond Paradise et de J’adore et les notes florales cristallines qui sont souvent la signature de Calice Becker hantent cette tasse en porcelaine. Mais, ici, le minimalisme d’une note montrée comme sous un microscope virtuel, ou plutôt observée d’un coin de fenêtre, est d’une rare maîtrise, proche de celle consacrée aux gestes des rituels du thé. Il s’agit, plus que d’un parfum, d’une pause émouvante, d’un pur moment de bonheur consacré à soi.

(Il me paraît incroyable d’admettre qu’une odeur de thé au jasmin puisse me transporter à ce point, et pourtant...)

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Sehnsucht nach dem Duft...

par Sehnsucht nach dem Duft..., le 19 octobre 2014 à 17:59

Avec cette description, j’ai très envie de découvrir ce parfum ! Le parfum qui me fait le plus penser à l’odeur du thé vert au jasmin -pour être encore plus précis, le Chung Feng- est Olène de Diptyque. L’odeur est incroyablement semblable à ce thé qu’il soit senti non infusé, infusé à chaud, infusé à froid... J’adore, et, pour un parfum de fleurs blanches, le trouve pour cette raison, parfaitement portable par un homme, même si les parfums n’ont pas de genres !!

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par Opium, le 19 octobre 2014 à 21:37

Bonsoir Sehnsucht nach dem Duft...,
J’espère que vos attentes ne seront pas déçues.
Je trouve le résultat de l’ordre de l’hyperréalisme en termes de rendu. Mais, comme le soulignait un ami, il s’agirait plutôt d’un thé amer et âcre de restaurant que d’un thé très fin. Un peu "cheap" peut-être en somme, mais, d’autant plus parlant car il fait référence à ces moments où on est assis au restaurant à table, soufflant sur notre tasse brûlante de thé au jasmin. ;-)
N’hésitez pas à venir nous raconter ce que vous en aurez pensé... ;-)
Bonne soirée.
Opium

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Jicky

par Jicky, le 31 juillet 2014 à 16:43

Ton texte est parfait Opium.
Je me rends compte que je n’avais pas commenté ce parfum qui, s’il n’a pas forcément des codes niches évidents (voire mêm des codes de la parfumerie alcoolique), est à mon nez vraiment très intéressant ! Pour ma part, si je lui reconnais sa construction florale (mais tellement figuratif comme tu dis qu’il en perdrait presque sa nature de "parfum floral"), j’avoue que ce qui me fascine le plus dans ce parfum, c’est le traitement de la fumée. En fait, on sent (et on imagine) tout le temps les parfums fumés comme des blocs très puissants ayant tendance à dominer le parfum (au point de définir ledit parfum, on parle de "parfum fumé"), mais je trouve qu’Imperial Tea parvient à traiter la fumée du thé de manière hyper intéressante puisque, pour la première fois, elle est traitée sur toute la longueur du parfum (ce qui lui donne ce côté assez linéaire) mais surtout dans une transparence totale ! A vrai dire, on dirait presque pas que la fumée est traitée, mais plutôt suggérée. Mais cette suggestion est d’une finesse incroyable, on croirait un voile de dentelle cousu très finement pour recouvrir le parfum directement, lui coller à la peau sans jamais être collant sur notre peau (ce qui est presque Lutensien : il joue beaucoup sur ces photos pour Shiseido sur des visages recouverts d’un voile très léger de dentelle).

D’ailleurs, j’ai presque l’impression que c’est ce voile de fumé qui permet de donner sa complexité au parfum : il se lie à merveille à l’amertume de l’accord, réchauffe le traitement un peu clinique du simple thé au jasmin et lui donne cette projection aérienne que j’aime tant. Bien évidemment, ce côté contemplatif en fera bailler plus d’un, c’est évident ; J’entends déjà les gens dire qu’ils ne voudront pas se parfumer avec une telle odeur (alors que ça ne choque personne de sentir le yaourt périmé, le sucre bouilli ou le déo cheap), bref le débat sera là. J’avoue que je préfère m’extasier devant la précision et le goût des détails d’un parfum comme celui là. Et que Kilian continue sur cette voix, je l’ai détesté de bout en bout depuis 2010, mais qu’il continue à me surprendre comme il l’a fait cette année.

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par Opium, le 31 juillet 2014 à 17:25

Salut Jicky.
Merci beaucoup, c’est adorable, je suis content que ce texte te paraisse pertinent.

Tu traites, à ton tour, un aspect que j’avais plutôt laissé de côté et qui est bien intéressant : la fumée sous cette forme de vapeur, une fumée assez âcre mais plutôt blanche et humidifiée que celle à laquelle on est davantage habitués plus sombre et suffocante.
Or, cela est fort intéressant.
Et, ta représentation d’un voile lutensien en dentelle brodée est, également, d’une justesse rare, cela permet d’appréhender parfaitement cette fumée-ci plus subtile. ;-)

Ce parfum est très "contemplatif" pour moi comme tu l’as souligné. Je comprendrai bien que certain(e)s trouvent ennuyeux de sentir le thé au jasmin de manière aussi réaliste. Mais, après tout, l’Eau Parfumée au Thé Vert a réussi à marquer les esprits durablement avec un accord dont la figuration peut faire penser à celle d’Imperial Tea même si ce dernier est bien plus réaliste dans la retranscription de sa note de thé encore, là où Jean-Claude Ellena préfère les élaborations davantage intellectualisées qui obligent à des reconstructions mentales moins "terre à terre" dirais-je.
Pour le paradoxe de certain(e)s qui ne veulent pas sentir certaines notes très fonctionnelles alors qu’ils/elles portent d’autres notes dont la fonctionnalité est au moins aussi cheap voire bien davantage, tu sais déjà ce que je pense de tout cela... ^^

Comme tu le dis, quand By Kilian propose ce genre de choses, on croit à nouveau en l’intérêt d’une parfumerie qui peut être aboutie, non mensongère, élaborée mentalement et jouissive émotionnellement. ;-)
Merci encore pour ton message.
Opium

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